Intervention de Laetitia Saint-Paul

Séance en hémicycle du mercredi 2 août 2017 à 15h00
Répression d'actes illicites en matière de navigation maritime — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaetitia Saint-Paul :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le volume du transport de marchandises par mer devrait doubler d'ici à 2030. En effet, nous assistons à une augmentation du trafic maritime mondial plus rapide que celle du PIB mondial. La France dispose de la deuxième zone économique exclusive, et une large partie des espaces maritimes sous notre juridiction se trouve à des points stratégiques faisant l'objet d'un transit important.

C'est un fait : depuis longtemps, le trafic maritime mondial est confronté à des actes de piraterie en zones côtières. La mission Corymbe, qui, depuis trente ans, vise à entraîner les marines africaines, et la mission Atalante dans le golfe d'Aden ont certes permis de réduire la piraterie, mais celle-ci s'est déplacée dans le delta du Niger. La marine doit désormais assurer la protection renforcée sur les navires à passagers.

Au-delà des actes de piraterie, un nouveau danger vient perturber la sécurité de notre navigation : le terrorisme maritime. Un renforcement de la lutte contre le terrorisme maritime international s'impose donc. Notre projet de loi, autorisant la ratification des deux protocoles de Londres de 2005 modifiant la convention SUA de 1988 vise clairement à introduire, dans le droit maritime et pénal, des mesures permettant aux États de lutter plus efficacement en mer contre le terrorisme et la prolifération nucléaire, bactériologique et chimique.

Comme le rapporteur l'a rappelé, c'est à la suite d'un détournement de navire à passagers que les États ont saisi l'Organisation maritime internationale d'une demande, en vue d'une convention similaire à celle déjà en vigueur pour le transport aérien, lui aussi menacé par le terrorisme depuis la fin des années 1960.

La convention SUA a été adoptée en 1988. Concrètement, à travers cet arsenal juridique, les États sont par exemple tenus de s'accorder l'entraide judiciaire, ou encore de se coordonner, y compris par l'échange de renseignements, pour prévenir la préparation sur leur territoire des infractions visées par ladite convention.

Après le 11 septembre 2001, les deux protocoles de 2005 ont marqué des avancées de trois ordres : l'incrimination du terrorisme, de façon large ; l'extension de la convention SUA aux plates-formes ; la création, enfin, d'une procédure d'arraisonnement.

Par définition, arraisonner consiste à procéder à un contrôle, afin de vérifier la destination et la cargaison d'un navire, la nationalité ainsi que l'état sanitaire de son équipage et de ses passagers. À titre d'exemple, j'évoquerai deux affaires emblématiques entrant dans le champ de la convention SUA, et dans lesquelles les avancées introduites par les deux protocoles auraient pris toute leur mesure.

Battant pavillon français, le pétrolier Limburg a été percuté le 6 octobre 2002 dans les eaux territoriales du Yémen par une embarcation rapide de type Zodiac chargée d'explosifs, ce qui a coûté la vie à l'un des marins et blessé douze autres membres d'équipage. Une information judiciaire a été ouverte en France le 15 octobre 2002 des chefs de destruction, dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, avec cette circonstance que l'infraction a entraîné la mort d'autrui, tentative d'assassinats, infractions à la législation sur les explosifs, en relation à titre principal avec une entreprise terroriste.

D'autre part, un voilier français de plaisance, le Tanit, à bord duquel se trouvaient cinq personnes de nationalité française, dont un enfant de trois ans, a été détourné le 4 avril 2009 par plusieurs individus de nationalité somalienne, alors qu'il naviguait dans les eaux internationales au large des côtes de la Somalie. Les agresseurs, armés, se sont emparés du voilier et ont séquestré son équipage. Le 10 avril, après plusieurs jours de vaines négociations, la marine nationale a lancé une opération militaire afin de libérer les otages. Au cours de cette reprise de vive force qui a eu lieu en haute mer, un membre de l'équipage, le skipper, a été mortellement blessé. Trois des cinq agresseurs ont été capturés et deux autres ont été tués lors des échanges de tirs avec les militaires. Le 12 avril 2009, le parquet de la juridiction interrégionale spécialisée de Rennes a été saisi. Les trois agresseurs interceptés ont été transférés en France par voie aérienne et une information judiciaire a été ouverte. La cour les a condamnés à neuf ans d'emprisonnement.

Ces deux exemples illustrent les enjeux de l'organisation de la coopération en mer entre les États parties. Puisque ces deux protocoles, qui ont été adoptés à l'unanimité en commission, constituent une réponse adaptée au niveau de la menace et qu'ils ne soulèvent aucune difficulté de fond, nous souhaitons que leur ratification intervienne rapidement. En effet, nous débattons aujourd'hui d'un texte qui a été signé il y a onze ans ! Nous regrettons la longueur de ce processus, sur un sujet aussi pressant que la lutte contre le terrorisme.

En définitive, la ratification des protocoles SUA de 2005 apparaît aujourd'hui comme une priorité, dans la mesure où elle s'insère dans le cadre des efforts déployés par la France pour renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre le terrorisme.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.