Intervention de Jean-François Beynel

Réunion du jeudi 30 janvier 2020 à 15h00
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Jean-François Beynel, chef de l'inspection générale de la justice :

La question de la déclaration de patrimoine, qui ne s'imposerait qu'à certains magistrats de l'ordre judiciaire, dans des conditions définies, a été débattue au Parlement. Je travaillais en administration centrale à l'époque, et je me rappelle très bien de ce débat important, qui a donné lieu à des décisions des plus hautes instances judiciaires du pays.

Obliger à une déclaration de patrimoine est un choix d'opportunité politique, sur lequel je ne me prononcerai pas : il revient au Parlement souverain de prendre ses responsabilités. À titre personnel, je ne suis pas convaincu qu'elle soit vraiment nécessaire, étant donné le champ que recouvre actuellement la déclaration d'intérêts.

En France, le corps judiciaire est très contrôlé. Tous les magistrats de l'ordre judiciaire font des déclarations d'intérêts. Par ailleurs, nous sommes le seul corps d'agents publics dont les instances disciplinaires sont publiques et ouvertes, notamment à la presse. Je ne connais pas d'autre corps d'agents publics dont les problèmes disciplinaires sont jugés en public. C'est la contrepartie normale des fonctions que nous exerçons.

En outre, nos décisions sont toujours rendues en public, sauf exceptions qui tiennent à d'autres raisons. Elles sont toutes soumises à recours. Il y a une inspection qui, sans fausse modestie, est efficace, comme l'est le contrôle exercé par le Parlement.

La comparaison avec nos voisins européens m'incite à considérer l'institution judiciaire française comme l'une des plus transparentes et ouvertes à de tels contrôles, notamment sur le volet disciplinaire. On ne mesure pas l'importance que revêt le fait que les débats disciplinaires aient lieu en public – j'y suis très attaché. Le Conseil supérieur de la magistrature siège publiquement. Tous les journalistes peuvent assister à ses audiences disciplinaires et en rendre compte dans la presse comme ils l'entendent. C'est une forte garantie démocratique et une pression positive sur le corps.

Quant à savoir si le citoyen doit avoir accès aux déclarations d'intérêts des magistrats, la question revêt aussi une part d'opportunité politique. Le Parlement doit décider s'il souhaite aller plus loin dans la transparence des magistrats. Je m'interroge toutefois sur ce que la publicité apporterait de plus. Certes, on saurait qu'un magistrat est adhérent et membre du bureau du club de football où jouent ses enfants…

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