Intervention de Frédéric Cuvillier

Séance en hémicycle du 19 juin 2014 à 15h00
Réforme ferroviaire — Après l'article 2

Frédéric Cuvillier, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Mesdames, messieurs les députés, arrêtons-nous quelques instants sur la question de la dette, car elle est au coeur des préoccupations, les vôtres comme celles des organisations syndicales, qu’elles signent ou non les accords de modernisation. Nous savons très bien que l’une des problématiques majeures s’agissant de l’avenir du système ferroviaire réside en effet dans la capacité de l’État de traiter une dette qui en fin de compte lui appartient. Les arguments se succèdent depuis plusieurs heures pour déterminer qui doit assumer la responsabilité de l’endettement lié aux créations d’infrastructures.

Par hypocrisie et manque de responsabilité, disons-le, on n’a pas traité le problème au moment où il était pourtant financièrement plus opportun de le faire en raison de la réalité économique de notre pays, d’autant plus que le stock de la dette n’était pas celui que nous subissons aujourd’hui. Rappeler aux Français qu’entre 1,5 milliard d’euros et trois milliards d’euros de dette viennent s’ajouter automatiquement au stock sans même que des infrastructures nouvelles soient lancées, ce n’est pas répondre aux enjeux de modernisation et de renouvellement dont nous savons combien ils sont grands en matière de transport ferroviaire qui exige sécurité et régularité. L’industrie ferroviaire a également besoin d’être soutenue. En outre, cela ne règle aucun problème, tant s’en faut ; nous les transmettons aux générations futures.

Il est vrai que la loi de 1997 devait marquer le commencement du dispositif permettant de régler la dette. Mais que s’est-il passé ? Rien. On n’a fait qu’héberger la dette au sein de RFF, dont c’était d’ailleurs la raison d’être. Lorsque nous souhaitons redonner du sens au système ferroviaire, c’est précisément parce que ces architectures juridico-économiques d’opportunité ne répondent pas à ce que nous souhaitons faire du système ferroviaire, tout comme elles n’avaient pas davantage, en leur temps, permis de régler la dette, comme on disait qu’elles le feraient.

Merci, monsieur Chassaigne, d’avoir rappelé un autre rendez-vous qui, lui non plus, n’a pas été honoré. Je m’en souviens fort bien parce que j’étais alors député et faisais partie, sous l’autorité de M. Chanteguet, du groupe socialiste de la commission du développement durable. La loi a été votée le 8 décembre 2009, – la veille de votre anniversaire, monsieur le président Chanteguet –, mais vous n’avez pas eu la chance de votre collègue Philippe Duron aujourd’hui, qui, lui, le jour de son anniversaire, a vu son amendement adopté. En effet, aucune suite n’a été donnée à l’engagement pourtant alors pris devant la représentation nationale par le Gouvernement de remettre un rapport au Parlement. Bien qu’occupant mes fonctions depuis plus de deux ans, je ne suis pas comptable du fait que, depuis 2009, contrairement à cet engagement, aucun rapport n’a été remis. Nous remettons aujourd’hui cette problématique au coeur de nos réflexions et ne sommes pas restés inactifs.

En 2009, il s’agissait encore d’une décision d’opportunité qui ne s’inscrivait pas dans le cadre d’une vaste réforme du ferroviaire. Aujourd’hui au travers d’amendements, notamment celui de M. Faure, auquel je donnerai un avis favorable, nous allons prendre date de nouveau, mais avec force et volontarisme, puisqu’il s’agit, cette fois, d’une réforme d’ensemble. Je vous redis ce que nous disons depuis hier soir, et que nous répéterons encore. Quelle est la méthode de cette loi ferroviaire ? En priorité, stabiliser la dette et donc prendre soin du système ferroviaire, plutôt que d’effacer sa dette d’un coup d’éponge magique. Nous savons combien les dettes, lorsqu’elles n’ont pas été réglées de manière pertinente, finissent pas réapparaître, et de quelle manière ! Evaporée en 1997 dans la structure RFF, elle nous revient aujourd’hui, à hauteur de 40 milliards et, dans dix ans, si nous ne faisons rien, elle sera à plus de 80 milliards.

Notre méthode est d’accompagner la réforme de structure du système ferroviaire, de stabiliser la dette et, dans le même temps – des éléments nouveaux viennent d’ailleurs renforcer mon propos – d’expertiser les diverses pistes possibles pour régler le « stock » de dette. C’est dans cette perspective que je donnerai un avis favorable à l’amendement d’Olivier Faure. Il est important de laisser ouvertes toutes les pistes, le rapporteur l’a dit, pour ce qui concerne les ressources notamment. Une mission d’information doit se pencher sur les modalités de financement : on peut songer aux faramineux bénéfices des sociétés d’autoroutes. Je sais que votre assemblée examine les conditions dans lesquelles ces sociétés, qui utilisent, ne l’oublions pas, le domaine public et en tirent bénéfice, pourraient être mises à contribution, d’autant qu’elles nous privent, dans des conditions incroyables, des moyens de financer les infrastructures.

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