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Élise Leboucher
Question N° 7323 au Ministère de la santé


Question soumise le 18 avril 2023

Mme Élise Leboucher interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation de l'établissement public de santé mentale de la Sarthe (EPSM). Alors que les personnels de l'EPSM de la Sarthe appelaient à une mobilisation, le jeudi 13 avril 2023 pour alerter sur la situation critique des conditions de prise en charge des patients et de leurs conditions de travail, Mme la députée tient à l'interroger sur les actions envisagées pour répondre à une crise globale de la santé mentale. Dans le département de la Sarthe, cette crise dure depuis plusieurs mois, voire des années, avec des tentatives de réorganisation qui à ce jour échouent dans l'amélioration des conditions de prise en charge de la population sarthoise et des conditions de travail du personnel. Les différentes restructurations successives ne font qu'éloigner encore plus la population sarthoise d'un accès à des soins psychiatriques et psychothérapiques de qualité. La crise concerne autant l'intra-hospitalier que l'extra-hospitalier, les carences de l'offre en première ligne ont abouti à la saturation des centres médico-psychologiques. Alors que les besoins en santé mentale ne cessent de croître, notamment parmi les enfants et jeunes, l'offre de soins est déficitaire, avec un manque alarmant de professionnels. Ainsi, la région Pays de la Loire compte seulement 18 psychiatres pour 100 000 habitants, un ratio largement en dessous de la moyenne française de 23 psychiatres pour 100 000 habitants, elle-même insuffisante. Au sein de la région, les inégalités sont criantes : alors que la Loire-Atlantique compte selon l'Observatoire régional de la santé 24 psychiatres pour 100 000 habitants, ce ratio tombe à 12 psychiatres pour 100 000 habitants dans la Sarthe. Le secteur de la psychiatrie ne peut être l'oublié des politiques publiques de santé. En mars 2023, la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale auditionnait M. Moscovici, Premier président de la Cour des comptes, dans le cadre du rapport sur l'offre de soins en pédopsychiatrie. Ce rapport porte des alertes sur la pédopsychiatrie, son financement et le manque d'ambition dans les moyens alloués. Les alertes qu'il formule ne sont pas nouvelles ; depuis des années, personnels, élus, associations et patients tirent la sonnette d'alarme et appellent à un changement radical d'approche ainsi qu'à une réelle gouvernance par les besoins. De réelles réponses doivent être apportées aux professionnels de l'EPSM qui ne peuvent être ni la télémédecine ni les autres initiatives similaires vendues comme innovantes mais ne répondant pas au manque global de moyens humains et financiers pour la santé mentale. Les patients ont besoin de lits, de soignants, de médecins et de relations humaines rassurantes, prolongées et régulières. Car, l'outil thérapeutique en psychiatrie, celui qui permet aux patients de retrouver la quiétude, c'est la relation et le temps. La psychiatrie a besoin d'une réflexion spécifique sur l'offre de soins qu'elle apporte à la population. Les personnels de la psychiatrie, à l'image de ceux des Ehpad et des hôpitaux, veulent pouvoir travailler dans de bonnes conditions. Ils ne le peuvent pas aujourd'hui. Dans une situation de crise du service des urgences du CHM, en lien avec les fermetures quasi permanentes des services d'urgence périphériques, des décisions fortes doivent être prises pour endiguer cette crise qui met à mal les soignants et ne permet pas de répondre aux besoins de la population. C'est dans ce contexte et en tant que députée engagée pour la défense des services publics, qu'elle lui demande ainsi de lui exposer les actions envisagées afin de combler impérativement le déficit de l'offre, de sortir de modes de fonctionnement sur la base de procédures dégradées et d'améliorer les conditions de prise en charge des patients et les conditions de travail des personnels.

