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Emmanuel Fernandes
Question N° 8384 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 30 mai 2023

M. Emmanuel Fernandes attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la généralisation de la possibilité d'accès à une option de langue régionale dans tout l'enseignement. M. le député attire l'attention du ministre sur la nécessité d'organiser l'accès à la possibilité d'apprendre la langue régionale pour les élèves partout sur le territoire où il en existe une, à l'instar de l'Alsace. La République offre à tous les citoyens et toutes les citoyennes, par la Constitution et la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen, un pacte de respect des libertés, coutumes et convictions y compris locales. Il est donc essentiel de permettre la protection du patrimoine linguistique régional et de participer à protéger les singularités des langues qui enrichissent l'humanité. M. le député est profondément attaché à l'article 2 de la Constitution faisant du français la langue de la République et considère que sa primauté dans les services publics, y compris l'éducation, doit être préservée. Ce principe permet de garantir l'unité nationale et l'accès universel à l'information. C'est un gage de l'égalité républicaine et de l'exercice des droits. Il note, à ce titre, la censure par le Conseil constitutionnel des dispositions prévoyant la mise en place d'un enseignement immersif au sein de la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion. Toutefois, cette primauté du français ne peut occulter les langues régionales qui font partie du patrimoine de la France et dont l'usage est protégé, de même que les actions publiques et privées menées en leur faveur. En particulier, sans remettre en cause le fait que le français est la langue de l'enseignement, l'État doit organiser et généraliser l'accès à une option d'apprentissage de la langue régionale pour l'ensemble des élèves qui le souhaitent dans les territoires où ces langues existent. M. le député tient à rappeler que la signature de la Charte des langues régionales ou minoritaires par la France, même si celle-ci n'a jamais été ratifiée, engage celle-ci conformément à l'article 18 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1958 à « s'abstenir d'actes qui priveraient ce traité de son objet et de son but ». Dans ce cadre, la baisse continue du nombre de locutrices et locuteurs des langues régionales constitue un élément inquiétant : selon l'enquête Famille de l'Insee, d'une génération sur l'autre, le nombre de locuteurs et locutrices des langues régionales est divisé entre deux et cinq ! Aujourd'hui, la protection des langues régionales « contribue à maintenir et à développer les traditions et la richesse culturelles de l'Europe », selon le préambule la Charte. La France s'est également engagée par la ratification du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l'Organisation des Nations unies, conformément à son article 27, à respecter les droits des minorités linguistiques et le droit des personnes au sein de ces minorités à employer en commun leur propre langue. M. le député, en tant que député alsacien, pointe le fait que la langue alsacienne est indétachable de l'histoire et de la culture de la région. L'école, en particulier l'école publique, doit prendre sa part dans la poursuite de cette langue populaire qui doit compléter le français sans le remplacer. Dans toute la France, au côté de la langue nationale, les langues régionales participent de la force et de la richesse culturelle de la Nation. Ces langues doivent être préservées et donc enseignées. L'article L. 312-11-2 du code de l'éducation prévoit depuis 2021 que « la langue régionale est une matière enseignée dans le cadre de l'horaire normal des écoles maternelles et élémentaires, des collèges et des lycées sur tout ou partie des territoires concernés, dans le but de proposer l'enseignement de la langue régionale à tous les élèves ». Il est essentiel de généraliser l'accès à cette option de la langue régionale à tous et toutes les élèves qui le souhaitent et en particulier que cet enseignement ne soit pas réservé uniquement aux élèves scolarisés dans l'enseignement privé. Dans ce cadre, il faut recruter des professeures et professeurs capables d'enseigner ces langues dans tous les territoires concernés, former des étudiantes et étudiants dans la maîtrise et l'enseignement de ces langues régionales et rendre attractifs ces parcours notamment par une revalorisation des rémunérations. Ainsi, il souhaite savoir quelles mesures concrètes ont été prises par M. le ministre pour la mise en application de la généralisation progressive à tous et toutes d'options d'enseignement des langues régionales, notamment l'alsacien.

