Intervention de Marc Le Fur

Séance en hémicycle du jeudi 20 juillet 2017 à 9h35
Débat d'orientation des finances publiques pour 2018

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur :

Vous prenez un risque constitutionnel parce que cette réforme affecte non seulement le recouvrement de l'impôt, mais également l'assiette de l'impôt. En effet, il était initialement prévu qu'en 2017, les contribuables payaient sur les revenus de 2016 et, en 2018, sur les revenus de 2018. L'année 2017 était de fait non fiscalisée. La décision est prise, alors que l'année est déjà bien avancée, que les revenus seront finalement fiscalisés en 2017. Ainsi, cette évolution de l'assiette fera malgré tout des perdants. Messieurs les ministres, il faut veiller à éviter le risque constitutionnel.

Je lance aussi une alarme sur la taxe d'habitation, dont la réforme – le président de la commission des finances l'a dit – constitue un véritable hold-up à l'égard des communes et des collectivités en général.

Une ou deux questions n'ont pas été abordées. La première concerne l'effet de seuil. Vous dites que 80 % des contribuables seront épargnés et que seuls 20 % paieront la taxe. On déterminera donc, au plan national, un revenu en deçà duquel on ne la paiera pas et au-delà duquel on la paiera. À quelques euros près de revenu, on paiera ou l'on ne paiera pas la taxe d'habitation, qui peut être de 400, de 500 euros, voire de 1 000 ou de 1 500. L'effet de seuil sera donc considérable – et incompris des contribuables.

Pour l'éviter, vous n'avez pas d'autre solution que de prévoir un dispositif de lissage. On épargnera certes 80 % des ménages, mais il faudra de fait imaginer pour 10 % des redevables un mécanisme qui permettra d'éviter un ressaut lié à l'effet de seuil. Je regrette que vous n'en ayez pas du tout parlé.

Une seconde question relative à la taxe d'habitation concerne la liaison entre les taux de la taxe d'habitation, de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties et de la cotisation foncière des entreprises. Cette liaison indispensable avait été créée pour éviter que les collectivités locales n'augmentent exagérément l'impôt : la taxe d'habitation était l'élément régulateur, car, comme elle concerne un grand nombre de contribuables, les élus locaux y sont sensibles et évitent d'augmenter exagérément des taxes dont les taux sont liés. Dès lors que, désormais, la taxe d'habitation touchera très peu de contribuables, ce mécanisme disparaîtra et une certaine démagogie pourra se donner libre cours. Les impôts locaux seront augmentés d'autant plus massivement que vous baisserez les dotations aux collectivités locales.

Je lancerai encore une alerte bienveillante sur le diesel, en me réjouissant que le président de la commission l'ait fait à sa façon. Vous objecterez sans doute que quelque 50 % des véhicules roulent au diesel et 50 % à l'essence. C'est vrai, si l'on raisonne en vente, mais le stock est composé à près de 80 % de diesel, et c'est au diesel que roulent les gros utilisateurs de véhicules.

En définitive, on pénalisera donc ceux qui ne bénéficient pas de transports en commun, ceux qui travaillent de nuit ou qui appartiennent au monde rural.

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