Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du 24 janvier 2013 à 9h30
Questions orales sans débat — Circulation en zone urbaine de trains de matières dangereuses

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, ma question porte sur les trains de matières dangereuses qui transitent régulièrement par la gare de triage de Drancy-Le Bourget.

Depuis plusieurs mois, monsieur le ministre, je n'ai eu de cesse que les différents ministres en charge de ces questions sur ce dossier sensible soient alertés.

En effet, des milliers de wagons chimiques très dangereux transitent chaque année par la gare de triage de Drancy-Le Bourget comme par de nombreuses autres gares de triage situées en zone urbaine dense. Des accidents, des déraillements, des fuites ont régulièrement lieu. Le dernier exemple en date remonte à trois jours : le wagon d'un train parti de la centrale nucléaire du Tricastin, dans la Drôme, pour la Hollande, transportant des fûts de matières radioactives coulées dans du béton, est sorti de ses rails lundi dernier en gare de triage à Saint-Rambert-d'Albon dans la Drôme. Parce qu'il s'agissait d'un wagon de matières nucléaires, ce matériel était sans doute mieux protégé que d'autres, mais vous imaginez les risques encourus par les populations dans une zone urbaine dense.

Une étude réalisée par la DRIEE ou Direction régionale et interdépartementale de l'environnement et de l'énergie d'Île-de-France en mai 2011 concernant les enjeux environnementaux du territoire du Bourget, dont une copie a été transmise en septembre dernier à Mme la ministre de l'écologie ainsi qu'à vous-même, montre que la gare de triage de Drancy-Le Bourget reçoit chaque année plus de 20 000 wagons de matières dangereuses qui correspondent à 8 % de son activité globale. Parmi ces matières dangereuses, on relève plusieurs milliers de wagons de chlore gazeux, d'ammoniac, d'acrylonitrile et d'hydrocarbures.

Dans cette étude, il est précisé que le périmètre retenu pour les « effets létaux majorants » d'une fuite de wagon de chlore est de 2,6 km : « effets létaux majorants » signifie la mort de milliers de personnes. Ce périmètre inclut des communes limitrophes de Drancy avec leurs hôpitaux – notamment l'hôpital Avicenne –, leurs établissements scolaires et l'aéroport du Bourget sans oublier les milliers d'usagers de la ligne B du RER. Rien que pour la gare du Bourget, 210 000 habitants seraient concernés si un drame survenait alors même que 80 % des trains transportant des matières dangereuses qui la traversent ne sont pas destinés à l'Île-de-France.

Les wagons les plus dangereux, n'importe qui pourrait le concevoir, devraient passer non pas au milieu des fortes concentrations humaines mais bien plus loin, en dehors des zones urbaines, et devraient y être triés.

Monsieur le ministre, les logiques économiques de Fret SNCF ne doivent pas conduire à exposer des milliers de personnes à des risques vitaux absurdes. Cette logique économique a récemment fait passer par Drancy des trains en provenance des Pays-Bas et destinés à la Hague, en Normandie.

L'accumulation de wagons de matières dangereuses – toxiques, radioactives, explosives, inflammables – côte à côte sur une vaste zone de triage et à proximité de centaines de milliers d'habitants peut à l'évidence aboutir en cas d'accident à une catastrophe d'une gravité sans précédent. Évidemment, cette menace réelle pour les populations conduit légitimement les élus locaux à se mobiliser pour défendre la sécurité des populations déjà installées dans les alentours de la gare.

Pourtant un contrat de développement territorial a été signé avec l'État, qui vise toutes les communes situées autour de l'aéroport du Bourget et qui prévoit la réalisation de plusieurs milliers de logements et d'un important pôle gare autour de l'actuelle gare RER du Bourget.

Aussi, face à cette situation sérieuse et préoccupante, je vous demande, monsieur le ministre, de prendre ce problème à bras le corps et de faire respecter le principe de précaution afin d'éviter qu'une catastrophe, hélas prévisible, ne se produise.

La logique de rentabilité, la logique financière de la SNCF ne peuvent pas prévaloir sur la sécurité des populations. Je souhaite en tout cas que votre gouvernement veille à ce que la vie des gens vaille plus que l'argent.

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