Intervention de Guillaume Garot

Séance en hémicycle du dimanche 27 mai 2018 à 9h30
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Après l'article 11 quindecies

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Garot :

Cet amendement revêt une importance particulière à mes yeux, car il est au coeur de notre politique alimentaire. Il est de la responsabilité de l'État de fixer des règles. Cela vaut d'abord, bien sûr, dans les domaines de la santé et de l'environnement, où, en présence d'un danger, l'État fixe des règles pour encadrer la production et la transformation, en vue d'une meilleure consommation.

Au fond, il y a une vraie défiance des Français vis-à-vis de leur alimentation : pas une semaine ne se passe sans que l'on assiste à une nouvelle crise qui fragilise encore le lien de confiance entre les citoyens et ce qu'ils mangent. Notre politique, dans ces conditions, doit viser à rétablir ce lien. L'État doit jouer son rôle, mais il ne peut évidemment agir seul : cette politique doit s'appuyer sur les divers acteurs de l'alimentation, sur ceux qui la produisent.

L'amendement tend à établir des règles claires en matière d'environnement et de santé. Nous devons en particulier nous pencher sur ce que l'on appelle « l'effet cocktail » dans la composition des aliments. Je souhaite que l'ANSES soit rapidement saisie pour que nous puissions avoir des éléments clairs sur ce sujet : c'est là un enjeu essentiel.

D'autre part, l'amendement tend à fixer des objectifs de qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire. Depuis plusieurs jours, nous sommes revenus à plusieurs reprises sur cette question : comment améliorer la qualité de l'ensemble de l'offre alimentaire produite dans notre pays, sans que cette qualité soit réservée à un secteur plutôt qu'à un autre ? Il y va de la justice sociale.

Il est à mes yeux de la responsabilité de l'État de fixer des objectifs en matière d'amélioration nutritionnelle, et de donner une échéance pour ce faire : pour ma part, je propose celle de 2023. Nous pourrions ainsi déterminer certains objectifs, en nous appuyant par exemple sur les recommandations du Programme national nutrition santé – PNNS – , quant à la quantité de sel et de sucre dans les aliments. Nous mobiliserions les filières à travers les plans dont elles font l'objet, et fixerions des échéances pour vérifier que l'on avance bien et que les objectifs sont tenus. Si on ne le fait pas, on n'arrivera pas à grand-chose : le risque serait alors la lenteur, voire l'immobilisme.

Mon expérience m'a montré qu'une telle démarche est opérationnelle, concrète, et qu'elle produit des résultats. Ministre délégué à l'agroalimentaire, j'avais travaillé avec les boulangers sur la réduction du grammage de sel dans les baguettes, par kilo de farine : ce taux, dans la baguette que vous savourez tous les matins, a ainsi été ramené de 22 grammes il y a dix ans à 18 aujourd'hui. Avec de la volonté et de la détermination, donc, on y arrive. Il en va de même pour les boissons rafraîchissantes, dont on savait qu'elles avaient un taux de sucre trop élevé, que nous avons pu diminuer grâce à un travail avec les acteurs de la filière.

Le même travail doit être fait pour l'ensemble des produits, pour l'ensemble de la production alimentaire française. On me reprochera peut-être de créer des contraintes ou des normes supplémentaires. Mais ce n'est pas l'objet : il s'agit de mobiliser une filière en lui fixant des objectifs, selon un dessein et une ambition partagés. Les aspects économiques sont forts, c'est vrai, car ce sont des leviers pour conquérir des marchés : non seulement pour reconquérir le marché intérieur, mais aussi, j'en suis convaincu, pour en conquérir de nouveaux à l'international, car les produits français demeurent une référence dans le monde entier.

Mon amendement, donc, vise à fixer des objectifs très clairs à notre politique alimentaire en termes de qualité nutritionnelle et, bien entendu, de qualité des modes de production en général. Ces objectifs reposeraient sur une objectivation des besoins. Seraient ainsi évacués tous les contaminants potentiellement dangereux. Si l'on formule les choses clairement, on y parviendra.

Dans mon département de la Mayenne, j'ai organisé des ateliers pour préparer ce projet de loi, avec les citoyens que le sujet intéressait. La mesure que je vous propose ici a eu un véritable écho, et a d'ailleurs été enrichie par les participants : au-delà des arguments précédents, il faut rappeler que nous devrons, à terme, adapter notre fiscalité pour la rendre favorable à une alimentation qui soit bonne pour la santé. À travers le levier fiscal, nous pourrions en effet encourager les produits de nature à améliorer l'offre alimentaire française.

J'ai été un peu long, monsieur le président, mais je crois que, sur l'exigence de qualité nutritionnelle et de qualité de notre offre alimentaire, nous pouvons prendre, collectivement, un temps d'avance.

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