Intervention de Justine Benin

Séance en hémicycle du lundi 11 juin 2018 à 16h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJustine Benin :

Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la réforme de la formation professionnelle présentée par le Gouvernement à travers ce projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a suscité une attente forte et légitime dans nos territoires ultramarins.

Et pour cause ! L'objectif d'inclusion sociale et d'émancipation personnelle mis en valeur par le présent projet de loi est dans nos outre-mer beaucoup plus qu'un déterminant de choix techniques : c'est une aspiration collective liée à la conscience d'un destin commun.

Cet enjeu a suffi à fonder l'intervention de la délégation aux outre-mer, que nous avons la responsabilité de représenter avec mes collègues Josette Manin et Ericka Bareigts, et dont la première mission est d'introduire dans les débats et les projets inscrits à l'ordre du jour les analyses et les propositions conformes aux intérêts de nos territoires.

Pour ce faire, nous avons procédé à de nombreuses auditions des acteurs de la formation, ici ou sur nos territoires respectifs. Je tiens à saluer ma collègue Hélène Vainqueur-Christophe, avec qui nous avons mené un véritable marathon en Guadeloupe pour donner la parole et recueillir les observations de l'ensemble des acteurs locaux de la formation : organismes de formation, OPCA – organisme paritaire collecteur agréé – , CFA, organisations syndicales, patronales, Pôle emploi, direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIECCTE – , tous ont été consultés sur ce projet de loi.

Aussi, afin de bien cadrer les termes de nos travaux, il n'est pas inutile de rappeler certaines réalités d'ordre social et économique qui touchent nos outre-mer. Le taux de décrochage scolaire est particulièrement préoccupant. La part de la population de plus de quinze ans non scolarisée et ne possédant aucun diplôme ou seulement le brevet des collègues s'élève à 50 % dans les outre-mer contre 32 % dans l'Hexagone. Quant à l'illettrisme, les chiffres recueillis lors de la Journée défense et citoyenneté de 2016 montrent que le taux de jeunes présentant des difficultés en lecture est très supérieur dans les outre-mer : 30 % en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion, 48 % en Guyane et jusqu'à 73 % à Mayotte.

Il est également important de rappeler que le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans est significativement plus élevé que dans l'Hexagone, approchant voire dépassant la moitié de la tranche d'âge. Il est en Guadeloupe de 55 %, à La Réunion, de 52 %, à Mayotte et en Guyane de 46 %.

Ainsi se crée un cercle vicieux : la situation de l'emploi rend nos populations particulièrement sensibles aux aléas économiques tout en accroissant les difficultés éprouvées dans l'évolution des carrières professionnelles.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, l'enjeu majeur que constitue la formation professionnelle pour les outre-mer appelle à l'évidence un examen approfondi et la recherche de solutions idoines. Grâce la mobilisation des députés des outre-mer, au soutien de nos collègues de l'Hexagone, à vous, madame la présidente de la commission, à vous, madame la ministre, à la grande qualité d'écoute et d'ouverture dont vous avez fait preuve, un pas décisif a été franchi en faveur de l'épanouissement des jeunes ultramarins.

À l'occasion de la discussion en commission des affaires sociales, deux amendements issus des travaux de la délégation aux outre-mer ont été adoptés à l'unanimité. Ils prévoient d'expérimenter la possibilité, pour un jeune, d'exécuter pour une année son contrat d'apprentissage ou de professionnalisation à l'étranger ou dans son environnement régional. Pour nos jeunes, cette mesure constitue une véritable chance de découvrir leurs bassins régionaux et d'acquérir des compétences, tant personnelles que professionnelles.

Cette réussite commune grandit le travail parlementaire et permet, pas à pas, de faire reconnaître les spécificités de nos territoires. Afin d'aller plus loin, madame la ministre, vous avez formulé pendant les travaux en commission une proposition sur laquelle je souhaite revenir. Si j'admets que le recours aux ordonnances est, dans le contexte actuel et pour atteindre notre objectif, une solution pragmatique que nous avons approuvée sur son principe, je me dois également de souligner que pour un parlementaire, ce recours n'est jamais anodin ni sans risque. Cette concession – car c'est bien de cela qu'il s'agit quand un parlementaire renonce à son pouvoir législatif – doit être accompagnée de certaines garanties.

Aussi, madame, j'en appelle aujourd'hui à cette responsabilité dont vous avez toujours su faire preuve, à votre sens du dialogue et de la co-construction afin que je puisse, en ma qualité de co-rapporteure pour la délégation aux outre-mer, être associée à l'élaboration de ces ordonnances.

Avant qu'il en soit question, de nouveaux amendements issus des travaux de la délégation aux outre-mer vous seront présentés pour poursuivre et affiner la nécessaire adaptation de ce texte à nos réalités et à nos particularités.

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