Intervention de Régis Juanico

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 9h30
Taxe sur les transferts de sportifs professionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRégis Juanico :

… où ce sujet fait l'objet d'une réflexion depuis 2013, et où il a visiblement besoin d'un coup d'accélérateur politique.

Si votre proposition de loi était adoptée, il faut savoir que les deux transferts les plus importants de l'année, celui de Neymar, depuis le FC Barcelone, et celui de Mbappé, depuis l'AS Monaco – qui excèdent chacun 100 millions d'euros – n'auraient pas été concernés par le dispositif, puisque les deux clubs ne sont pas soumis à notre législation fiscale. Je le regrette d'ailleurs de longue date concernant l'AS Monaco, qui évolue pourtant dans notre championnat national.

En 2013, avec Guenhaël Huet, alors député de l'Union pour un mouvement populaire, nous avons mené une passionnante mission d'information commune sur la politique de soutien au sport professionnel et sur les solidarités avec le sport amateur. Conclusion : pour un chiffre d'affaires annuel d'un peu plus de 2 milliards d'euros, il y a aujourd'hui moins de 10 % de retour financier du sport professionnel vers le sport amateur. Je parle ici des versements des ligues professionnelles aux fédérations et de la taxe Buffet – 30 millions d'euros – , des versements des clubs professionnels à leurs associations supports – 70 millions d'euros – , ou encore du prélèvement sur les paris sportifs – un peu plus de 30 millions d'euros.

Je crois possible que nous allions au-delà de 10 % de solidarité entre le monde professionnel et le monde amateur, en renforçant d'abord les ressources existantes. Je pense notamment au fait que le reversement de la Ligue professionnelle de football à la Fédération française de football devrait augmenter mécaniquement si le montant des droits de retransmission à la télévision s'accroissait en 2020, puisque, comme vous le savez, ce reversement est assis sur un pourcentage de 2,5 % de ces droits.

Nous sommes tout à fait favorables à ce que l'on renforce les mécanismes de solidarité financière entre sport professionnel et sport amateur, et à ce que l'on flèche les ressources vers le CNDS, opérateur de l'État en faveur du sport pour tous sur les territoires. Cela dit, avant de flécher une taxe hypothétique vers le CNDS, il faudrait déjà faire en sorte de préserver les ressources actuelles de cet établissement, et donc le niveau des taxes affectées, dont la grande majorité sont issues des prélèvements sur les jeux de tirage et de grattage de la Française des jeux. Je rappelle en effet que le Gouvernement a fait voter, avec le soutien, d'ailleurs, de certains signataires de la présente proposition de loi, une économie nette de 64 millions d'euros sur les ressources du CNDS dans le cadre du projet de loi de finances pour 2018. Les taxes affectées qui se trouvent ainsi rabotées ou supprimées sont, d'abord, le prélèvement exceptionnel de 0,3 % sur la Française des jeux, que nous avions prolongé l'an dernier à l'unanimité, et qui assurait 25 millions d'euros, chaque année, jusqu'en 2024, au fonds Héritage de la candidature de Paris aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, et donc au sport amateur, aux équipements sportifs de proximité des collectivités et à l'accompagnement des projets des clubs sur nos territoires.

La taxe Buffet est elle aussi rabotée : elle voit son plafond abaissé de 40 à 25 millions d'euros. Pourtant, ce prélèvement sur la cession de droits télévisés d'événements sportifs se déroulant en France est le symbole même de la redistribution entre le sport professionnel et le sport amateur. Nous avions d'ailleurs essayé, il y a trois ans, d'élargir son assiette, en l'étendant aux détenteurs de droits à l'étranger ; l'amendement avait été voté dans le projet de loi de finances, mais avait été censuré par le Conseil constitutionnel.

La dernière taxe déplafonnée est le prélèvement sur les paris sportifs, qui a également été raboté de 10 millions d'euros, alors qu'il avait été augmenté l'an dernier du même montant, là aussi pour abonder le fonds Héritage du CNDS pour les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Ce prélèvement allait très directement dans nos clubs amateur et nos territoires ; il porte sur une ressource très dynamique, puisque, en matière de paris sportifs, les mises ont augmenté de 45 % en 2016, après 30 % en 2015. Je pense qu'il faudra faire remonter les ressources tirées des paris sportifs, car il est normal que les fonds reviennent en grande partie au développement du sport pour tous.

Il ne suffit donc pas de parler du CNDS, il faut également préserver, consolider ces crédits. À cet égard, permettez-moi de faire une proposition. Nous aurons l'occasion de reparler des Jeux olympiques et paralympiques, dans le cadre d'un projet de loi que nous examinerons dans quelques jours. Vous nous avez d'ailleurs promis, madame la ministre, un deuxième projet de loi sur le sport pour tous et les liens entre sport et société dans quelques mois. Pourquoi ne pas consacrer un pourcentage des contributions des partenaires privés du COJO – Comité d'organisation des Jeux olympiques – , dont on attend 1 milliard d'euros, au CNDS pour l'Héritage des Jeux olympiques et paralympiques ?

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