Intervention de Jean Lassalle

Séance en hémicycle du lundi 14 mai 2018 à 21h30
Lutte contre les violences sexuelles et sexistes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Lassalle :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, madame la rapporteure, chers collègues, nous sommes réunis ici par l'un des sujets les plus sensibles que nous aurons à traiter pendant la législature et dont, au fond, peu de députés ont à débattre dans une vie.

Il s'agit de l'humain dans ce qu'il a de plus précieux ; il s'agit aussi de l'indicible ; et il s'agit d'amour. Il s'agit d'éducation, dans la violence de notre temps, qui détruit jusqu'à l'idée de la famille, et parfois même du vivre ensemble. Il s'agit de la transmission du savoir, de tout ce que notre grand pays a pu apporter, au-delà des mers, des montagnes et des océans. Cette transmission du savoir doit s'exercer dans le brassage d'une mondialisation dont nous ne connaissons pas encore les limites et qui finira certainement par être une bonne chose. Il s'agit aussi de la part d'irrationnel, d'imprévisible, d'indéchiffrable qu'il peut y avoir dans chacun des êtres humains.

Je voterai ce texte, parce que le fait même de parler de ce sujet, dans un grand pays comme le nôtre, est quelque chose de grand, de beau. Je ne sais pas si c'est vous, madame la ministre, ou bien notre collègue de La France insoumise, qui rappelait le vote intervenu en Espagne, il y a si longtemps déjà. Je me trouvais en Espagne à ce moment-là : alors que ce pays vivait des choses extraordinaires, j'étais totalement épaté de voir le calme dans lequel ces débats avaient lieu. Cela ne me surprit pas tellement. J'étais déjà rentré en France lorsque j'appris que ce texte avait été voté à l'unanimité.

Deux flashes me reviennent souvent. Tout d'abord, ce texte concerne chacune et chacun d'entre nous : qui n'a pas appris, au moins une fois dans sa vie, avec stupéfaction et surprise, que telle femme était morte après avoir subi, jour après jour, nuit après nuit, la violence et le crime ?

Je me souviens également de voitures qui, un jour, devant moi, sur une longue ligne droite, ralentissaient puis redémarraient devant un spectacle épouvantable : une femme totalement débraillée. Alors que je la portais au commissariat, malgré ses supplications de ne pas le faire, je vis les regards qui accompagnaient notre avancée.

Je me souviens aussi du comportement d'un individu dans le métro, sous les regards de dizaines de personnes – je ne lui avais pas prêté immédiatement attention. J'ai alors constaté l'incommensurable lâcheté dont peut faire preuve le genre humain. Pour ma part, je fis simplement les sommations d'usage et j'agis tel qu'un homme doit agir.

Oui, c'est difficile, et je voterai ce texte. Mais nous parlons là de crimes et de la cohorte des grandes souffrances que l'on peut imposer avec le crime.

Je veux simplement vous mettre en garde en vous disant que nous parlons aussi d'amour, et de transmission de savoir, et de construction de l'homme. Il n'y a pas que des femmes qui sont mortes sous les coups.

Je veux simplement vous demander à tous et à toutes ce que vous ressentiriez si un jour, vous lisiez, encore ce matin, sur la base de rumeurs certes très nombreuses ?... Serreriez-vous la main de M. Lassalle ? Lui direz-vous bonjour ? Non, je fais confiance à la justice de mon pays.

C'est un sujet exceptionnel, auquel je m'honore de participer, mais alors qu'il s'installe, alors qu'il va changer, je le crois, lui aussi, profondément la nature des rapports humains, attention à la rumeur – parce qu'un crime qui n'est pas un crime, c'est aussi un crime.

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