Intervention de Gilda Hobert

Séance en hémicycle du 16 juillet 2015 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilda Hobert :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission des finances, chers collègues, notre assemblée s’apprête à adopter en nouvelle lecture, et sans modification, le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014, déposé le 27 mai par le Gouvernement.

Bien que convenu, l’exercice de la discussion générale permet de retracer les rebondissements budgétaires de l’année 2014, dus en partie au contexte macroéconomique, mais aussi à la réorientation de notre politique générale, avec l’annonce par le Président de la République du pacte de responsabilité et de solidarité au mois de janvier, et le commencement de son inscription dans la loi de finances rectificative du mois de juillet.

Ces mesures ont eu un impact significatif sur les prévisions initialement inscrites en loi de finances, d’autant plus que le contexte économique – et plus particulièrement le niveau historiquement bas de l’inflation, constaté à 0,5 % seulement en 2014 – a drastiquement limité, avec un faible niveau de croissance, la progression des recettes. Toutefois, cette baisse des recettes ne traduit pas pour autant par une baisse du niveau des prélèvements obligatoires, qui subsistent en 2014 à 44,9 % du produit intérieur brut, après 44,7 % en 2013, malgré l’effort consenti envers les ménages de la première tranche de l’impôt sur le revenu – effort que nous saluons.

Cette discussion générale permet tout de même de soulever plusieurs débats. Premier sujet : le déficit. Le Gouvernement défend un niveau de déficit nominal au plus bas depuis la crise financière mondiale de 2008, à 4 % du PIB. Engagé à poursuivre la baisse cette année et l’année prochaine, en dépit des dépenses nouvelles qu’il assume, pour l’ensemble de l’Union européenne, en matière de lutte contre le terrorisme, et au plan intérieur, à la faveur d’outils concrets de lutte contre le chômage des jeunes avec les contrats aidés, le Gouvernement explique cette amélioration du déficit par sa gestion budgétaire sérieuse, adossée à une maîtrise historique de la hausse de la dépense en valeur, qui s’établit à seulement 0,9 % hors crédits d’impôts.

En 2014, les dépenses du budget général sont objectivement en baisse nette d’un peu plus d’1 milliard d’euros par rapport à 2013 – alors que 100 millions d’euros de baisse supplémentaire étaient votés en loi de finances initiale. Les dépenses liées à la charge de la dette sont elles aussi en baisse nette de 1,7 milliard d’euros par rapport à 2013, ce qui est in fine colossal. Mais celles-ci demeurent malgré tout deux fois plus importantes que celles planifiées initialement par le Gouvernement ! Cela pose, dans le contexte actuel, marqué par de très faibles taux d’intérêt, la question de la soutenabilité de la dette, car rien ne garantit à moyen terme le niveau favorable de ce refinancement.

Enfin, il faut évoquer les « mouvements réglementaires », qui s’élèvent en 2014 à près de 2 milliards d’euros entre les annulations et les reports de crédits vers l’exercice ultérieur. Ces mouvements réglementaires de crédits sont considérés par la Cour des comptes comme des « artifices comptables » plutôt que comme de véritables économies structurelles. Nous ne pouvons nier que le solde s’est dégradé de plus de 10 milliards d’euros entre 2013 et 2014 : le déficit s’établit à 85,6 milliards d’euros. Toutefois, nous saluons résolument le changement de paradigme – certes tardif dans le quinquennat – opéré par le Gouvernement à partir du programme de stabilité 2015-2018, et qui consiste à prendre désormais des taux planchers et non plus des taux plafonds pour les principales estimations macroéconomiques. Ce changement tend à nous prémunir durablement de ces divergences d’interprétation.

Car tout le monde s’accorde à reconnaître – et le groupe RRDP de concert – que les dépenses ont été bien maîtrisées et même stabilisées en 2014 : leur montant est inférieur de 6,34 milliards d’euros aux dotations initiales de la loi de finances. Tout le monde s’accorde également à reconnaître que les normes de la dépense, en volume comme en valeur, ont été respectées.

