Intervention de Damien Abad

Séance en hémicycle du 1er octobre 2014 à 21h45
Transition énergétique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDamien Abad :

…alors que le Gouvernement a mis deux ans pour proposer un texte à notre Assemblée ?

Vous invoquez l’urgence, nous dénonçons la précipitation, symbole d’une fuite en avant.

Madame la ministre, à défaut d’écouter l’opposition, vous devriez écouter davantage votre propre majorité : celle-ci compte des gens sérieux qui non seulement ne sont pas hostiles au nucléaire, mais considèrent comme mortifère pour la France d’opposer l’atome aux énergies renouvelables. Vous devriez aussi entendre les voix qui s’élèvent pour rappeler que l’énergie ne peut être vue sous le seul angle de l’environnement.

Car l’énergie, c’est aussi une filière, un secteur d’activité, un enjeu de compétitivité et de croissance.

Alors plutôt que d’énumérer une litanie de concepts tous plus vaporeux les uns que les autres – tels que la sobriété énergétique ou la décroissance durable –, tentons ensemble d’élaborer un plan d’actions concrètes et de créer les conditions de l’indépendance énergétique française. Pour cela, il nous faut sortir des choix stratégiques biaisés, nous engager dans la transition énergétique sans arrière-pensée nucléarophobe et faire de la croissance verte une chance pour l’avenir.

Mais dans ce but, vous devez renoncer à la fermeture de la centrale de Fessenheim, vous engager dans la voie de la modernisation de notre parc nucléaire et abandonner tout objectif chiffré en matière de réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique.

Car, vous le savez comme moi, la France ne pourra pas se passer de la filière nucléaire sans subir des conséquences désastreuses en matière d’emplois, de balance commerciale, de prix de l’électricité et d’émission de gaz à effet de serre.

Alors oui, nous sommes tristes que vous vous engagiez dans cette course folle vers la réduction de notre capacité nucléaire, alors même que celle-ci représente notre dernier avantage comparatif par rapport à l’Allemagne.

Le coût de l’énergie reste un des derniers atouts de la France. Alors pourquoi vouloir briser ce qui marche ? Pourquoi vouloir mettre à mal une filière qui embauche 400 000 personnes et qui est le troisième secteur pourvoyeur d’emplois, après l’automobile et l’aéronautique ? Pourquoi casser un fleuron industriel sur l’autel de l’idéologie ? Ne mettez pas à mal le pouvoir d’achat des Français, déjà si malmené par votre gouvernement.

Il nous faut, ensemble, rassembler nos énergies et trouver les conditions d’un consensus national afin de réaffirmer la place centrale du nucléaire dans le mix énergétique, de résoudre le problème central du stockage de l’énergie, de renforcer la performance énergétique de nos logements – sans toutefois prévoir des réglementations qui iraient au-delà des exigences européennes et mettraient à mal la compétitivité des entreprises françaises du bâtiment.

Enfin, sans moyens financiers, ce projet de loi restera une coquille vide. Compte tenu du niveau d’endettement de notre pays, nous ne pouvons pas, en effet, nous permettre d’engager des dépenses nouvelles non financées.

Je conclurai en vous demandant de ne pas occulter la dimension européenne de la transition énergétique. L’Europe est en effet la grande oubliée de ce texte, malgré la volonté exprimée par le président Hollande de mettre en place une communauté européenne de l’énergie.

Nous avons besoin d’une Europe de l’énergie si nous ne voulons pas dépendre du reste du monde. L’Europe du XXe siècle s’est érigée sur l’indépendance alimentaire ; l’Europe du XXIe siècle se construira sur l’indépendance énergétique.

Voilà pourquoi nous ne devons pas abandonner des projets mondiaux, qui nous engagent, comme celui d’ITER à Cadarache : il y va de la crédibilité de la France en Europe et dans le monde. Et voilà pourquoi nous devons être, toutes et tous, à la hauteur des enjeux de ce monde.

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