Projet de loi de finances pour 2021 — Texte n° 3360

Amendement N° 1640C (Irrecevable)

Publié le 27 octobre 2020 par : Mme Lorho.

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Cet amendement a été déclaré irrecevable après diffusion en application de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale.

Exposé sommaire :

Amendement symbolique qui vise à avoir des réponses de la part du Gouvernement quant à l'avenir du domaine forestier public et de son opérateur national, l'ONF.Symboliquement, il est prélevé 1€ de l'action 01 du programme 215 pour abonder l'action 26 du programme 149.

L'augmentation, bien que légère, de l'action 26 du programme 149 est évidemment la bienvenue tant la forêt et le bois constituent une filière économique stratégique pour le France, de même que sont les bienvenus les crédits alloués à ce secteur à travers le plan de relance. Cependant, de manière générale, bien que le Gouvernement s'en défende, la puissance publique manque ici d'une vision claire et ambitieuse du fait d'initiatives qui semblent contradictoires.

Depuis les ordonnances de Philippe Auguste, instaurant les fondations de ce qui allait devenir l'office des Eaux et Forêts en 1219 jusqu'aux créations de Centres Régionaux de la Propriété Forestière en 1963 et de l'Office nationale des forêts (ONF) en 1964 sous forme d'établissement public à caractère industriel et commercial, la forêt fait partie intégrante des politiques publiques françaises. En 1223, Louis VIII crée la Maîtrise des Eaux et Forêts, en 1346, Philippe VI de Valois fixe par ordonnance une réglementation forestière dans laquelle il est ordonné que :« les maîtres des eaux et forêts enquerront et visiteront toutes les forez et bois et feront vente qui y sont, en regard à ce que les dites forez se puissent perpétuelle-ment soutenir en bon estat. »De cette époque lointaine, la France a conservé une méthode de gestion qui fut érigé en exemple dans bien des pays étrangers.

Suite à des abus dans l'attribution et l'usage des charges, Colbert décide de remettre bon ordre, par l'ordonnance royale de 1669. Vauban continue l'œuvre de Colbert mais en insistant davantage sur la nécessité de développer une politique qui concilie intérêt public et intérêt des propriétaires privés. A la Restauration, l’École de Nancy voit le jour ainsi que le Code forestier (1827). Depuis le milieu du 19ème siècle, la forêt française a connu un bel essor malgré deux guerres mondiales, essor qui perdure aujourd'hui. Actuellement, la surface forestière française représente environ 30% du territoire, répartie pour les 3/4 sur des propriétés privées (on estime à 3,5 millions le nombre de propriétaires) et pour le quart restant en forêts publiques soit domaniales et soit dépendantes des collectivités (communales notamment).

La forêt est un espace en tension aux multiples enjeux entre défenseurs de la biodiversité, propriétaires, fédérations de chasse et associations de chasseurs, exploitants et industriels du bois, gardes-forestiers... De ce fait, l'ONF, en tant que service public, a un rôle fondamental dans la gestion des forêts relevant du domaine publicque au croisement d'intérêts privés divergents. La gestion des forêts publiques, plus encore que celle des forêts privées, en raison de leurs essences et de leur ancienneté, se fait sur le temps long. Selon, David Caillouel président du Syndicat des exploitants de la filière bois (SEFB), un triple besoin justifiait l'action de l'ONF à sa création : la pérennité des forêts publiques à travers la sylviculture, l’entretien de nos forêts à travers le débroussaillage afin de favoriser leur repeuplement naturel, et enfin l’organisation de ventes publiques pour optimiser la valorisation de la ressource. Or depuis la fin des années 1990, la politique du Gouvernement et de la direction de l'ONF a introduit des changements structurels importants visant à attribuer l'organisme des activités relevant du domaine privé – régie et gestion forestière ou encore bois-énergie. Témoignage de ce changement, la nouvelle appellation des gardes-forestiers devenus « techniciens forestiers territoriaux » qui ne rend plus compte de la fonction essentielle : assumer des pouvoirs de police dans les forêts publiques tandis que l'appellation « technicien » renvoie à une conception plus productiviste de la forêt. Au sein de l'ONF, le malaise des gardes-forestiers, soumis à des injonctions contradictoire (être rentables sur le court terme afin d'assainir les comptes de l'ONF, tout en devant faire respecter les codes forestier, de l'environnement, voire pénal) est réel

Quoi qu'il en soit, de nombreux rapport au cours de ces vingt dernières années ont été rédigés et se sont penchés sur l'épineux problème du déficit structurel de l'ONF. Réduire la masse salariale fut l'une des principales réponses des fonctionnaires de l'IGAS et du ministère de tutelle : ainsi depuis 1985, les effectifs de l’ONF sont passés de 15 000 à 9 000 postes et, à ce jour, il ne reste que 3 000 fonctionnaires assermentés. La loi fourre-tout ASAP, dans son article 33 maintenu par la commission mixte paritaire, accélèrera cette tendance puisqu'il dispose que le Gouvernement est habilité à légiférer par ordonnances pour remplacer les fonctionnaires (qui représentent entre 55 et 60% des effectifs) par des contractuels qui bénéficieront des mêmes pouvoirs de police qu'eux. Dans la droite ligne de ce choix de comprimer les effectifs de l'ONF, l'annexe au PLF prévoit, pour l'année 2021, une baisse de 95 ETP ce qui laisse craindre à terme une privatisation qui ne dit pas son nom. Dans la mesure, où les gardes-forestiers ont des missions de services publics et de police, le statut de fonctionnaire apporte une protection nécessaire pour résister aux pressions diverses qui peuvent s'exercer sur eux dans le cadre de leurs missions tout en préservant l'intérêt général avec une vision sur le temps long que les considérations purement financières peuvent faire perdre de vue.

S'il l'on peut comprendre qu'une rationalisation économique de l'ONF et de la filière bois est attendue dans un souci d'équilibre des comptes, la méthode employée par le Gouvernement n'est pas acceptable. La représentation ne peut voter la mission en l'état : d'une part, un nouveau contrat d'objectif et de performance (COP) entre l’État et l'ONF, qui prendra effet début 2021, est en cours de négociation, d'autre part, le plan de relance qui prévoit un apport supplémentaire de 150 millions d'€ reste flou sur la stratégie suivie et n'aborde pas l'avenir de l'ONF.

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