Intervention de Philippe Goujon

Séance en hémicycle du 8 octobre 2015 à 15h00
Isolement électronique des détenus et renseignement pénitentiaire — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Goujon, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Personne ne peut contester ici l’intérêt, voire la nécessité d’aller plus loin dans la lutte antiterroriste, et tout particulièrement contre le radicalisme en prison. Je ne reviendrai pas sur la plupart des arguments de M. Pietrasanta, que j’ai déjà contrés dans mon intervention en discussion générale et que plusieurs orateurs ont également déconstruits. Je regrette simplement qu’en recourant à une motion de procédure, la majorité de gauche interdise le débat sur un sujet de cette importance.

Contrairement à ce que vous avez prétendu, monsieur Pietrasanta, ce texte ne vise pas à occuper le terrain et ce n’est pas non plus un texte d’émotion. Nous reprenons en effet des amendements, que je défends, pour certains d’entre eux, depuis des années, car, de l’aveu de tous, le débat est loin d’être tranché. J’ai même repris des amendements dont vous avez été vous-même l’auteur. Un sujet aussi essentiel que l’intégration du renseignement pénitentiaire dans la communauté du renseignement, souhaitée par plusieurs parlementaires, dont le prestigieux président de la commission des lois, ne me paraît pas pouvoir se passer de débat.

Nous proposons un véhicule législatif approprié. Le règlement ne suffit pas, non plus que la circulaire qui prévoit dans son texte même l’interdiction des portables, tout en suggérant que des évolutions sont envisageables. Cela est très dangereux, d’autant que la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a fait des déclarations appelant à l’autorisation des portables en prison et qu’il existe un projet, certes avorté, mais qui est encore dans un tiroir de la chancellerie, pour permettre l’utilisation des portables dans les quartiers de semi-liberté.

Le texte n’a évidemment pas l’ambition de régler tous les problèmes de la radicalisation en prison, mais il est faux d’affirmer que la loi relative au renseignement l’a rendu caduc, puisque personne, à l’exception peut-être de la garde des sceaux, n’est satisfait du compromis de la commission mixte paritaire, qui ne permet pas, contrairement d’ailleurs aux intentions du projet de loi initial, de surveiller les communications clandestines des détenus, dont 20 % sont employées à poursuivre des activités délinquantes et nuisibles.

Jean-Jacques Urvoas lui-même a reconnu en commission, tout en appelant à la poursuite du débat en séance, que cette proposition de loi posait des problèmes intéressants. Il mène lui-même des études de législation comparée, en vue de futures propositions législatives, ce en quoi il a parfaitement raison. Nous étudierons ces perspectives avec lui. Certains amendements proposés sur ce texte permettent précisément de l’actualiser pour tenir compte de la loi renseignement, comme nous l’avions vu en commission.

Le président de la commission des lois a parlé de texte d’appel, nous invitant, par conséquent, à en débattre. Afin de faire oeuvre utile pour nos concitoyens, intégrons donc des propositions issues de vos réflexions, chers collègues, car dans ce domaine tout retard peut coûter des vies. Vous dissiperez aussi toute suspicion sur une éventuelle autorisation des portables en prison, laquelle ne sera pas levée tant qu’il n’y aura pas de dispositions législatives. Un jour viendra, sans doute assez proche, où la plupart de ces dispositions seront reprises dans un texte proposé par votre propre majorité ou par le Gouvernement.

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