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Nicolas Thierry
Question N° 13208 au Secrétariat d'état à la mer


Question soumise le 28 novembre 2023

M. Nicolas Thierry alerte M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur la situation toujours alarmante des cétacés dans le Golfe de Gascogne, due aux captures accidentelles qui perdurent. Si un arrêté a bien été pris par le Gouvernement le 26 octobre 2023, établissant des mesures de protection et de fermeture spatio-temporelles, celles-ci sont insuffisantes au regard du risque qui pèse sur ces espèces. En mars 2023, le Conseil d'État avait enjoint au gouvernement français de mettre en œuvre, sous 6 mois, « des mesures complémentaires de nature à réduire l'incidence des activités de pêche dans le Golfe de Gascogne sur la mortalité des petits cétacés à un niveau ne représentant pas une menace pour l'état de conservation de ces espèces » et « d'assortir les mesures engagées ou envisagées en matière d'équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique, de mesures de fermetures spatiales et temporelles de pêche appropriées, tant que n'était pas établie leur suffisance pour atteindre cet objectif ». Pourtant, les modalités de fermeture de l'arrêté sont bien en deçà des préconisations du Conseil d'État et des recommandations scientifiques. La durée de fermeture de la zone concernée, prévue par l'arrêté entre les 22 janvier et 20 février inclus pour les années 2024 à 2026, est trop courte pour espérer un impact significatif et une conservation réelle de ces populations. Par ailleurs, cette interdiction de pêche ne concerne que les engins présentant les risques les plus élevés plutôt que tous les navires impactant et prévoit un éventail de dérogations rendant la mesure inopérante. En effet, les armateurs s'équipant de dispositifs techniques actifs de réduction des captures, de dissuasion acoustique ou d'un système actif d'observation électronique à distance sont exemptés des mesures restrictives. Or ces différents équipements sont largement insuffisants, comme le pointe le Conseil d'État lui-même. M. le député rappelle qu'il ne s'agit pas là d'une question de bien-être animal, mais véritablement d'un enjeu d'extinction. Plus de dix mille cétacés meurent chaque année dans le Golfe de Gascogne sous l'effet de l'activité humaine. Aux côtés du grand dauphin, actuellement dans un état de conservation dit défavorable, deux autres espèces, le dauphin commun et le marsouin commun, font même face à un danger d'extinction sérieux, a minima régionalement. Pourtant, cette hécatombe n'est pas une fatalité. Mais elle nécessite l'établissement de mesures à la hauteur des préconisations tant des scientifiques, que des associations, du Conseil d'État et des élus qui interpellent le Gouvernement. Parmi ces mesures, M. le député demande l'interruption totale des pêches à risque sur la période hivernale dite « à risque fort », du 15 janvier au 31 mars de chaque année et sur la période estivale pour une durée d'un mois ; interruption accompagnée d'une indemnisation des pêcheurs concernés, comblant le manque à gagner de la mise en pause de leurs activités. Ainsi, il lui demande quelles mesures supplémentaires, au vu de l'insuffisance de celles nouvellement engagées, il serait prêt à prendre, conformément aux récentes recommandations scientifiques.

Réponse émise le 19 décembre 2023

Face à l'augmentation d'échouages de cétacés, la Commission européenne a mis en demeure la France à l'été 2022 de renforcer les mesures de lutte contre les captures accidentelles. Le Gouvernement a lancé, dès septembre 2022, un plan d'urgence de 17,8 millions d'euros en ce sens. C'était la première fois qu'un plan de ce type était mis en place aussi rapidement et avec des financements publics aussi importants. Il prévoyait notamment l'équipement en dispositifs d'effarouchement, de caméras embarquées et de systèmes de suivi GPS d'environ 250 navires à des fins d'observation scientifique. Le Conseil d'État a considéré, dans son jugement du 20 mars 2023, qu'à date les actions mises en œuvre étaient insuffisantes pour réduire le nombre d'échouages sous le seuil des 5 000 captures accidentelles évaluées. Le Secrétaire d'État chargé de la mer a alors reçu, le 27 avril 2023, avec la Première ministre, les professionnels afin de préparer ensemble les suites à donner. Trois principes ont été définis : Protéger les cétacés sans déstabiliser la filière pêche. Une équité de traitement en ciblant aussi les navires étrangers. Le besoin de faire progresser la connaissance scientifique et la transparence des résultats. Des concertations de plusieurs mois avec les représentants des professionnels locaux ont été lancées ainsi qu'une consultation du public par la suite. Cinq décisions fortes ont été prises à l'issue de cette concertation : Pour la première fois en France, une large fermeture spatio-temporelle de l'activité de pêche d'une durée de 30 jours (du 22 janvier au 20 février) lors des trois prochains hivers. La fermeture couvre l'ensemble du Golfe de Gascogne, soit une très large zone (188 500 km2). L'ensemble des filets et chaluts à risque sont concernés, à savoir 600 navires. L'élargissement de l'expérimentation à grande échelle de dispositifs techniques : des pingers répulsifs fixés à la coque du navire, émettant seulement lors de la mise à l'eau du filet, des balises acoustiques sur les filets, utilisant un signal bio-inspiré et des réflecteurs acoustiques passifs sur les filets droits, permettant d'augmenter la visibilité des filets vis-à-vis des dauphins. Le renforcement de l'observation des interactions en mer : des caméras embarquées devront être installées sur les navires volontaires d'ici fin 2024. Les navires équipés de dispositifs techniques reconnus par l'État seront exemptés de la fermeture spatio-temporelle Ces mesures s'appliqueront aussi aux navires étrangers. Les déclarations des captures restent par ailleurs obligatoires et primordiales, et les contrôles seront renforcés. Au-delà de ces mesures, ce qui importe est également de collecter des données scientifiques précises pour s'assurer que ces dispositifs fonctionnent. Afin de suivre au mieux ces captures accidentelles et permettre l'évaluation de l'efficacité des dispositifs techniques, un protocole scientifique a été mis en place, suivi par l'Office français de la biodiversité et l'Ifremer. En parallèle, les déclarations des captures accidentelles par les professionnels de la pêche restent obligatoires et primordiales en complément du projet de recherches scientifiques DELMOGES qui a pour objectif d'adapter au mieux les mesures durables de réduction des captures accidentelles de petits cétacés dans le Golfe de Gascogne. Un plan de contrôle renforcé sera mis en place dès l'hiver 2023-2024, avec les moyens des affaires maritimes, afin de s'assurer du respect des obligations réglementaires dont le période de fermeture spatio-temporelle.

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