Intervention de Guillaume Larrivé

Séance en hémicycle du 7 juillet 2014 à 21h30
Agriculture alimentation et forêt — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Larrivé :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’avenir de notre agriculture passe-t-il d’abord par de nouvelles règles et de nouvelles procédures franco-françaises, c’est-à-dire une nouvelle loi et une nouvelle batterie de décrets d’application et de circulaires administratives ? Faut-il vraiment ajouter quelques dizaines, si ce n’est quelques centaines, de pages supplémentaires aux milliers de pages des normes législatives et réglementaires sous le poids desquels ploient déjà nos agriculteurs ?

Je ne suis pas convaincu que cela soit la meilleure méthode pour atteindre l’objectif qui doit être le nôtre. Notre objectif, ce doit être de reconnaître et d’encourager les efforts qui sont faits par les agriculteurs français pour produire de manière compétitive, en répondant à l’exigence de qualité exprimée par les consommateurs et en respectant notre patrimoine naturel.

Car chaque jour, dans chacune de nos régions, la « ferme France » se bat pour faire face à une ouverture croissante des marchés mondiaux et à une compétition européenne toujours plus intense, dont nos voisins, l’Allemagne et les Pays-Bas bien sûr, mais aussi la Belgique et l’Irlande, entendent bien tirer profit. Nos agriculteurs sont confrontés à l’instabilité des prix, à la fin des quotas prévue pour 2015, à des réglementations européennes toujours plus strictes, à des normes environnementales toujours plus exigeantes, et à une diminution de leurs revenus – de plus de 20 % l’an passé. Aussi, ce que les agriculteurs attendent d’abord des pouvoirs publics, du Gouvernement comme du Parlement, c’est une attitude pragmatique et offensive, pour leur permettre de se battre à armes égales, au sein d’une économie agricole extrêmement compétitive.

Nous devons, pour cela, agir vite, en utilisant trois leviers, international tout d’abord, européen ensuite, national enfin.

Le premier levier, c’est bien sûr celui des négociations internationales. Je vous appelle, monsieur le ministre, à préciser aujourd’hui, devant l’Assemblée nationale, l’état des négociations engagées par la Commission européenne avec les États-Unis d’Amérique pour préparer l’éventuel volet agricole du traité de libre-échange transatlantique. Nous devons pouvoir débattre, ici, concrètement et précisément, du mandat donné à la nouvelle Commission Juncker, car ce traité peut aboutir au meilleur comme au pire. Il peut être une menace s’il diminue les normes sanitaires. Il peut être une chance s’il nous renforce face à la Chine, au Brésil, à la Russie, en faisant prévaloir un principe de réciprocité des échanges. Le Gouvernement a, sur ce sujet, un devoir de transparence devant le Parlement, donc devant l’ensemble des Français.

C’est également un levier international, monsieur le ministre, que vous devez utiliser pour défendre efficacement notre viticulture. Je vous appelle tout particulièrement à faire respecter les viticulteurs français dans les instances opaques où se décide aujourd’hui l’attribution des noms de domaine sur internet. Si vous ne faites rien, n’importe qui, n’importe où, pourra exploiter demain l’adresse Chablis.wine ou Irancy.vin ! C’est inacceptable. Monsieur le ministre, vous devez faire entendre la voix de la France agricole et viticole sur la scène internationale.

Le deuxième levier qu’il faut utiliser, c’est celui de la marge de manoeuvre qui nous est laissée pour appliquer les normes européennes. Prenons garde à ne pas sur-transposer et à ne pas sur-contraindre, car ce serait étrangler les agriculteurs français !

La nouvelle PAC, que vous avez acceptée à Bruxelles, doit désormais être mise en oeuvre dans l’intérêt des exploitations agricoles de notre pays.

Je reste très peu convaincu, pour ma part, par la majoration appliquée aux cinquante-deux premiers hectares premiers hectares. Les exploitations de zones intermédiaires comme la Bourgogne vont être perdantes, qu’il s’agisse de grande culture ou de polyculture élevage, puisque la rentabilité à l’hectare étant moindre que dans d’autres régions, les exploitations y ont des tailles supérieures à la moyenne française. Si vous confirmez cette dotation ciblée sur les premiers hectares, il me semble souhaitable qu’elle soit limitée à 5% de l’enveloppe du premier pilier.

Il est nécessaire, de même, que la « transparence » s’applique à tous les actifs, quelle que soit la forme sociétaire choisie par l’agriculteur.

Évitons par ailleurs d’appliquer, en France, une définition trop restrictive des surfaces à intérêt écologique – SIE. Au moment où 30 % du budget du premier pilier fait l’objet d’un verdissement, pourquoi ne pas retenir les jachères mellifères dans le nouveau dispositif ?

J’ajoute qu’il est très important que la directive « Nitrates » soit mise en oeuvre de manière raisonnable. Chacun reconnaît désormais que des efforts sont encore indispensables pour mieux préserver la qualité de l’eau, mais les mises aux normes nécessaires pour la gestion des effluents d’élevage ne doivent pas être une charge financière déraisonnable pour les éleveurs, notamment pour ceux qui sont en fin de carrière.

J’en viens au troisième levier. Quelques mesures de bon sens, au plan national, peuvent être prises pour améliorer concrètement la situation de nos exploitations agricoles. C’est le sens des amendements que nous soutiendrons lors de cette deuxième lecture.

Nous voulons une meilleure reconnaissance des actifs agricoles, permettant de flécher les aides vers les agriculteurs exerçant réellement cette profession.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion