Intervention de Jean-Baptiste Moreau

Séance en hémicycle du vendredi 25 mai 2018 à 15h00
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Article 10 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Baptiste Moreau, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Peut-être m'y suis-je mal pris, mais je ne me suis concerté avec personne, même pas avec le Gouvernement, avant de déposer cet amendement de suppression de l'article 10 ter. Il est le fruit d'une initiative personnelle, « disruptive », pourrait-on dire.

Je remercie le Gouvernement de ne s'y être pas opposé : il a ainsi permis son adoption en commission. C'était le meilleur moyen d'ouvrir un débat avec l'ensemble des partenaires, qui ont été invités, par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation et le ministère de l'économie et des finances, à réfléchir à un nouveau cadre de négociations, sur lequel, toutefois, il n'existe pas aujourd'hui de consensus. De toute façon, compte tenu du temps qu'il a fallu pour mettre en place le mécanisme prévu par la loi de modernisation de l'économie, il était évident qu'il ne serait pas possible de construire un système alternatif en un mois !

Les discussions étant désormais enclenchées, je souhaite surtout qu'elles ne retombent pas, parce que ma conviction profonde est qu'il faut changer le cadre actuel des négociations. En effet, après en avoir discuté avec les différents intermédiaires, j'ai acquis la certitude que le système des négociations commerciales annuelles est en partie responsable de la guerre des prix. Je n'oublie pas les phénomènes de concentration – j'ai écouté les différentes interventions sur le sujet : c'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement visant non seulement à réaliser un état des lieux des ententes entre centrales d'achat, mais également à recommander la dissolution de certaines d'entre ces ententes.

L'article 10 ter visait bien à remettre les différents acteurs autour de la table. En effet, jusqu'à présent, tous critiquaient le cadre actuel sans que personne envisage la possibilité d'en édifier un autre. D'ailleurs, les premières réactions, hostiles à la suppression du cadre actuel, ont émané de ceux-là même qui admettaient, quinze jours auparavant, que ce cadre ne fonctionne pas, que de telles négociations n'ont lieu nulle part ailleurs qu'en France et qu'elles font peser une pression insupportable sur les salariés.

J'ai également expliqué le jeu d'un distributeur qui a consisté à jeter le discrédit sur cet amendement, parce que tel était son intérêt propre. Je prends acte de ce qui s'est finalement apparenté à un jeu théâtral.

Le débat autour de cet article permettra de réaliser certaines avancées, notamment de faire sortir plusieurs produits, notamment la viande hachée congelée, des négociations commerciales annuelles. Il est du reste déjà possible de le faire dans le cadre de la législation actuelle, puisque des produits frais tels que les fruits et légumes n'entrent pas dans le cadre des négociations annuelles.

J'évoque plus précisément le cas de la viande hachée parce que, comme je l'ai déjà souligné en commission des affaires économiques, le prix de la viande fraîche fait l'objet de négociations hebdomadaires, qu'il s'agisse de la carcasse en entier ou en morceaux. Or, comme aujourd'hui 50 % de la viande bovine est consommée sous forme de viande hachée, cela influe sur le prix global de la carcasse et l'établissement du prix payé au producteur. Le fait de sortir la viande hachée des négociations annuelles commerciales permettra d'apporter plus de souplesse et de revaloriser, au moins à certaines périodes, le prix payé au producteur, ce qui est un des objectifs du texte.

Il n'est pas possible, j'en ai pris acte, de créer un nouveau cadre de négociations avant celles qui se tiendront à la fin de l'année. C'est pourquoi il convient de continuer de travailler avec l'ensemble des partenaires pour trouver rapidement des alternatives ayant vocation à s'appliquer aux négociations suivantes. Améliorer le cadre actuel est nécessaire pour faire cesser la guerre des prix, qui est destructrice de valeurs et a pour seule conséquence de faire perdre les producteurs.

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