Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du dimanche 27 mai 2018 à 21h30
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Après l'article 13

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Nous partons d'un constat : à chaque fois qu'on s'est proposé d'installer ce que vous prétendez difficile de définir – et je ne vous comprends pas – , à savoir des fermes usines, l'opposition est venue le plus souvent des agriculteurs eux-mêmes. Elle n'est pas venue de citadins possédant des vaches de compagnie, qui s'émouvaient des conditions de vie des vaches à la campagne – puisqu'on a objecté tout à l'heure les lapins de compagnie à ce que je disais des lapins en général. Je vous invite à rencontrer la Confédération paysanne si vous manquez d'informations sur ce sujet. Je dis cela pour qu'on comprenne bien de quoi nous parlons : ce n'est pas d'un caprice de citadins qu'il est question.

Vous avez dit, quelque chose d'important, monsieur le ministre : vous ne souhaitez pas des modèles d'exploitations où les animaux sont l'appendice d'un méthaniseur. Eh bien, nous sommes d'accord avec vous ! Mais vous savez comme moi qu'à partir d'une certaine taille, c'est inévitable – et je parle là sur la base de réalités que nous connaissons. Si les Allemands ont adopté ce modèle, c'est parce qu'il leur semblait plus rentable d'un point de vue économique. Quand on met en avant le seul argument économique, on aboutit inévitablement à ce résultat : dans ces fermes de 1 000, 2 000 ou 10 000 vaches, la vache et le lait deviennent quasiment un sous-produit du méthane.

Autre exemple, si des carcasses de moutons nous arrivent par bateaux entiers d'Australie ou de Nouvelle-Zélande, c'est que, dans ces pays, ces carcasses de moutons sont un sous-produit de la laine : c'est la laine qui les intéresse et pas la viande. C'est la raison pour laquelle ils inondent les marchés d'une marchandise qui n'est pas payée à sa valeur puisque ce n'est pas celle-ci qui les fait vivre.

Nous ne nions pas, monsieur le rapporteur, que ces maxi-élevages peuvent résulter, ici ou là, d'une association d'agriculteurs qui cherchent à améliorer leur performance économique. Toutefois, en tant qu'agriculteur vous-même, vous connaissez très bien les effets de seuil : à partir du moment où vous élevez 1 000 bêtes en commun, cela a des conséquences sur la manière dont elles sont traitées et sur le modèle économique.

Si vous permettez à ce modèle de se répandre en refusant de poser des limites, on sait quelles en seront les conséquences inéluctables. Vous venez vous-même de reconnaître, monsieur le ministre, que l'autorité préfectorale a su fixer un plafond quand il est apparu à l'État que cela passait les bornes.

Nous sommes donc tous d'accord pour dire, premièrement, qu'il faut fixer des bornes – c'est précisément ce que propose l'amendement – , deuxièmement, qu'il y a un modèle d'élevage qui conduit automatiquement à faire de l'élevage lui-même un appendice d'une autre production. La vocation des agriculteurs n'est pas de produire du méthane ; nous savons le faire de bien d'autres manières. Entendons-nous bien, nous savons que la méthanisation et la méthanation permettront demain de produire une énergie durable et reproductible, et qu'il y aura une demande en la matière. Eh bien, prenons des dispositions conformes à ce que les uns et les autres viennent d'énoncer comme principe de leur réflexion !

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