Intervention de Fanélie Carrey-Conte

Séance en hémicycle du 11 septembre 2012 à 21h30
Création des emplois d'avenir — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFanélie Carrey-Conte :

Madame la présidente, messieurs les ministres, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je suis particulièrement fière de voir cette session extraordinaire s'ouvrir par l'examen d'un projet de loi aussi emblématique du changement de cap initié par la nouvelle majorité et des priorités qu'elle s'est fixées. Je tiens ainsi à saluer le retour d'une politique active et volontariste de l'emploi, qui contraste avec la politique au mieux inefficace, au pire contre-productive, menée par le précédent gouvernement.

Pierre Mendès France disait : « À partir du moment où, dans un pays, s'établit un divorce entre l'orientation d'un régime et les aspirations de la jeunesse, alors oui, la catastrophe est proche ». Le taux de chômage de 22,7 % des 15-24 ans en France métropolitaine, ce qui représente près d'un jeune sur quatre, crée une situation que l'on doit aujourd'hui qualifier de critique – le mot est faible. Nous ne pouvons plus tolérer de vivre dans un pays où les perspectives offertes à notre jeunesse, cet âge qui devrait être celui des apprentissages, de la découverte, de l'émancipation, soient un tunnel d'instabilité et de précarité. Il y a donc urgence, et les jeunes qui vivent ces situations le savent mieux que personne, à ce que les politiques publiques s'emparent de la question en activant tous les leviers à leur disposition, à commencer par celui de la création d'emplois.

Ce projet de loi a deux objectifs. D'abord, il va permettre à 150 000 jeunes de réussir leur première expérience professionnelle, de pérenniser leur emploi ou d'acquérir les compétences et qualifications leur permettant d'évoluer vers un autre emploi. Par ailleurs, il doit favoriser la création d'emplois dans des secteurs d'avenir, facteurs de croissance et de développement soutenable et durable.

À ce titre, nous avons, lors des riches débats qui se sont tenus au sein de la commission des affaires sociales, débattu notamment des secteurs, organisations et entreprises qui devaient être éligibles aux emplois d'avenir. A ainsi été discuté en commission le choix de réserver en priorité les emplois d'avenir au secteur non marchand et, de fait, à nombre de structures de l'économie sociale et solidaire.

Je voudrais dire ici pourquoi, à mon sens, le choix de donner la priorité à ce secteur n'est pas anodin, mais relève bien d'un choix politique clair, justifié par plusieurs raisons. D'abord, et cela a déjà été dit, ce projet de loi est à replacer dans le cadre de la politique globale du Gouvernement en faveur de l'emploi. Si les entreprises à but lucratif du secteur marchand ne sont que marginalement concernées par ce texte, elles seront, en revanche, concernées par d'autres dispositifs, notamment les contrats de génération qui vont être présentés au Parlement dans quelques mois.

Avec le choix de privilégier le non-marchand et l'économie sociale et solidaire – donc des emplois qui ne relèvent pas exclusivement du secteur public, contrairement à ce qui a pu être dit –, il s'agit de soutenir et de développer des secteurs que l'on sait aujourd'hui porteurs d'innovations, de potentialités pour le développement de filières d'avenir. Il s'agit également de faire le choix de l'utilité sociale car, comme l'a rappelé tout à l'heure M. le ministre, la quête de sens dans son activité professionnelle est une aspiration de plus en plus forte dans notre société, en particulier chez les jeunes générations.

Enfin, pour ce qui concerne les structures de l'économie sociale et solidaire, qui constitueront une grande part des employeurs, il s'agit de promouvoir un secteur dont les caractéristiques – la non-lucrativité ou la lucrativité limitée, la gouvernance collective et démocratique – incarnent une autre manière de concevoir et de faire de l'économie, plaçant l'homme et la femme, plutôt que le profit, au coeur de ses objectifs.

Je tenais à remercier les partenaires sociaux ainsi que les organisations employeurs, notamment les associations, mutuelles, coopératives, structures de l'insertion par l'activité économique – qui ont été intégrées au texte, contrairement à ce qui a été dit tout à l'heure –, qui ont démontré, par leurs contributions aux débats et leurs différentes prises de position, une grande volonté de participer à cet effort de la Nation pour l'emploi des jeunes, en particulier des jeunes non qualifiés. Je me félicite de cette démarche de dialogue et d'échange dans l'élaboration des politiques publiques. Elle marque une rupture avec la décennie précédente, pendant laquelle les associations, par exemple, ont trop souvent été considérées comme des prestataires et non comme des partenaires de la puissance publique.

Enfin, si le dispositif des emplois d'avenir n'est pas une démarche d'aide aux structures employeurs, mais bien d'accompagnement des jeunes sur le marché de l'emploi, nous sommes néanmoins convaincus que ces deux éléments sont convergents et indissociables. En effet, les emplois d'avenir s'adressant prioritairement à un public jeune peu ou non qualifié, les structures employeurs auront une responsabilité déterminante pour la réussite du dispositif, celle de l'accompagnement et de la formation. Cette responsabilité a d'ailleurs été nettement renforcée par le travail en commission, et nous pouvons, me semble-t-il, nous féliciter des enrichissements du texte en ce sens. Mais nous savons que certaines structures employeur, en particulier les associations, qui ont été nettement mises à mal ces dernières années, rencontrent des difficultés financières de nature à les fragiliser très fortement : il s'avérera donc essentiel, dans la mise en oeuvre des emplois d'avenir, d'être particulièrement vigilants quant à l'accompagnement, tant au plan administratif qu'au plan des ressources humaines, des structures qui emploieront des jeunes en emplois d'avenir.

Pour conclure, eu égard à la qualité des échanges en commission, je suis convaincue que la discussion en séance sera l'occasion d'enrichir encore ce texte par des débats constructifs. Au vu de la gravité de notre sujet, celui de l'emploi des jeunes et donc de notre avenir collectif, il ne saurait en être autrement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et RRDP.)

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