Intervention de Isabelle Le Callennec

Séance en hémicycle du 3 novembre 2014 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Le Callennec :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame et messieurs les rapporteurs, le budget de la mission « Solidarité et insertion » s’élève à 15,5 milliards d’euros, un budget stable par rapport à 2014. Compte tenu du temps dédié à chaque groupe, je concentrerai mon propos sur le RSA, l’économie sociale et solidaire, le handicap et la dépendance.

Le budget 2015 met en oeuvre l’une des mesures phares du plan pauvreté, annoncé il y a bientôt deux ans : la revalorisation du RSA de 2 % au 1erjanvier 2015, financée par une fraction de la contribution exceptionnelle de solidarité, à hauteur de 200 millions d’euros. Je rappelle que le RSA est porté par les conseils généraux et que ce sont les caisses d’allocations familiales qui liquident les droits. Depuis plusieurs mois, les départements doivent faire face à l’augmentation du nombre de bénéficiaires, consécutive à la hausse du chômage et du nombre de demandeurs d’emploi en fin de droits.

L’État finance le RSA activité, le RSA jeunes et la prime de Noël par l’intermédiaire du Fonds national des solidarités actives, le FNSA. Jusqu’à présent, ce fonds était alimenté par une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine, à hauteur de 1,37 milliard d’euros, que venait compléter une subvention d’équilibre de l’État du programme 304.

À compter de 2015, l’ensemble des produits du prélèvement de solidarité seront affectés à la Sécurité sociale pour financer les allégements de charges votés cet été dans le PLFSS rectificatif. La dotation du FNSA augmente de l’équivalent de la fraction qui lui était précédemment versée – 1,7 milliard –, auquel il faut ajouter la contribution de 735 millions du programme 304, pour atteindre 2,3 milliards, comme en 2014. À l’UMP, nous continuons à nous interroger sur la provenance de cette somme de 1,7 milliard : comment est-elle financée, si ce n’est par le déficit et la dette ?

De même, nous nous interrogeons sur les raisons de la suppression de l’aide personnalisée de retour à l’emploi, l’APRE. Celle-ci permettait aux bénéficiaires du RSA de lever les freins à la reprise d’un emploi en favorisant l’acquisition ou la réparation d’un véhicule, l’achat d’une carte de transport, la garde d’enfants. Financée par le FNSA, l’APRE s’élevait à 35 millions dans le PLF pour 2014. Une réforme était attendue, certes, mais pas une suppression ! Pôle emploi devra assumer cette mission, mais sans aucuns moyens supplémentaires.

Enfin, ce budget oublie la fusion de la prime pour l’emploi et du RSA activité, pourtant annoncée cet été, mais que le Président de la République ajourne à 2016. Le Gouvernement a préféré supprimer la première tranche d’impôt sur le revenu, décision que nous désapprouvons à l’UMP car l’impôt sur le revenu – payé, déjà, par moins d’un Français sur deux – se concentre encore davantage sur un nombre plus restreint de contribuables, notamment les classes moyennes, pour lesquelles la coupe est pleine.

On avait cru que le Gouvernement voulait faire une priorité de l’économie sociale et solidaire, avec sa grande loi sur l’ESS promulguée le 31 juillet. Et pourtant, les crédits sont en baisse, pour la deuxième année consécutive : 4,7 millions d’euros contre 5 millions d’euros l’an dernier ! Sur le terrain, les acteurs de l’ESS manifestent leur déception et s’inquiètent avec raison de la baisse des dotations aux collectivités locales.

Les responsables d’associations, notamment, avancent des propositions, comme celle que je vous soumets. Le secteur de l’ESS n’émarge pas au CICE mais souhaite, en contrepartie, bénéficier d’un allégement de la taxe sur les salaires que paient les structures non assujetties aux impôts commerciaux. Cet allégement existe bien, mais il a été plafonné à 20 000 euros par structure. Au-delà de 15 à 20 salariés, les associations s’estiment désavantagées par rapport aux entreprises. Pensez-vous leur donner satisfaction, madame la secrétaire d’État ?

L’allocation pour adulte handicapé, l’AAH, constitue la part la plus importante du programme « Handicap et dépendance », avec 8,5 milliards d’euros. Après avoir été revalorisée de 25 % lors de la précédente législature, elle s’établit désormais à 800 euros par mois. La somme des contributions des conseils généraux et des deux sources de financement que sont la branche maladie de la Sécurité sociale et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie s’élève à 55 milliards d’euros

Si nous reconnaissons les efforts réalisés dans ce domaine, nous voulons néanmoins exprimer un regret : la grande loi sur la dépendance n’est toujours pas en vue. La loi d’adaptation de la société au vieillissement est en cours de discussion, mais ne fait apparaître que quelques mesures nouvelles, pour 645 millions d’euros. Elle ne répond pas à la question du reste à charge en établissement et n’est certainement pas à la hauteur des enjeux du financement de la dépendance, quand on sait que les besoins se chiffrent à plusieurs milliards d’euros pour les vingt prochaines années. Gouverner, c’est anticiper !

Malgré les avancées que nous saluons, comme l’aide alimentaire aux plus démunis, trop d’incertitudes sur les financements de vos politiques, trop de décalages entre les annonces et leur traduction dans les faits et une anticipation insuffisante des futurs besoins de solidarité nous conduisent à ne pas voter, en l’état, les crédits de cette mission.

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