Intervention de Denis Jacquat

Séance en hémicycle du 9 septembre 2014 à 15h00
Adaptation de la société au vieillissement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDenis Jacquat :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, avec des ressources réduites aux 645 millions d’euros de la CASA, les ambitions du présent texte sont nécessairement modestes. Vous avez d’ailleurs, madame la secrétaire d’État, été extrêmement claire à ce sujet lors de votre audition par la commission des affaires sociales, et je vous en remercie.

Ce projet de loi a cependant le mérite d’exister, même s’il est loin d’être à la hauteur des attentes, comme l’a indiqué fort justement le CESE. Celui-ci déclarait en effet le 26 mars dernier : « Le financement du projet de loi […] n’est pas à la hauteur des ambitions affichées et ne correspond pas aux besoins des personnes âgées. » En effet, son financement est exclusivement assuré par un prélèvement sur des pensions de retraite, à hauteur de 0,3 %.

Les dépenses consacrées chaque année à la perte d’autonomie s’élèvent à environ 30 milliards d’euros : 21 milliards d’euros de dépenses publiques et 7 à 10 milliards d’euros provenant des familles. Or nous savons depuis longtemps que le poids du reste à charge en établissement, et de plus en plus à domicile, devient insupportable pour les familles en raison des effets cumulés de la démographie et de la crise économique : les montants restant à la charge des familles une fois toutes les aides déduites dépassent de plus en plus leurs capacités financières.

Pour diminuer cette charge, le projet de loi prévoit d’augmenter le plafond pour chaque GIR. Si l’on peut juger cette initiative satisfaisante, on ne peut que s’inquiéter des modalités d’application de cette revalorisation ; elles suscitent d’ailleurs de vives réactions de la part des associations.

En effet, le relèvement le plus significatif concerne les personnes en GIR 1 et 2, à savoir les plus dépendantes. Or, cette proposition n’est pas adaptée à la réalité, car 80 % de ces personnes, qui ne représentent que 3 % des bénéficiaires de l’APA, vivent à domicile.

Par ailleurs, les personnes en GIR 5 et 6, non bénéficiaires de l’APA, ne doivent pas être les oubliées du texte. Un droit universel d’aide à l’autonomie, intégrant les dimensions de prévention et d’accompagnement, dont le financement serait fondé sur la solidarité nationale, serait plus juste. Il faut favoriser la convergence, sans confusion, en supprimant les barrières de l’âge, pour mettre en oeuvre un droit universel à la compensation de la perte d’autonomie, quelle que soit l’origine de cette dernière.

Il est regrettable qu’aucune disposition du projet de loi ne concerne les personnes handicapées vieillissantes et les chibanis.

Ce projet de loi vise – et je m’en réjouis –, d’une part, à faire évoluer le regard de la société sur le vieillissement et, d’autre part, à ce que toutes les politiques publiques intègrent la question du vieillissement.

Pour y arriver, des financements complémentaires importants sont nécessaires. Il faudrait que le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale sanctuarise les fonds provenant de la CASA, de sorte que ceux-ci soient affectés dès le 1er janvier 2015 au financement du présent projet de loi.

Les millions d’aidants familiaux, jusqu’ici peu soutenus par les pouvoirs publics, pourraient ainsi bénéficier très rapidement d’un droit au répit.

Enfin, le format de ce projet de loi est réduit par rapport à ce que nous attendions. Il y manque un pilier essentiel, celui de la réforme de l’accompagnement en établissement. Le rapport annexé indique : « Dans un deuxième temps, lorsque le redressement des finances publiques entrepris par le Gouvernement l’aura permis, la réforme de l’accompagnement en établissement devra rendre l’offre plus accessible. » J’espère que cette seconde étape de la réforme, qui aurait dû être débattue dès aujourd’hui, ne sera pas reportée à la Saint-Glinglin. N’oublions pas, en effet, que l’État ne met pas un euro sur la table pour en financer la première étape, notamment la diminution du reste à charge.

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