Intervention de Christophe Cavard

Séance en hémicycle du 27 février 2013 à 15h00
Débat sur le mali : au-delà de l'intervention militaire perspectives de reconstruction et de développement.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Cavard :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, mesdames les présidentes des commissions, chers collègues, voilà près de deux mois que l'intervention militaire de la France a commencée au Mali.

Au nom du groupe écologiste, je commencerai par rappeler quelques points. Tout d'abord, comme nous l'avions souligné dès le début, notre groupe ainsi que notre mouvement ont approuvé l'intervention militaire en la replaçant dans un contexte d'urgence à agir évident.

En second lieu, cette intervention ne peut faire l'économie d'un compte rendu précis au Parlement, que cela concerne la dimension militaire de l'intervention ou ses conséquences politiques et diplomatiques. Dans ce cadre, je tiens à saluer la démarche du Gouvernement auprès de notre assemblée et l'appelle à maintenir un dialogue régulier avec celle-ci.

Enfin, je tiens à assurer les familles du sergent-chef Harold Vormezeele et du lieutenant Damien Boiteux de la solidarité du groupe écologiste, et à saluer les forces françaises engagées sur le terrain.

Chers collègues, quelques jours après le décès du photographe Olivier Voisin en Syrie – à qui je tiens à rendre ici hommage, car par son engagement il a su comme d'autres maintenir le fil vital de l'information en temps de guerre, – je voudrais tout d'abord me faire l'écho des journalistes qui parlent de « guerre mystère » concernant le conflit malien, tant les informations sont faibles. S'agissant d'un terrain militaire engageant la France, nous devons encore une fois faire preuve d'exemplarité.

Alors qu'il semble que Gao et Kidal soient aux prises avec une évolution du conflit en guérilla, le sentiment d'absence de communication sur le bilan militaire, le bilan des pertes, les prisonniers de guerre, le bilan humanitaire de la première phase de l'intervention Serval, devient problématique.

Si le chiffre de 100 millions d'euros a été avancé par M. le ministre de la défense, rappelant le coût très important de notre intervention au Mali, notamment en comparaison de l'aide au développement, cette donnée doit surtout nous montrer l'extrême urgence d'un déploiement de forces sous mandat de l'ONU dans un bref délai.

Ce déploiement d'une force onusienne, par-delà sa capacité à accélérer la construction d'infrastructures vitales pour le développement du territoire malien, aurait un double intérêt : assurer l'engagement de la communauté internationale dans la résolution d'un conflit dépassant largement les frontières maliennes ; s'attaquer de façon plus conséquente aux problèmes sous-jacents qui ont permis à un tel conflit de se développer.

Pour nous écologistes, ces problèmes sous-jacents sont principalement de deux natures. Le premier est la crise alimentaire qui touche régulièrement le nord-Mali et affecte, selon une étude de l'ONU, une population de 1,6 million de personnes.

Toutes les ONG présentes sur place ont maintes fois attiré l'attention de la communauté internationale sur les priorités en matière de distribution de vivres et de fournitures de soins médicaux. Pour mémoire, une étude récente de Médecins du monde estimait que plus d'une personne sur dix était en état de malnutrition aiguë dans la ville de Kidal.

Cette crise alimentaire issue des problèmes de sécheresse, accentuée par une politique de développement insuffisante et trop centrée sur le sud, décuplée par la rébellion et maintenant par la guerre, ne peut rester sans réponse forte.

Si nous avons su répondre dans l'heure à l'urgence militaire, nous ne pouvons rester sourds à l'urgence humanitaire qui frappe cette région depuis trop longtemps. Notre histoire commune lie nos deux peuples. Nous avons un devoir de solidarité avec les habitants du Mali.

Nous savons que les stocks de nourriture et de médicaments sont disponibles : je pense aux camions bloqués à la frontière du Niger. Nous connaissons la capacité des ONG à intervenir rapidement. Nous avons maintenant le devoir de leur permettre d'agir sans délai.

Le deuxième problème sous-jacent est la crise démocratique. En se fédérant, des mouvements touaregs aux intérêts différents ont mis en lumière la forte attente des populations du nord pour la prise en charge de leurs problèmes quotidiens.

J'entends la voix de ceux qui crient à la non-représentativité des mouvements touaregs. Mais je leur réponds que la question fondamentale qui se pose est la capacité d'une population à prendre en charge son quotidien elle-même, au plus près de ses réalités. La subsidiarité n'est pas une remise en cause de la souveraineté d'un pays. Elle est la prise en compte d'une évolution démocratique nécessaire qui remet l'individu dans son environnement direct au coeur des décisions qui le concernent, comme cela pourrait être le cas dans la région de l'Azawad libérée des djihadistes.

Je regrette que le premier ministre Diango Cissoko ait fermé la porte à cette grande idée du fédéralisme. Bien sûr le peuple malien trouvera lui-même les outils constitutionnels de sa renaissance. Mais, dans cette panoplie, le fédéralisme que nous, écologistes, promouvons au coeur de l'Europe à l'instar de grandes nations comme l'Allemagne, est une piste intéressante qu'il me paraît important de porter dans le débat.

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