Intervention de Philippe Huppé

Séance en hémicycle du mardi 11 mai 2021 à 9h00
Questions orales sans débat — Concours des meilleurs ouvriers de france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Huppé :

Madame la ministre déléguée chargée de l'industrie, l'excellence des métiers français et sa reconnaissance sont un atout pour la France, tant à l'international que dans l'Hexagone. Cette excellence et la confiance qui l'accompagne sont le produit d'un savoir-faire durement acquis pendant de longues années. Nous avons là une illustration de l'idée toute française selon laquelle les plus capables et les plus travailleurs peuvent être reconnus, notamment à travers le titre de meilleur ouvrier de France (MOF). Or j'ai cru comprendre que le comité d'organisation des expositions du travail et du concours (COET-MOF) lancerait une réforme qui changerait profondément la nature de ce dernier. Je n'en mentionnerai que trois aspects, qui en montrent la philosophie.

Pour commencer, le mot « concours » serait remplacé par celui d'« examen ». Ce serait, me semble-t-il, une grave erreur, car il s'agit bien d'un concours puisqu'il vise à reconnaître les meilleurs. Avec un tel changement, c'est toute la méritocratie française qui serait remise en cause, et ce serait regrettable. En France, même si on vient d'un milieu simple, on peut, grâce à l'acquisition patiente d'un savoir-faire, être reconnu comme le meilleur dans son domaine, comme l'élite du monde des métiers manuels. Cette possibilité est fondamentale ; or l'examen casserait cette idée française de méritocratie.

En outre, les frais d'inscription au concours, qui s'élèvent aujourd'hui à quelque 200 euros, augmenteraient jusqu'à 6 000 euros. Entre 200 et 6 000 euros, la différence est énorme et inadmissible : avec le nouveau montant, la participation au concours serait conditionnée au fait d'être assez fortuné, ce qui, là aussi, va à l'encontre de la méritocratie à la française, c'est-à-dire de l'idée que chacun doit pouvoir briguer le titre et concourir.

Enfin, et cela me touche particulièrement, si elle était introduite, cette réforme verrait disparaître du concours certains métiers d'art – des métiers rares, des métiers à petit flux. Or, en 1929, quand le concours des MOF a été créé, il a été précisément conçu pour ces métiers ; il serait triste de les en exclure.

Cette réforme aura-t-elle lieu ? Le concours sera-t-il remplacé par un examen ? Ira-t-on à l'encontre de cette idée généreuse de la République qu'est la méritocratie ?

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