Intervention de Christophe Duguet

Réunion du mercredi 4 septembre 2019 à 15h05
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Christophe Duguet :

En instaurant en 1972 le dépistage néonatal, la France a été pionnière. Mais depuis une dizaine d'années, le système s'est bloqué, pour des raisons d'organisation. Aucune nouvelle maladie n'a été incluse, y compris – ce qui est un scandale – le déficit en MCAD alors que cela fait maintenant huit ans que la HAS a donné un avis favorable pour faire ce dépistage. La France a mis beaucoup de temps pour réorganiser son système ; c'est en train de se terminer pour redémarrer sur de nouvelles pistes.

La priorité de ceux qui organisent le système, c'est de rattraper le retard avec les anciens outils – les outils biochimiques ; c'est possible pour certaines maladies. Ce que nous demandons, c'est de pouvoir se projeter vers le futur en utilisant les nouveaux outils – ceux qui sont issus de la génomique. Ils vont permettre de dépister plus facilement certaines maladies qui n'ont pas de marqueurs biochimiques dans les trois premiers jours de la naissance, parfois avant même qu'elles deviennent symptomatiques. D'ailleurs, avec les outils biochimiques, quid des maladies dont les premières manifestations ne sont détectables qu'au bout de quinze jours, trois semaines ou un mois ? Dépister au plus tôt des maladies graves permet de limiter les pertes de chance – pour le déficit en MCAD, ce sont des dizaines d'enfants qui n'ont pas pu être traités. Il faut pouvoir éviter cela, surtout quand les traitements pour maladies rares gravissimes se multiplient et vont être de plus en plus nombreux dans les années qui viennent – c'est bien le rôle d'une loi de bioéthique que de se projeter. Or, une fois que nous avons une puce d'analyse, ajouter une, deux, trois, quatre ou cinq maladies se fait sans surcoût majeur et de façon relativement simple. Mettons-nous en marche afin de le faire dès aujourd'hui pour les maladies pour lesquelles c'est pertinent, et de le faire très rapidement, sans attendre, pour celles dont les traitements vont venir.

La loi doit aussi débloquer l'obligation d'information préalable de chaque patient, exigence lourde qui empêche le développement de l'utilisation de la génétique. Je parle bien de l'obligation de prévoir, dans le cadre d'un entretien avec un médecin, les conditions dans lesquelles la parentèle va être informée, de recenser le nom des personnes à contacter, de prévoir une explication maladie par maladie – imaginez ce que cela représentera si nous en dépistons dix, si nous en dépistons vingt –, de dire quels sont les modes de transmission de la maladie, quelles sont ses conséquences, etc. Nous demandons, pour le cas très particulier du dépistage néonatal en population générale, d'alléger à titre dérogatoire les obligations d'information préalable, sans toucher aux obligations d'information et d'accompagnement de la parentèle une fois que le diagnostic est posé.

Nous demandons donc que, dans le cadre déjà prévu par la loi, avec l'avis de la HAS et de l'Agence de la biomédecine, les autorités déterminent, maladie par maladie, au cas par cas, s'il est pertinent de l'intégrer au programme national de dépistage.

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