Intervention de Robert Guillaumont

Réunion du jeudi 23 novembre 2017 à 10h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Robert Guillaumont, membre de la CNE2 :

Les enrobés bitumineux sont des matières préparées à partir de boues radioactives, mélangées à haute température avec du bitume. Ce dernier possède différentes propriétés. Par exemple, sa viscosité varie très rapidement en fonction de la température. Au-delà de 50 degrés, le bitume commence à se liquéfier, à 120 degrés il pyrolyse, c'est-à-dire qu'il commence à se décomposer, puis, vers 200 à 230 degrés, s'enflamme en présence d'oxygène. Le colis de bitume n'est donc pas inerte, du point de vue chimique.

Des travaux ont été réalisés par le CEA et les producteurs de déchets, à la demande de la CNE. Ces données sont acquises. Les expériences menées sont allées de la composition microscopique de l'enrobé bitumineux, jusqu'à des essais d'inflammabilité du bitume en présence de feu, ou lorsqu'il est porté à haute température. L'interprétation de ces données est un peu différente, selon qu'elle émane des experts du CEA, ou de ceux de l'IRSN. La Commission avait indiqué, dans l'un de ses précédents rapports, que la résistance au feu des colis de bitume était bonne, dans la mesure où les expériences menées montraient que la température du colis primaire placé dans le colis de stockage n'excédait pas 110 ou 120 degrés.

Des expériences ont aussi été effectuées, voici une dizaine d'années, par le CEA, pour essayer d'incinérer les fûts de bitume dans une torche à plasma, c'est-à-dire une enceinte dans laquelle on peut atteindre une très haute température. Les essais ont conclu qu'il s'agissait d'une opération très difficile à mener. En effet, si le bitume brûle bien, les sels qui y sont incorporés ne sont apparemment pas très bien décomposés. On se retrouve alors avec un résidu d'incinération très difficilement vitrifiable. On ne peut ainsi l'inerter, comme on le fait avec les procédés utilisés à La Hague.

D'autres organismes ont, par ailleurs, des colis de bitumes à gérer. Je pense essentiellement à nos amis belges de Belgonucléaire, qui disposent d'environ 60 000 fûts de bitume, contre 50 000 en France. Tout dernièrement, leur autorité de sûreté leur a demandé de reprendre les études pour analyser les problèmes d'inflammabilité. Il s'agit donc d'un sujet d'interrogation, en Belgique comme en France.

Va-t-on, sur la base des données actuellement acquises, pouvoir trancher, en réduisant les incertitudes, ou va-t-il falloir procéder à de nouvelles expériences ? La décision sera entre les mains des experts qui vont se pencher sur ce problème. Ce problème des bitumes est récurrent : les interrogations courent en effet depuis une dizaine ou une quinzaine d'années. Aujourd'hui, nous sommes, en quelque sorte, à la butée, devant le fait accompli. Il faut trancher ce problème.

Je précise que mon intervention concernait exclusivement cette question, abordée sous l'angle scientifique, et absolument pas le volet économique du problème.

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