Intervention de Laurent Degallaix

Séance en hémicycle du 6 juillet 2015 à 16h00
Règlement du budget et approbation des comptes 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Degallaix :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, ce projet de loi de règlement est assurément le constat de l’échec de la politique menée par la majorité depuis son arrivée au pouvoir. Il met aussi en lumière un certain nombre d’inexactitudes exprimées par le Gouvernement sur les comptes publics.

D’abord, monsieur le secrétaire d’État, vous vous félicitez de maîtriser la dépense publique. Pourtant, alors même que vous aviez promis un effort de 15 milliards d’euros pour l’année 2014, la dépense publique a bel et bien continué d’augmenter. En effet, vous avez substitué à la dépense budgétaire des crédits d’impôts, qui ne sont pas comptabilisés comme tels mais qui représentent, dans les faits, une dépense de l’État et doivent donc bien évidemment être financés. C’est ainsi qu’en 2014, la dépense publique totale a continué d’augmenter deux fois plus vite que le produit intérieur brut, comme en 2013.

Les chiffres sont têtus et très éloquents. En 2013, la dépense publique a progressé de 1,6 point de PIB, alors que la croissance du PIB en valeur n’était que de 0,8 %. En 2014, le même phénomène s’est produit : la dépense publique a crû en volume de 1,8 point de PIB, alors que le PIB n’a progressé que de 1,1 %. Loin de diminuer, comme vous le prétendez, la dépense publique a donc légèrement augmenté en volume. En valeur, vous n’avez fait que freiner la hausse de la dépense publique, effort qui ne peut certes être nié, mais qui reste totalement insuffisant au regard de la situation de nos finances publiques.

La Cour des comptes a pourtant indiqué que la France se plaçait au plus haut niveau de dépenses de l’OCDE, sans que, selon son président, Didier Migaud, la qualité des services publics ne soit forcément à la hauteur.

La raison est simple : depuis le début du quinquennat, vous avez refusé obstinément de mettre en place les réformes structurelles nécessaires à la lutte contre le déficit et favorables à la reprise économique.

La réforme de l’État et des collectivités territoriales, la réforme de la protection sociale et de la santé, la réforme du paritarisme, la transition écologique, la valorisation de la ressource humaine de notre nation sont autant de chantiers qu’il est urgent de lancer et que vous avez refusé de prendre à bras-le-corps. Seules ces réformes seraient à même d’endiguer la hausse de la dépense publique et de conduire à de véritables économies, supportables par tous et fructueuses sur le long terme.

Pour ne prendre qu’un exemple, je tiens à rappeler que la révision générale des politiques publiques mise en place par la précédente majorité avait permis, sur la période 2009-2012, de dégager près de 12 milliards d’euros de réduction de dépenses. Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux avait conduit à une baisse de 3 % des effectifs des services de l’État, soit 30 000 postes par an.

À son arrivée au pouvoir, le Gouvernement a supprimé la RGPP, qu’il avait tant critiquée, et promis à sa majorité une stabilisation des effectifs de la fonction publique. Or – nous vous l’avons dit et répété –, il est impossible de réaliser des économies sans baisser les effectifs, étant donné que les dépenses de personnel de l’État représentent près de 42 % de ses dépenses nettes. C’est pourquoi nous avions déploré que le Gouvernement refuse de poursuivre cet effort de modernisation de l’État.

Toutefois, force est aujourd’hui de constater que la volonté affichée de stabiliser les effectifs ne s’est pas traduite dans les faits. Ainsi, par rapport aux plafonds fixés en loi de finances, les effectifs de la fonction publique ont baissé de plus de 46 000 postes en 2013 et de près de 49 000 postes en 2014.

Nous saluons la prise de conscience du Gouvernement, tout en déplorant le décalage immense entre son discours et ses actes. Si la baisse des effectifs est en effet nécessaire, la transparence du Gouvernement sur la politique l’est tout autant.

Il en est de même en ce qui concerne les prélèvements obligatoires. Le Gouvernement a communiqué à outrance sur leur baisse, afin de tenter de calmer le ras-le-bol fiscal de nos concitoyens, assommés d’impôts depuis le début du quinquennat.

Toutefois, les chiffres, encore une fois, sont têtus et ne trompent pas. Ainsi, le taux de prélèvement obligatoire est passé de 44,7 % en 2013 à 44,9 % en 2014, soit une augmentation de 4 milliards d’euros de la pression fiscale.

Tout comme pour la dépense publique, le Gouvernement ne procède pas à une baisse des prélèvements obligatoires, mais simplement à un freinage de leur hausse.

Quant au déficit, il demeure à un niveau particulièrement élevé, bien au-delà de celui de nos voisins européens. Rappelons que dans son engagement numéro 9, le candidat Hollande promettait de le ramener à 3 % en 2013. Or loin de se rapprocher de cet objectif, le déficit n’a diminué que de manière très marginale, passant de 4,1 % en 2013 à 4 % en 2014.

En outre, cette légère baisse du déficit global est due, pour la majeure partie, aux collectivités locales que vous avez mises à la diète et dont les investissements ont chuté de manière dramatique, conséquence certes du cycle électoral, mais aussi et surtout de la baisse des dotations de l’État. Cette baisse des investissements pèse sur la croissance et le redémarrage économique. Nos entreprises, que je rencontre régulièrement, comme vous, sont étouffées par cette baisse de la demande globale.

Pendant que les collectivités se serrent la ceinture, que les ménages continuent d’être matraqués, le déficit de l’État, lui, a augmenté en 2014, passant de 3,6 % à 3,8 %.

Nous ne pouvons que nous élever contre cette méthode qui consiste pour l’État à se contenter de demander des efforts considérables aux autres, tout en s’affranchissant dans le même temps de réduire son propre déficit.

C’est également la crédibilité de la France qui est mise à mal auprès de nos partenaires européens, et cela alors même que la plupart de nos voisins ont fait des efforts considérables afin de respecter les objectifs communs.

Enfin, alors que le Gouvernement tablait initialement sur une croissance de 1 %, celle-ci n’a été que de 0,2 % en 2014. Or selon l’INSEE, et vous le savez pertinemment, l’inversion de la courbe du chômage nécessiterait une croissance comprise entre 1 % et 2 %.

En conséquence, et malgré toutes les promesses présidentielles, le chômage a continué de progresser en 2014, et ne devrait commencer à baisser, au mieux, qu’à partir de 2017.

Mes chers collègues, après l’échec qu’a constitué l’année 2013, le groupe UDI espérait que le pacte de responsabilité et de solidarité constitue une opportunité de redressement pour notre pays afin que l’année 2014 soit celle du retour de la croissance, de l’emploi et, surtout, de la confiance. Il n’en a rien été et vous êtes aujourd’hui face à un constat d’échec.

Nous déplorons que le Gouvernement, plutôt que de reconnaître le dérapage des comptes de l’État en 2014 et de tenir un discours de vérité aux Françaises et aux Français, tente de dissimuler cette réalité derrière des artifices comptables.

Tout comme le groupe UDI, la Cour des comptes appelle de ses voeux des économies « structurelles significatives et pérennes ».

Votre refus de les engager et de mener une action courageuse au service de la France empêchera toute relance durable de la croissance, et ce malgré la conjoncture internationale particulièrement favorable. C’est la raison pour laquelle le groupe UDI votera contre ce projet de loi de règlement des comptes de l’année 2014.

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