Réponse émise le 11 juillet 2023

Le système de santé traverse une crise sans précédent sur l'ensemble de notre territoire, et la santé mentale n'est pas épargnée. La santé mentale et la psychiatrie sont aujourd'hui des enjeux majeurs de santé publique, dont le gouvernement s'est saisi avec détermination.  En Sarthe, l'offre de psychiatrie publique repose sur l'établissement public de santé mentale d'Allonnes, unique établissement hospitalier autorisé en psychiatrie dans le département. Il dessert un bassin de population de 600 000 habitants, soit le plus important hôpital psychiatrique de la région Pays de la Loire. Cet établissement traverse depuis plusieurs années une crise qui impacte les différents projets qui y sont conduits. Le nombre de psychiatres initialement porté à 50 avait atteint une trentaine l'année dernière et ce, sans réduction du nombre de lits depuis plusieurs années. Aujourd'hui l'établissement compte moins de 25 psychiatres, répartis entre la pédopsychiatrie et la psychiatrie adulte. Cette crise a nécessité des réorganisations, dont un nouveau projet stratégique construit en pluri professionnalité. Ce projet, travaillé tout au long de l'année 2022, est mis en œuvre depuis janvier 2023. Il est à noter que l'établissement a connu une nouvelle direction en septembre 2021 et qu'en parallèle de ce travail plusieurs dispositifs ont été mis en œuvre sur l'année 2022 : la mise en place d'un accueil « non programmé » en centre médico-psychologique (CMP) avec l'appui médical du centre hospitalier universitaire (CHU) d'Angers ; l'expérimentation du SAS psychiatrie en appui du SAMU 72 sur le volet psychiatrique ; l'ouverture d'une unité d'hospitalisation de courte durée aux urgences : l'ouverture de deux unités de préparation au médico-social afin d'optimiser les projets de prise en charge en articulation. Cette liste non exhaustive témoigne de la mobilisation des équipes. Afin d'accompagner tous ces changements, un élan de solidarité régionale s'est déployé et une Cellule régionale d'ordonnancement des lits en psychiatrie (CROP), coordonnée par le CHU de Nantes, a été mise en place à la demande de l'Agences régionales de santé (ARS). Plus de soixante patients de la Sarthe ont ainsi été pris en charge par les établissements environnants. L'ARS travaille actuellement sur le nouveau projet régional de santé (PRS). Dans la définition de ses objectifs, ce nouveau projet régional de santé (PRS) comporte un volet santé mentale, avec des orientations plus ambitieuses encore que précédemment. Collectivement, quatre axes ont été définis sur lesquels il est nécessaire d'avancer simultanément :  la crise des urgences, afin de répondre de façon appropriée aux situations aigues : mise en œuvre et renfort du SAS psychiatrie 72 ; la crise de l'intra hospitalier, qui demande une stratégie globale des ressources humaines, prenant en compte les conditions de travail des personnels dans la mise en œuvre des différentes organisations ; la crise des ressources humaines, qui amène à questionner la qualité de vie au travail à l'hôpital ; l'accompagnement des personnes vivant avec un trouble psychique dans un projet de vie choisi. L'ARS œuvre à construire les solutions avec les acteurs de terrain. A cet effet, les solutions issues des CNR ont commencé à être travaillées dans les territoires. Les consultations dans le cadre de l'élaboration du PRS sont également en cours avec les différents acteurs. Toutes ces initiatives et efforts combinés aux mesures globales touchant entre autres les autorisations et le financement de la psychiatrie, permettront d'avancer dans la transformation profonde que demande cette crise de la santé mentale. Au niveau national, conscient des difficultés que rencontre la psychiatrie, le ministère de la santé et de la prévention a déployé des moyens importants pour renforcer l'offre de soins sur le territoire. Un rattrapage financier global sur l'offre de soins en psychiatrie été amorcé depuis 2019 et poursuivi chaque année : en opérant un rééquilibrage global des moyens financiers dévolus à la psychiatrie depuis 2018 : + 50 M€ en 2018, + 80 M€ en 2019, + 110 M€ en 2020 et à nouveau + 110 M€ en 2021 ; en mobilisant dès 2022, suite aux annonces issues des Assises nationales de la santé mentale et de la psychiatrie qui se sont tenues fin septembre 2021, des crédits pérennes supplémentaires à un niveau historique. Cela prend en compte de manière non exhaustive ; renforcement des CMP adultes et des CMP de l'enfant et de l'adolescent (CMPEA) : principal acteur de la psychiatrie de secteur et de la prise en charge de proximité, ces structures font face depuis plusieurs années à une demande de soins croissante et à des délais d'attente qui s'allongent : +8 M€ par an pour les adultes et +8 M€ pour les enfants et les adolescents pendant 3 ans (2022 à 2024) afin de faciliter les premiers rendez-vous par un personnel non médical et ainsi réduire les délais d'attente ; renforcement des maisons des adolescents (MDA) : ce sont des lieux ressources sur la santé et le bien être des jeunes et leur rôle a été mis en exergue par la crise sanitaire : +10,5 M€ sur 2022-2023 ; renforcement des moyens dédiés à la prise en charge du psychotraumatisme, particulièrement pour la prise en charge des mineurs victimes de violences qui constitue une priorité gouvernementale : +3,5 M€ sur 2022-2023. Ainsi, au total, 1 916 M€ sont prévus entre 2022 et 2026 dans le cadre des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie. Enfin depuis 2019, des appels à projets nationaux visent également à renforcer l'offre sur le territoire : l'appel à projet relatif au renforcement de la psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent (+20 M€ en 2019, + 20 M€ en 2020, + 30 M€ en 2021, + 20 M€ en 2022, + 25 M€ en 2023) ainsi que celui relatif au fonds d'innovation organisationnel en psychiatrie (+ 10 M€ en 2019, + 20 M€ en 2020, + 10 M€ en 2021, + 10 M€ en 2022, + 12 M€ en 2023). Les Assises de la santé de l'enfant qui auront lieu prochainement seront également une opportunité pour élargir la réflexion et renforcer encore les moyens dédiés à la santé mentale et à la psychiatrie.

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