Intervention de Gilbert Collard

Séance en hémicycle du 27 novembre 2012 à 15h00
Ancrage démocratique du gouvernement économique européen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Collard :

Madame la présidente, mesdames, messieurs, je me permettrai, dans cette période de « décomplexion » complexe, de citer Freud qui disait que « si l'on cède sur les mots, on cède sur les choses ». Et je serais tenté de vous dire que ce n'est pas en raccommodant les mots que l'on raccommode la réalité !

L'intitulé même de la proposition de résolution européenne me laisse franchement pantois. Il y est question d'un gouvernement économique européen. Qui dit « gouvernement économique » dit « existence d'un État fédéral ou confédéral ». Je me permets de vous rappeler que le peuple français, le 29 mai 2005, a rejeté cette idée. L'étonnant glissement sémantique sur lequel vous patinez est significatif de quelque chose. Le traité du 2 mars 2012 n'évoque, lui, qu'une gouvernance de la zone euro et vous, prestidigitateurs de mots, passez à un gouvernement économique européen.

Pour domestiquer une réalité contraire maintenant fortement enracinée et quasiment indéracinable, vous parlez d'ancrage démocratique. Quel ancrage ? Quelle démocratie ? Arrêtez de jouer avec les mots comme avec des masques de carnaval, qui ne cachent pas la réalité du visage !

La réalité a été évoquée ici : on a dénoncé le déficit démocratique. On sait que les neuf premiers articles du traité ne confèrent un pouvoir décisionnel qu'à la seule Commission européenne et que c'est seulement à l'article 12 que sont autorisées des réunions informelles des chefs d'État et de gouvernement comme s'ils n'avaient même pas de forme tellement ils sont informels ! Mais s'invitent à la table de ces ministres intègres les réels décideurs, ceux qui décident pour nous. Ainsi à l'article 12, tapent à la porte et entrent le président de la Banque centrale européenne et le président de la Commission européenne ! En clair, qu'on le veuille ou non, ce sont les technocrates européens qui distribuent les cartes et ce sont les chefs d'État qui sont invités à fournir les jetons.

En vérité, le Parlement européen subit la pire humiliation ! Dans ce même article 12, au paragraphe 5, je le lis mot à mot, comme dans une marche funèbre : « Le président du Parlement européen peut être invité à être entendu. » Le pauvre homme devra attendre un bristol pour se voir offrir un strapontin !

La proposition de résolution de notre collègue Christophe Caresche essaie, excusez-moi de le dire, d'opérer un rétropédalage sémantique sur un pédalo humiliant ! Nous voici ravalés au rang de la supplique. Pourquoi ? Parce que, depuis le 9 octobre 2012, nous n'avons plus la main. L'article 13, qui porte peut-être malheur, dit tout : il évoque les parlements nationaux avec un petit « p » et le Parlement européen avec un grand « P ».

Cette proposition de résolution, qui tente de raccommoder la réalité par un raccommodage de mots, ne veut rien dire. En fait, si, elle dit quelque chose. Elle dit que vous avez constaté que vous vous êtes fait faire les poches et que vous courez après le voleur, lequel n'est, finalement, députés qui avez voté le traité, que vous-mêmes !

Vous avez été des souverains sourds à tous les arguments. Vous avez abdiqué notre souveraineté, et maintenant vous tentez par tous les moyens de la récupérer. C'est trop tard !

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