Réponse émise le 7 mai 2024

À la suite de la parution de la loi n° 2021-641 du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, le ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse a mis en place un certain nombre d'actions pour sécuriser les modalités de l'enseignement des LVR et garantir ainsi leur transmission dans les régions concernées. La circulaire « Langues et cultures régionales », publiée au bulletin officiel n° 47 le 16 décembre 2021, a défini les modalités de l'enseignement des LVR et présenté les différents dispositifs mis en œuvre pour les valoriser. Elle consolide en effet la place de l'enseignement des LVR sur l'ensemble du parcours de l'élève (enseignement extensif et intensif). La circulaire réaffirme également la modalité d'enseignement bilingue en LVR, que ce soit par la parité horaire hebdomadaire dans l'usage des deux langues ou par l'enseignement bilingue par la méthode dite immersive. Dans le cas de l'alsacien, cet enseignement est aujourd'hui dispensé dans le réseau des écoles associatives ABCM-Zweisprachigkeit sous contrat avec l'État et également dans les écoles bilingues publiques. Un effort significatif est consenti chaque année en faveur des réseaux d'établissements privés sous contrat dont le caractère propre est l'enseignement d'une langue régionale : ABCM pour les langues d'Alsace et de Moselle, Usbeldung pour le mosellan, Seaska pour le basque, Diwan pour le breton, La Bressola pour le catalan et Calandreta pour l'occitan. Entre les rentrées scolaires 2012 et 2021, l'ensemble de ces réseaux a obtenu de la part du ministère 139,5 équivalents temps plein (ETP). Par ailleurs, en 2020 et 2021, les réseaux de langues régionales ont reçu des dotations spécifiques au titre du remplacement des enseignants du premier degré en situation de vulnérabilité, du fait de la situation sanitaire. Celles-ci ont représenté respectivement 14 ETP et 9 ETP. Dans la perspective de l'ouverture d'une offre publique comme alternative à l'enseignement privé du réseau ABCM et en réponse à une demande des élus et de la communauté européenne d'Alsace, la Dgesco a récemment accompagné l'académie de Strasbourg dans le projet d'ouverture de 4 parcours bilingues nommés « parcours Tomi Ungerer ». Ces parcours proposent un enseignement à l'école maternelle dans trois langues : langue française, langue allemande et langue régionale alsacienne. Ces parcours viennent proposer une offre d'enseignement bilingue par la modalité d'immersion dans 4 écoles maternelles publiques d'Alsace : 2 dans le Haut-Rhin (Colmar et Brumath) et 2 dans le Bas-Rhin (Sélestat et Altkirch). Depuis la publication de la circulaire, le ministère a également développé les modalités de suivi de l'enseignement des LVR. Afin de disposer d'une cartographie actualisée de la carte des enseignements bilingues en LVR, la Dgesco procède depuis 2022 à un recensement annuel des établissements publics ou privés sous contrat proposant un enseignement bilingue, qu'il soit à parité horaire ou par la méthode dite immersive. Ce recensement s'accompagne également d'un échange régulier du ministère avec chaque académie au sujet des conseils académiques des langues régionales (CALR). Les CALR sont notamment consultés sur toute proposition d'implantation des enseignements en langue régionale. Sur la question du vivier des enseignants du premier degré, il existe les concours du CRPE spécial (le concours externe spécial langue régionale du CRPE et le second concours interne spécial du CRPE), qui présentent des épreuves supplémentaires portant sur une langue régionale. Ces concours de recrutement de professeurs des écoles (CRPE) sont composés des mêmes épreuves que le concours externe et le second concours interne, avec une épreuve d'admissibilité et une épreuve d'admission supplémentaires portant chacune sur une des langues régionales suivante : basque, corse, breton, catalan, créole, occitan-langue d'oc, langues régionales d'Alsace et des pays mosellans. La liste des épreuves de langues régionales ouvertes lors du concours est définie par chaque recteur en fonction de l'importance de leur usage dans la région académique. La mise en place de l'ensemble de ces mesures témoigne de la généralisation progressive à tous et toutes d'options d'enseignement des langues vivantes régionales. Ladite circulaire sécurise ainsi l'enseignement extensif (actions de sensibilisation et d'initiation, LVB, LVC, enseignement de spécialité, etc.) et l'enseignement bilingue, sous la forme de la parité horaire ou de la modalité dite immersive (sections bilingues, DNL, réseaux immersifs, etc.). Afin de renforcer l'offre linguistique en LVR au lycée, le centre national d'enseignement à distance (Cned) développe, et ce depuis la rentrée scolaire 2021, des parcours d'enseignement à distance dans quatre langues régionales au titre de la LVC : en basque, breton, corse et occitan-langue d'oc.

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