Intervention de Alexandre Holroyd

Séance en hémicycle du lundi 18 octobre 2021 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Article 18 et débat sur le prélèvement européen

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandre Holroyd :

Aux premières heures de cette législature, avec notre collègue Michèle Tabarot, j'avais présenté une proposition de résolution relative à la gouvernance de la zone euro. Plus de trois ans après, pour faire écho à Joe Dassin, un siècle et une éternité semblent s'être écoulés. En 2018, nous appelions la Commission européenne à engager une réflexion sur la nature et l'efficacité des règles économiques et budgétaires, et à renforcer les mécanismes de solidarité économique. À l'heure où nous entamons l'examen de la contribution française pour 2022 au budget européen, plusieurs pas de géants – fruits du volontarisme de la France et de la crise que nous traversons – ont profondément bouleversé la donne.

D'abord, l'Union européenne a, pour la première fois de son histoire, entériné une notion essentielle que jusqu'alors elle refusait d'admettre : une politique budgétaire commune, ou du moins une coordination, est la condition sine qua non de la survie de l'union monétaire. C'est l'essence même du plan de relance européen de 750 milliards d'euros, obtenu par le Président de la République après d'âpres négociations.

Ensuite, l'existence d'une véritable solidarité économique européenne est indissociable d'une telle coordination budgétaire. Dit autrement, l'avenir de notre union monétaire est corrélé à notre capacité à corriger ses effets sur les économies nationales. C'est la logique même des 390 milliards d'euros de subventions qui composent, entre autres, le plan de relance européen, C'est aussi la justification de l'action déterminante de la Banque centrale européenne (BCE) qui, pour la première fois, a adopté une approche différenciée pour soutenir les économies nationales grâce à ses plans de rachats.

C'est donc à l'aune d'une nouvelle ère que nous sommes amenés à examiner une contribution française qui, paradoxalement, varie peu pour des raisons qui ont déjà été évoquées à cette tribune. Dans ce contexte, il me paraît important de regarder la lune plutôt que le doigt. Si cette contribution française n'évolue pas de façon plus significative et si elle n'est pas proportionnée aux avancées monumentales qui ont eu lieu dans les derniers dix-huit mois, c'est en raison d'un décalage technique. Ces avancées ont bien des incidences pour nos finances publiques, des incidences majeures même. Qu'elles soient décalées justifie d'autant plus que nous les anticipions et que nous en débattions dès aujourd'hui.

En 2027, comme le rapporteur général l'a noté, à défaut de changement structurel du financement du budget de l'Union, la contribution française augmentera de façon très substantielle. Cette augmentation se fera selon les modalités existantes, après un calcul fondé sur le revenu national brut tellement savant que peu y retrouvent leur latin à défaut de le perdre.

Les progrès accomplis dans les dix-huit derniers mois au niveau européen, grâce à la mobilisation de la France, ont été, pour ainsi dire, inespérés. Mais ils ont un coût : ils nous condamnent à redoubler d'ambitions pour les années qui suivent, celles qui s'ouvrent sur une présidence française. Nous avons entériné l'idée d'une politique budgétaire européenne et celle de solidarité économique : nous devons maintenant réussir à pourvoir notre Union des moyens de nos ambitions en lui allouant des ressources propres. Il est impératif de progresser s'agissant de deux ressources propres d'ampleur : celles issues de la réforme du système d'échange de quotas d'émissions et de la création d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières. Le système d'échange et le mécanisme d'ajustement sont essentiels pour remplir nos objectifs de transition écologique en s'assurant que cela ne se fasse pas aux dépens de nos économies et de nos industries. Tous deux doivent être amenés à contribuer au prochain budget pluriannuel européen.

Au-delà de ces deux pistes de nouvelles ressources propres, il nous faut continuer à rechercher des ressources pérennes, notamment en matière d'impôt sur les sociétés, domaine dans lequel peu de progrès ont été enregistrés ces dernières années. L'accord obtenu à l'OCDE sur la réforme de la fiscalité internationale des entreprises doit être l'occasion de progresser rapidement sur ce sujet.

Les immenses avancées de ces dix-huit mois nous imposent deux fois plus d'ambition pour les années à venir. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez été un acteur incontournable de ces avancées : la majorité sera à vos côtés pour ce qui concerne celles de demain.

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