Intervention de Aurore Bergé

Séance en hémicycle du vendredi 2 avril 2021 à 15h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 12

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurore Bergé, rapporteure de la commission spéciale pour le titre Ier :

L'article 12 étant le dernier du titre dont je suis la rapporteure, je le redis une dernière fois : j'émettrai bien sûr un avis défavorable à tout amendement visant à supprimer l'un des articles du projet de loi et, de ce fait, à en diminuer les ambitions.

Je voudrais d'abord dire, pour répondre notamment à Mme Kuric, qu'il n'est pas question de mettre le recyclage en concurrence avec le réemploi. La filière de recyclage du verre est une filière d'excellence, qui fonctionne très bien dans notre pays. Cela a été rappelé : 87 % du verre est déjà recyclé. La filière s'est engagée à tendre vers un taux de 100 % et il faut bien sûr que cette trajectoire soit poursuivie. Mais vous conviendrez aussi du fait que, dans certains cas, le réemploi est plus bénéfique que le recyclage en matière environnementale, pour des raisons évidentes.

Madame Beauvais, vous avez demandé s'il existait une étude sur la pertinence du réemploi au regard du transport nécessaire du verre. Une étude réalisée par l'ADEME montre que la distance aller-retour parcourue par le verre doit être inférieure à 260 kilomètres pour que le réemploi soit pertinent. C'est la raison pour laquelle, lors de l'examen en commission, nous avons précisé dans la nouvelle rédaction de l'article 12 qu'il fallait que le bilan environnemental global du réemploi soit positif, en particulier s'agissant du transport. Il n'est en effet pas question de faire voyager une bouteille de Marseille à Paris, puis retour, pour qu'elle soit réemployée. Il est possible en revanche de déployer des filières locales ou régionales de réemploi. Certaines professions s'y sont déjà engagées : les brasseurs, en particulier, déploient déjà de telles filières à l'échelle locale. L'ajout de cette précision à l'article 12 est l'une des premières décisions que nous avons prises en commission, dans le but de garantir l'intérêt environnemental du dispositif.

Nous avons également précisé – et ce sujet est lié – que le réemploi ne devait pas concerner l'export, pour une raison évidente : le bilan environnemental ne serait pas positif dans ce cas. Nous avons donc déjà ajouté des précisions qui relevaient du bon sens, mais qu'il était préférable d'intégrer au texte pour rassurer les filières.

Vient ensuite la question de la pertinence du réemploi. Nous considérons pour notre part que, dans certains cas, le réemploi est pertinent et que le rôle de l'État consiste à le favoriser et à permettre la constitution de filières. Si à aucun moment nous n'en prenons l'engagement, si nous ne complétons pas les mesures de la loi AGEC avec des dispositions incitatives, la dynamique ne pourra jamais s'enclencher.

Vous avez été nombreux à citer des filières d'excellence de notre pays, qui font partie de son identité, notamment celles des spiritueux et du champagne. En commission spéciale, nous avons pris soin de préciser dans le texte que la consigne était « pour réemploi ». Or une bouteille de champagne ne peut pas être réemployée, pour des raisons liées aux labels et à l'excellence même de la filière. Mécaniquement, le champagne ne peut donc pas être concerné par le réemploi des bouteilles, qui est interdit.

Il n'est pas non plus question, avec cet article, de casser l'identité de marques de spiritueux qui font la fierté la France, notamment à l'export, en les contraignant à la standardisation. Je pense à l'exemple bien connu des vins de Châteauneuf-du-Pape, dont les bouteilles sérigraphiées sont caractéristiques. L'article 12 n'a pas pour objet de contraindre les propriétaires de ces vins à supprimer ce qui fait leur identité.

Vous avez enfin évoqué la parfumerie et le flaconnage, un sujet auquel je suis très sensible. J'ai la chance qu'une magnifique entreprise, Guerlain, soit implantée dans ma circonscription où elle réalise son flaconnage et les essences pour ses parfums. C'est donc un sujet que je connais. Pour des raisons évidentes, les entreprises de ce genre ne sont pas non plus concernées par ce dispositif.

L'article 12 doit être considéré pour ce qu'il est : un engagement pris par l'État d'inciter clairement au réemploi, n'ayant pas pour but de nuire aux filières. J'ai cité un certain nombre de celles qui font notre fierté et notre identité, et qui ne sauraient être remises en cause par cet article. Néanmoins, si nous ne nous donnons jamais les moyens de parvenir au réemploi, nous sommes certains d'échouer. Or, dans un certain nombre de cas, le réemploi est plus pertinent que le recyclage. Je me suis efforcée de répondre aux différentes interrogations et inquiétudes parfois légitimes des filières. Il me semble qu'elles sauront entendre et pourront être rassurées par les arguments que je viens d'énoncer. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable aux amendements de suppression de l'article 12.

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