Le deuxième sujet est celui des recettes. Les recettes nettes en 2014 sont inférieures de 9 milliards d’euros à celles de 2013. Ces 9 milliards d’euros manquants représentent plus de 4 % des recettes, ce qui est considérable ! L’écart entre l’estimation de Bercy à l’automne 2013 et l’exécution observée dans ce projet de loi est également considérable : l’exécution est inférieure de 10 milliards d’euros à l’exécution. Au total, les recettes nettes constatées s’élèvent en 2014 à 217 milliards d’euros.

Le niveau constaté de la croissance – plus 0,2 % en 2014 –est assez décevant. Bien que positif, il est en deçà du niveau de croissance de l’ensemble de la zone euro qui s’élève à plus 0,9 %, et à rebours du mouvement global de résilience des économies avancées qui, dans leur ensemble, ont vu leur PIB augmenter l’année dernière de 1,8 %.

Si nous ne pouvons que nous féliciter que la zone euro soit sortie de récession, notamment poussée par l’expansion de l’activité en Espagne, aux Pays-Bas, en Allemagne et au Portugal, nous regrettons toutefois la situation de la France et le maintien de la récession en Italie l’année dernière. Cette croissance atone a été poussée, comme il est d’usage en France, par la consommation des ménages, malgré le ralentissement des prix, et notamment la consommation des ménages concernés par la réduction d’impôt sur le revenu votée dans le cadre de la loi de finances rectificative de juillet 2014, réduction que notre groupe appelait de ses voeux. Nous nous félicitons ainsi que le pouvoir d’achat des ménages se soit nettement repris en 2014, malgré la hausse nette de 2,2 milliards d’euros de recettes issues de l’impôt sur le revenu – ces recettes passent ainsi de 67 à 69,2 milliards d’euros entre 2013 et 2014.

Néanmoins, l’impact négatif du commerce extérieur, le repli massif de l’investissement, la contraction du secteur de la construction et, surtout, la confiance qui tarde à revenir dans les entreprises françaises, dont les marges ont pourtant été objectivement confortées par la montée en puissance du CICE, ont eu globalement raison de la croissance l’année dernière.

Venons-en au sujet du CICE. Par la faiblesse de son utilisation, celui-ci a finalement pesé positivement sur nos finances publiques, à plus 3,3 milliards d’euros ! Ces dépenses d’impôt sur les sociétés ont malgré tout représenté 6,5 milliards d’euros en 2014. À ce titre, compte tenu de l’importance des montants engagés et du peu d’effet avéré, à ce stade, sur le chômage de masse que subissent nos concitoyens, le groupe RRDP déplore que le Gouvernement tarde à remettre au Parlement le rapport « sur la création d’un observatoire des contreparties » au CICE, prévu à l’article 29 de la loi de finances rectificatives de juillet 2014, issu d’un amendement du groupe radical.

Si les incertitudes demeurent sur la montée en charge du CICE, outre la donnée tangible qu’il passe en 2015 à 6 % en métropole et 7,5 % en outre-mer, concernant l’évolution des autres dépenses fiscales, aucune incertitude ne plane : leur montant a dépassé en 2014 toutes les espérances du Gouvernement ! Programmées initialement pour un montant de 70 milliards d’euros, elles ont dépassé les 72 milliards d’euros, ce qui est véritablement colossal. Rappelons que sous l’impulsion de notre nouvelle majorité, le montant total de certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu a fait l’objet d’un plafonnement global. À compter de l’imposition des revenus de 2013, le Gouvernement a introduit un plafonnement global général fixé à 10 000 euros, compte non tenu des réductions d’impôt pour investissements outre-mer et souscriptions au capital de SOFICA.

Nous saluons résolument cet effort de justice fiscale par le plafonnement global des avantages à l’impôt sur le revenu, mais nous rappelons que le plafonnement n’est ni une simplification ni une réforme de fond et que, comme l’observe malheureusement la Cour des comptes, notre maîtrise des dépenses fiscales reste « déficiente », car l’estimation de leur coût demeure partielle.

En conclusion, après ces quelques remarques, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera bien ce projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014, qui s’inscrit dans notre programme de stabilité.

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