Intervention de Nicolas Forissier

Séance en hémicycle du mardi 22 mai 2018 à 21h30
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Forissier :

Beaucoup a été dit, notamment sur le fait que ce texte va dans le bon sens. Avec l'inversion de la formation du prix, il répond à une problématique essentielle, afin d'essayer de garantir un revenu à nos exploitants agricoles. C'est une bonne chose, monsieur le ministre, même s'il faudra, comme Philippe Vigier et bien d'autres l'ont dit tout à l'heure, que vous soyez attentif aux amendements des élus de terrain qui, sur tous ces bancs, aiment l'agriculture, aiment leur terroir, et savent, sentent ce qu'il faut faire pour clarifier encore davantage ce texte et le renforcer.

Cela étant, ce texte répondra-t-il au découragement, au sentiment qu'il n'y a plus de cap, que ressentent nos agriculteurs et agricultrices aujourd'hui ? Je rencontre toutes les semaines, et je ne suis sans doute pas le seul dans ce cas, des agriculteurs qui, voyant l'âge de la retraite approcher, ont décidé de ne pas transmettre leur exploitation à leurs enfants. Ils essayent même de les décourager, car pour eux, ce métier n'a plus d'avenir. Ils n'y croient plus. Ce sentiment d'une absence de cap est aujourd'hui majeur dans le monde agricole français. Il faut l'entendre.

Le texte répondra-t-il à cette angoisse ? Partiellement, de même que les mesures que vous avez évoquées dans votre discours, monsieur le ministre, qui créeront peut-être petit à petit une sorte de mosaïque.

Mais aujourd'hui, au-delà des débats qui auront lieu cette semaine dans l'hémicycle, il manque une vision forte, une stratégie, l'affirmation par le Président de la République, par le Gouvernement, que l'agriculture, et singulièrement l'industrie agroalimentaire, qui constitue avec cette dernière un couple extrêmement puissant et performant pour la France, sont des priorités et qu'elles bénéficient d'une vision, d'une stratégie.

Cette vision, cette stratégie doivent aller bien au-delà de ce que disait le Président de la République lors de ses voeux aux agriculteurs et au monde rural, à savoir que l'agriculture française a une mission, celle d'assurer la souveraineté alimentaire de la France. Il s'agissait déjà d'une restriction par rapport au discours ambiant des dernières années, selon lequel l'agriculture, à l'échelle européenne, devait assurer la souveraineté alimentaire de l'Europe : on ne parle plus d'Europe, mais de France.

Sans doute, j'ai pu le voir, le discours du Président de la République a un peu évolué depuis, puisque celui-ci a pu évoquer la dimension internationale de l'agriculture, simplement sous l'angle de l'environnement et de la contribution que les agriculteurs devraient fournir à la résolution et à la mise en oeuvre des accords de Paris.

C'est pourquoi, monsieur le ministre, au-delà de ce texte, quelles que soient ses qualités ; au-delà de l'action que vous avez essayé de rappeler tout à l'heure et des différents chantiers engagés, dont l'un, celui de la réserve de précaution, qui sera traité dans le cadre du projet de loi de finances, est absolument essentiel – je forme au passage le voeu que cette réforme soit simple, puissante, lisible et sans plafonnement excessif – ; au-delà de ces chantiers, il faut absolument que vous construisiez, et que nous construisions avec vous – nous y sommes prêts – une stratégie, une vision, une nouvelle frontière pour l'agriculture française, qui aille bien au-delà des frontières que nous nous sommes nous-mêmes fixées.

Parce que nous allons faire face à un défi alimentaire mondial colossal : d'ici 2050, nous devrons produire 70 % de biens alimentaires de plus car le nombre d'habitants sur la planète passera de 7 à plus de 10 milliards.

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