Intervention de Olivier Leurent

Réunion du mercredi 24 juin 2020 à 15h40
Commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Olivier Leurent, directeur de l'École nationale de la magistrature :

. Les magistrats et les chefs de juridiction oui, mais pour les auditeurs de justice, il faudra vérifier.

J'ai évoqué l'entretien déontologique et la déclaration d'intérêts, qui fait l'objet de séquences, en formation initiale et continue.

Je suis très attaché à l'unité du corps et à la qualité de magistrats du parquet, parce qu'ils interviennent directement sur les atteintes aux libertés individuelles. Ceux qui contrôlent les services de police et les gardes à vue, les juges des libertés et de la détention (JLD) qui saisissent les juges d'instruction de mesures attentatoires aux libertés individuelles doivent être des magistrats, assujettis aux obligations liées à ce statut. Je suis un défenseur de l'École unique siège-parquet et du socle déontologique commun.

J'entends qu'il puisse y avoir des proximités choquantes dans les parcours de carrière des uns et des autres et qu'on puisse, après une dizaine d'années d'activité professionnelle marquées par des passerelles, exercée comme parquetier et comme magistrat du siège, envisager d'imposer une obligation de choix. Je n'ai pas d'avis définitif sur la question, parce que les passerelles sont sources d'enrichissements pour le parquet et pour le siège.

Responsabilité et indépendance sont étroitement liées. On peut difficilement traiter d'indépendance sans parler de responsabilité. Mais cette responsabilité doit toujours être respectueuse de l'indépendance des magistrats. On ne peut pas concevoir qu'après avoir, en âme et conscience, pris une décision en toute indépendance, un magistrat voie sa responsabilité individuelle mise en cause. Toucher à la décision juridictionnelle par le biais de la responsabilité, c'est prendre le risque que l'activité de juger, activité à risque, se réduise à une activité sans risque. Je pense au juge d'application des peines qui décide de remettre en liberté un délinquant. Si celui-ci récidive dans les huit jours, cette décision juridictionnelle doit-elle engager sa responsabilité ? Si c'est le cas, plus personne ne sera en libération conditionnelle, parce qu'aucun magistrat ne voudra engager sa responsabilité. De même, quand on doit trancher pour une garde d'enfant, il y a toujours un risque. À mon sens, l'activité juridictionnelle est une activité à risque. Donc, il faut concevoir la responsabilité des magistrats, qui a été largement réformée puisque le CSM peut être saisi directement par le justiciable, dans un strict respect de l'indépendance, et ce n'est pas simple.

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