Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 17 septembre 2013 à 21h30
Lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière — Article 9 a

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Monsieur le député, nous nous souvenons tous de nos échanges très nourris lors de la première lecture. Je sais que vous y aviez déjà travaillé au sein de la commission des lois et, en séance publique, nous avions eu de nombreux échanges sur ce sujet.

Nous partageons la même préoccupation ; mais en l’occurrence, nous craignons que le mieux soit l’ennemi du bien. Nous disposons en effet d’une jurisprudence qui a fait ses preuves. Depuis le premier arrêt de la Cour de cassation en 1935, cette jurisprudence a permis aux juridictions de prendre des décisions tout à fait satisfaisantes en matière de délinquance économique et financière, de l’avis général des magistrats concernés, tant du parquet que du siège.

La rédaction que vous proposez ne pose pas vraiment de problème en tant que telle. Mais nous avons, sinon une inquiétude, du moins une interrogation sur la constitutionnalité de cette disposition, car elle ne définit pas de façon précise l’infraction dissimulée. Surtout, elle concernerait pratiquement tous types d’infractions, que celles-ci soient délictuelles ou criminelles, qu’elles concernent les atteintes aux biens ou aux personnes. Disposant d’une jurisprudence qui fonctionne bien et ne pose pas de problème, nous craignons de la fragiliser par cette disposition particulière.

Cette inquiétude a été exprimée, les arguments ont été échangés. Comme vous le savez, nos débats parlementaires servent de référence aux magistrats lorsqu’ils ont un doute sur l’interprétation à donner aux textes et s’interrogent sur l’intention du législateur. Par conséquent, grâce à cette initiative renouvelée et à l’opportunité que vous venez de nous donner de préciser à nouveau ce point, il ne fait pas de doute que cette jurisprudence pourra continuer à s’appliquer.

Cela n’exclut pas que nous procédions à un travail général sur le régime de la prescription. Votre compétence, que vous avez renforcée à l’occasion de l’examen de ce texte très technique et très politique dans ses intentions, permettra de faire oeuvre utile en toute sérénité.

Sous bénéfice de ces observations, et parce qu’il me contrarierait profondément de devoir émettre un avis négatif, je vous suggère de retirer votre amendement, monsieur le député.

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