Intervention de Ségolène Royal

Séance en hémicycle du 12 novembre 2014 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Écologie développement et mobilité durables

Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie :

Madame la présidente, mesdames et messieurs les rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis, mesdames et messieurs les députés, un événement très important est survenu aujourd’hui : les deux plus grands pollueurs de la planète – les États-Unis et la Chine –, qui se refusaient jusqu’ici à s’engager dans la maîtrise du réchauffement climatique, ont signé un accord. Cela éclaire nos débats d’un jour particulier puisque le budget du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est très directement lié à la transition énergétique et à la question du climat.

Le projet de loi de finances est l’occasion de confronter aux engagements du Gouvernement dans ce domaine, notamment au regard du projet de loi relatif à la transition énergétique que votre assemblée a bien voulu adopter en première lecture, les moyens qu’il y consacre. C’est donc à un exercice de vérité et de transparence que je me livre ce soir. À un exercice de mobilisation aussi car, au-delà des crédits budgétaires de l’État, l’ingénierie financière permet de rassembler les moyens qui nous feront réussir la transition énergétique pour la croissance verte.

Deux convictions m’ont guidée dans la préparation de ce budget. La première était qu’il devait participer à l’effort de redressement des comptes publics. Le projet de loi de finances pour 2015 traduit cette exigence, avec comme objectif de répartir équitablement l’effort demandé aux Français. J’assume parfaitement que mon ministère et les établissements publics placés sous ma tutelle prennent leur part de cet effort : il s’agit de faire mieux, en dépensant moins.

La deuxième conviction était qu’il nous fallait faire preuve d’ingéniosité pour concevoir des modalités de financement nouvelles pour nos politiques, la transition énergétique exigeant des moyens très importants.

Vous avez examiné et adopté le crédit d’impôt pour la transition énergétique, qui n’apparaît pas dans le projet de budget mais qui constitue une forme de dépense publique. J’ai voulu, par ce dispositif simplifié et renforcé, inciter les Français à engager sans attendre des travaux de rénovation. Pour ce faire, le taux de 30 % de prise en charge s’appliquera dès la première action de travaux, à compter du 1er septembre 2014 et jusqu’au 31 décembre 2015.

Cet effort financier est évalué à 900 millions d’euros. Sachant que les dépenses seront remboursées à hauteur de 30 %, ce sont 2,7 milliards d’euros qui seront consacrés aux filières du bâtiment et de la rénovation énergétique. La dépense publique fait levier et mobilise l’épargne privée. Grâce au crédit d’impôt, les Français investiront leur épargne dans les travaux d’isolation de leur logement et favoriseront ainsi la création d’emplois dans les secteurs du bâtiment et de la rénovation.

Je veux d’ailleurs saluer les améliorations que vous avez apportées pour adapter le crédit d’impôt aux spécificités des outre-mer, notamment à la nécessité d’isoler les bâtiments contre la chaleur.

Le deuxième élément de cette ingénierie financière est la ligne de prêts que la Caisse des dépôts et consignations destine aux travaux d’isolation menés par les collectivités territoriales sur les bâtiments publics. D’un montant de 5 milliards d’euros, cette ligne a commencé à être mobilisée. Les emprunts sont remboursables sur une durée de vingt à quarante ans, avec un taux d’intérêt de 1,75 % : le retour sur investissement – à savoir les économies sur les dépenses d’énergie – est assuré.

Je vois d’ailleurs un heureux présage dans le fait que le président de l’Association des maires de France, également maire de Lons-le-Saunier, Jacques Pélissard, ait été le premier à signer une convention avec la Caisse des dépôts et consignations. J’aurai l’occasion, lors de leur prochaine assemblée générale, de mobiliser les maires sur ce sujet.

Troisième élément de cette ingénierie financière, le financement du bras armé de mon ministère, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, dont la méthode et les résultats sont unanimement salués : il passera désormais uniquement par l’affectation de 450 millions d’euros de la taxe générale sur les activités polluantes. Ce montant est sanctuarisé sur la période 2015-2017 et permettra, compte tenu de l’existence du fonds de roulement de l’ADEME, de maintenir le niveau d’engagement en 2015.

À ces financements exceptionnels, il faut ajouter les moyens consacrés par la Banque européenne d’investissement, qui intervient dans les régions. J’ai moi-même expérimenté une telle aide, puisque la région Poitou-Charentes a reçu une avance de 400 millions d’euros pour financer son plan photovoltaïque. J’ai signé récemment un accord avec la Banque européenne d’investissement, qui interviendra en soutien des départements pour réaliser les travaux de rénovation sur les collèges.

Il convient aussi d’évoquer le programme d’investissement européen de 300 milliards d’euros, qui vient d’être annoncé par la Commission européenne. Le ministère se positionnera afin qu’une grande partie de ces investissements soit consacrée à la transition énergétique et à la croissance verte.

Je voudrais également parler de la mise en place d’un fonds exceptionnel de financement de la transition énergétique, logé à la Caisse des dépôts et consignations. Doté de 1,5 milliard d’euros, il sera complété par les moyens tirés de l’augmentation de l’enveloppe de certificats d’économies d’énergie prévue pour la nouvelle période qui s’ouvre et par la mobilisation des crédits ouverts dans le cadre du programme d’investissements d’avenir. Je précise que 800 millions d’euros du programme d’investissements d’avenir seront uniquement consacrés au volet de la transition énergétique.

Ces financements exceptionnels iront prioritairement au renforcement du fonds chaleur de l’ADEME, à l’aide à la conversion des véhicules diesel anciens pour permettre à leurs propriétaires de racheter une voiture propre, et aux appels à projets lancés en faveur des 200 « territoires à énergie positive pour la croissance verte », des « territoires zéro gaspillage zéro déchet », des 1 500 méthaniseurs et des contrats locaux de transition énergétique.

Enfin, dans le prolongement de la conférence bancaire et financière, nous étudions l’opportunité de mettre en place des garanties, notamment en faveur des projets d’énergies renouvelables portés par les PME.

Vous le voyez, le Gouvernement s’est donné les moyens de financer la transition énergétique. Notre conviction est que c’est l’accélération de la transition énergétique qui permettra de créer le plus rapidement possible des activités et des emplois.

Ces moyens ne sont pas inscrits au seul budget du ministère. Si j’ai souhaité les évoquer, c’est pour éviter la posture habituelle, qui consiste à paraître malheureux et à se lamenter sur la baisse des crédits de son ministère.

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