Intervention de Laure de La Raudière

Séance en hémicycle du 17 octobre 2012 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 - projet de loi de finances pour 2013

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaure de La Raudière :

Madame la présidente, monsieur le ministre, le vendredi 28 septembre, lorsque nous avons eu connaissance de ce projet de loi de finances pour 2013, je me suis demandé naïvement si nous vivions dans le même pays que le Gouvernement.

Rien, absolument rien dans votre projet de loi de finances ne répond aux préoccupations des Français : la lutte contre le chômage, l'augmentation du pouvoir d'achat ou encore l'avenir des jeunes.

Passons sur le fait qu'aucune réforme majeure des dépenses publiques n'est proposée, passons sur le fait que vous avez supprimé en juillet la TVA antidélocalisation qui permettait de baisser les charges sociales dans les entreprises afin d'améliorer leur compétitivité, passons sur le fait que vous avez supprimé le dispositif d'exonération des charges sociales et de défiscalisation des heures supplémentaires, entraînant l'augmentation des coûts dans les entreprises, la baisse de la paye et la hausse des impôts pour les 9 millions de salariés qui effectuaient des heures supplémentaires.

Mais, alors que le Premier ministre avait annoncé un choc de compétitivité pour les entreprises, vous avez, monsieur le ministre, présenté un projet de loi de finances avec des dispositions totalement antiéconomiques, je veux parler de la taxation au barème de l'impôt sur le revenu des plus-values de cessions mobilières et aussi des « surtaxes » de « carried interest » des investisseurs de capital-risque.

Je ne comprends toujours pas comment, monsieur le ministre, compte tenu de votre expérience, vous qui étiez il y a peu président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, vous avez pu valider les dispositions se trouvant dans l'article 6 de cette loi. C'est un vrai mystère pour moi, une incompréhension complète ; ou alors, c'est une énorme boulette qui montre un inquiétant manque de préparation et de connaissance des sujets. J'espère que vous aurez à coeur de me l'expliquer !

Permettez-moi de prendre l'exemple des entreprises dans le domaine du numérique. Vous le savez, le numérique est un des rares secteurs en croissance. À lui seul, il est responsable du quart de la croissance nette d'emplois en 2010 en France.

Au côté de quelques grands groupes bien établis dans le monde, se développent de petites start-up qui seront les futurs Google et Facebook de demain si elles réussissent. Ces entreprises ont toutes une spécificité : ce sont des entreprises d'hypercroissance, avec une dépense forte en recherche, nécessitant un développement international rapide. Elles méritent toute notre attention puisqu'elles créent des emplois et qu'elles préparent les positions économiques de la France dans une filière en très forte croissance.

Au dire des experts, grâce à l'action des précédents gouvernements de droite, nous avons en France des dispositifs attractifs, favorables à l'innovation. Je salue le fait que vous les mainteniez : c'est une reconnaissance de l'action du précédent gouvernement. Je pense aux pôles de compétitivité, au triplement du crédit impôt recherche, aux jeunes entreprises innovantes. Il existe un vrai dynamisme, avec des jeunes hommes et femmes brillants, avec de vrais talents, des idées. Il existe encore des entrepreneurs en France qui ont décidé de se lancer à l'aventure, de prendre des risques, de suer sang et eau pour faire aboutir leur projet, trouver des financeurs, recruter des équipes, les former et les motiver, se battre avec l'administration pour obtenir une autorisation d'exploitation dans les délais ou effectuer les démarches administratives d'export avec la douane. Ils font aussi l'effort de comprendre les 1 600 pages du code du travail et ses subtilités, ils font en sorte d'être conformes à la législation du travail chaque fois que l'on passe le seuil de dix, de vingt ou de cinquante salariés ; ils supportent sans broncher que le passage de quarante-neuf à cinquante salariés entraîne le respect de vingt-quatre lois supplémentaires et coûte 1,5 emploi administratif en plus…

Oui, il existe encore des entrepreneurs en France, et tout cela, ils le font sans se décourager, en arrivant motivés, le matin, au bureau, car le chef, l'entrepreneur doit être motivé afin que les salariés croient à l'entreprise et acceptent de donner le meilleur travail possible.

Alors pourquoi, monsieur le ministre, avoir ainsi rédigé l'article 6 de votre projet de loi de finances ? La réaction des entrepreneurs a été immédiate, violente et spontanée. Ils vous ont dit qu'ils en avaient ras le bol de ne pas être compris, ras le bol de ne jamais être entendu, ras le bol de la surréglementation française, ras le bol d'entendre « patron voyou » dans la bouche d'un ministre qui jette ainsi l'opprobre sur l'ensemble des chefs d'entreprises, ras le bol d'être pris pour des pigeons, ras le bol tout simplement !

Vous vous êtes rendu compte de votre erreur tardivement, parce qu'erreur il y a. Mais au lieu d'abroger purement et simplement l'article 6 – nous n'avons pas encore les amendements, mais peut-être que ce qui a été annoncé se concrétisera à l'Assemblée nationale –, vous préférez persister, prévoir des exceptions, bref, créer une usine à gaz fiscale qui viendra profiter à ceux qui ont les moyens de s'entourer de conseils, mais découragera la majeure partie des entrepreneurs. Vous envisagez de modifier ces dispositions pour les créateurs d'entreprises…

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