Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 17 octobre 2012 à 15h00
Débat préalable au conseil européen

Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes :

…jusqu'à l'union politique.

Je voudrais rappeler quels sont les sujets à l'ordre du jour du Conseil européen de demain, redire ce que nous en attendons et quel est notre agenda, avant de conclure en quelques mots sur la suite, c'est-à-dire sur les échéances ultérieures concernant l'avenir de l'union économique et monétaire.

Tout d'abord, quelques éléments sur les décisions arrêtées au mois de juin, à l'application desquelles nous devons scrupuleusement veiller. Nous nous étions fixé trois objectifs.

Le premier était l'engagement d'initiatives fortes de l'Union européenne en faveur de la croissance, parce que nous étions convaincus qu'il n'était pas possible de rétablir durablement les comptes publics sans de telles initiatives.

Nous avions également la volonté, deuxième objectif, de remettre de l'ordre dans la finance. Une grande partie des difficultés auxquelles les économies sont confrontées résulte d'actes multipliés de spéculation, qui justifiaient une remise en ordre durable, définitive, de la finance, pour que celle-ci soit au service de l'économie réelle et de la croissance plus que de la spéculation.

Enfin, troisième objectif, nous avions la volonté de renforcer la solidarité au sein de l'Union européenne, notamment dans la zone euro, pour que la solidarité monétaire et financière entre les pays de l'Union devienne un élément permettant de surmonter la crise.

S'agissant, tout d'abord, des initiatives de croissance, je vous confirme que le plan de 120 milliards d'euros est en cours d'exécution, et je souhaite profiter du présent débat pour faire un point précis sur son état d'avancement.

Nous avons, comme chaque État, en liaison très étroite avec la Commission, demandé à l'ensemble des secrétaires généraux pour les affaires régionales des préfectures de nous indiquer quelles étaient les enveloppes pouvant être mobilisées en France au titre de ce premier axe de mobilisation des fonds structurels, pour des projets susceptibles d'être mis en oeuvre dans les meilleurs délais, afin qu'il puisse y avoir sans tarder des investissements réels, concrets en faveur de la croissance.

Les premières expertises de l'État montrent que près de 2,5 milliards d'euros, correspondant à un plancher et non à un plafond, peuvent d'ores et déjà être mobilisés pour accompagner dans les régions des projets concrets en faveur de la transition énergétique, du développement des transports, de l'équipement numérique des territoires, de l'innovation, du transfert de technologies, dans les filières d'excellence de notre industrie.

En ce qui concerne la recapitalisation de la Banque européenne d'investissement, le conseil d'administration de cette institution s'est réuni au mois de juillet, et les gouverneurs se réuniront de nouveau en décembre pour libérer en une seule fois les 10 milliards d'euros de recapitalisation, qui permettront de consentir 60 milliards d'euros de prêts, qui eux-mêmes enclencheront 120 milliards d'euros d'investissements. Cela me donne l'occasion de rappeler qu'il ne s'agit pas d'un plan à 120 milliards mais à 240 milliards, qui représente 2 % du PIB de l'Union européenne et près de vingt-quatre mois de budget de la Commission puisque ce dernier, en cours de négociation pour la période 2014-2020, est de près de 1 000 milliards d'euros.

Enfin, s'agissant des obligations de projets, les eurobonds, 100 milliards d'euros ont été mobilisés pour des projets en faveur du transport, 130 milliards le seront pour des projets en faveur de l'énergie et de l'équipement numérique du territoire. Ces montants sont des moyens que nous mobilisons en garantie pour débloquer les obligations de projets à hauteur de 4,5 milliards d'euros. En liaison avec la BEI, la Commission et le commissariat général à l'investissement, nous sommes en train d'arrêter la liste des projets susceptibles d'être éligibles à l'ensemble de ces dispositifs.

Nous prolongerons cette ambition de croissance – il en sera sans doute question au Conseil de demain – par d'autres initiatives, d'autres instruments. Je pense notamment au budget de l'Union européenne pour la période 2014-2020, en cours de négociation. Nous n'avons pas la même approche de ce budget que le précédent gouvernement, puisque nous n'entendons pas imposer les mêmes coupes que celles envisagées par nos prédécesseurs, et nous souhaitons que la taxe sur les transactions financières soit l'occasion de doter ce budget de ressources propres pour que nous puissions, par-delà la politique agricole commune, à laquelle nous tenons, par le biais des fonds de cohésion, du budget en faveur de la recherche ou du financement des grands projets innovants de demain – ITER et GMES –, faire de la croissance durable en Europe.

Toujours pour prolonger l'ambition de croissance, nous avons également mis sur le métier – la question a été traitée lors du Conseil « affaires générales » d'hier – la volonté qui est la nôtre de faire respecter les principes du juste échange au sein de l'Union européenne. Il n'y a aucune raison d'ouvrir les marchés de l'Union à des industries provenant de pays qui n'ouvrent pas leurs marchés à nos propres industries. Nous souhaitons que le juste échange, qui permettra un développement du commerce international protecteur d'un certain modèle industriel en Europe, devienne une réalité.

Par ailleurs, à l'instigation du ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, une lettre a été signée par sept ministres européens des affaires industrielles, invitant la Commission, laquelle a d'ailleurs fait une communication hier, à engager une nouvelle politique industrielle favorisant, dans nos filières d'excellence, les logiques d'innovation et de transfert de technologies, la formation des personnels, de manière que la compétitivité de l'industrie européenne passe aussi par la montée en gamme de ses produits.

Le deuxième sujet que nous avons souhaité traiter au mois de juin et qui sera demain à l'ordre du jour, c'est la remise en ordre de la finance. Vous savez qu'il a été décidé, au Conseil de juin, de créer un dispositif de supervision des banques. Ce dispositif doit permettre la supervision par la Banque centrale européenne de la totalité des banques de l'Union, afin d'éviter que les errements spéculatifs d'hier ne se reproduisent.

Ce travail doit encore être achevé. La Commission européenne a rendu public, le 12 septembre, les dispositions à caractère législatif qui permettront à cette supervision bancaire d'être mise en oeuvre effectivement dans les semaines qui viennent, avant, nous l'espérons, la fin de l'année. Il reste quelques calages à opérer pour que le calendrier soit respecté. Nous nous attacherons à ce que le Conseil européen soit l'occasion de confirmer tant le dispositif que le calendrier.

La supervision bancaire est la première étape de l'union bancaire : nous devrons poursuivre l'action engagée par un dispositif de résolution des crises bancaires et de garantie des dépôts qui dotera l'Union européenne d'une union bancaire efficace garantissant la capacité des banques à financer durablement l'économie réelle davantage que la spéculation.

S'agissant toujours de la régulation de la finance, je voudrais évoquer l'envoi à la Commission d'un courrier signé par onze États et visant à mettre en oeuvre, en coopération renforcée, la taxe sur les transactions financières. Nous souhaitons que cette taxe soit un instrument de régulation de la finance, mais permette aussi d'engager demain des actions en faveur du développement ou de fournir des ressources propres au budget de l'Union européenne pour qu'il puisse être durablement un budget de croissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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