Intervention de Lionel Tardy

Séance en hémicycle du 26 mars 2013 à 15h00
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Des solidarités et des appartenances se sont mises en place – nombre de structures sont calées sur le canton. Des communautés de communes ont le même périmètre que le canton, avec le souci d'éviter que le canton ne soit partagé entre plusieurs communautés de communes : cela évite des rivalités et facilite le travail du conseiller général.

Tous ces équilibres vont voler en éclats avec votre redécoupage cantonal. En figeant le nombre de cantons sur l'existant, vous empêchez des rééquilibrages entre départements. J'ai déjà évoqué, en première lecture, le cas du conseil des pays de Savoie, composé des conseillers généraux de Savoie et de Haute-Savoie. On constate un déséquilibre important au profit de la Savoie, qui a 37 conseillers pour 415 000 habitants, quand la Haute-Savoie n'en a que 34 pour 738 000 habitants. Ce déséquilibre empêche de confier davantage de pouvoirs à cet organe, ce qui constitue un frein à un plus grand rapprochement des deux départements de Savoie. Sans cette règle de la stricte division par deux du nombre de cantons actuels, on aurait pu procéder à un rééquilibrage en fonction de la démographie, qui aurait été le premier pas vers un processus de rapprochement, voire de fusion de nos deux départements.

Plus globalement, je ne comprends pas que vous mettiez autant de contraintes dans la loi, alors que vous pourriez procéder au redécoupage cantonal par voie réglementaire. J'ai du mal à comprendre cet acharnement schizophrène du législateur à ligoter ainsi le pouvoir réglementaire, qui aura à procéder au redécoupage. On complexifie les choses, alors même qu'il faudrait davantage de souplesse et de liberté. On dirait que vous n'avez pas confiance en vous-même, monsieur le ministre !

J'aimerais aussi revenir sur une question à laquelle vous vous êtes bien gardé de répondre jusqu'à présent, à savoir les modalités du redécoupage. Lors des débats en première lecture, vous disiez que, les critères ayant été inscrits dans la loi, il ne restait plus aucune marge pour le pouvoir réglementaire et qu'il n'y avait donc pas de sujet ni de problème. Ce n'est pas une réponse satisfaisante ! Même si vous fixez dans la loi des critères – que je juge inutilement contraignants, je le répète –, il reste encore une belle marge de manoeuvre pour celui qui tiendra les ciseaux, notamment pour le redécoupage des cantons urbains des grandes villes.

Apparemment, cela va se faire discrètement, sans débat public. Certes, on va consulter, mais le résultat des consultations ne sera pas public – pas plus que l'avis du conseil d'État. Ce redécoupage cantonal n'aura strictement rien de participatif. On nous en donnera juste le résultat à la fin, en nous expliquant que si l'on n'est pas content, on peut toujours faire un recours devant le Conseil d'État ! Vous le savez comme moi, un tel recours prendra de longs mois et aura peu de chances d'aboutir, le Conseil d'État ne pouvant pas se permettre d'annuler ce genre d'opération alors que les élections sont si proches.

Pourquoi, monsieur le ministre, ne pas opérer le redécoupage sous les yeux du public, via internet ? Il serait possible de mettre en ligne les différents avis, les différents scénarios, et d'en expliquer les enjeux. Ensuite, bien entendu, le Gouvernement resterait maître des choix, mais chacun pourrait maîtriser les tenants et aboutissants des décisions, ce qui lèverait certaines de suspicions sur l'absence de neutralité politique du découpage.

Enfin, je voudrais terminer en abordant les problèmes que ce texte posera pour le fonctionnement des petites communes. Je ne comprends pas la justification du choix de diminuer le nombre de conseillers municipaux pour les petites communes. Existe-il des sièges vacants ? Qu'il y ait parfois des difficultés pour recruter, c'est possible, mais on finit toujours par trouver. En diminuant le nombre de conseillers, vous allez alourdir la charge des autres et, paradoxalement, renforcer les éventuelles difficultés à trouver des volontaires. Ces conseils municipaux fonctionnant sur un quasi-bénévolat, vous ne ferez même pas d'économies.

Un autre point me pose problème. Avec ce texte, vous imposez que la désignation des conseillers communautaires pour les petites communes se fasse dans l'ordre du tableau. Ce faisant, vous rigidifiez inutilement le fonctionnement des conseils municipaux, où la répartition des tâches, notamment les plus chronophages, se fait en fonction des disponibilités. L'ordre du tableau n'a aucun sens dans une petite commune : j'ai reçu des témoignages de maires ruraux de ma circonscription qui sont défavorables à cette évolution et demandent avant tout à ce qu'on les laisse s'organiser dans la souplesse, sans diminuer le nombre de conseillers municipaux.

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