Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du lundi 11 juin 2018 à 16h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

C'est mieux que de parler de « communication » pour faire passer cela pour autre chose. Il n'y a pas de vérité – vous le savez depuis l'échec de la proposition de loi sur les fake news. En politique, on essaie de convaincre ; c'est donc de la propagande.

S'agissant du travail détaché, il n'est pas vrai que nous ayons obtenu une grande victoire, puisque les cotisations sociales continuent à être payées dans le pays d'origine. Par conséquent, le travail détaché continue à faire peser la même menace sur la Sécurité sociale dans notre pays. Sur certains plans, ce qui a été décidé à l'échelon européen représente même un recul – nous expliquerons pourquoi. Au demeurant, il faudrait que l'on finisse par s'habituer à l'idée que ce n'est pas la directive Bolkestein qui a inventé le fait que des travailleurs d'un pays aillent travailler dans un autre ; avant la directive de 1996, il y avait déjà des gens qui allaient travailler dans un pays ou dans un autre, mais cela se faisait sur d'autres bases, c'est-à-dire qu'ils payaient leurs cotisations sociales à l'endroit où ils arrivaient, et ils ne pouvaient pas être embauchés à d'autres conditions que les gens du coin. Ce que la directive a inventé, c'est que l'on pouvait être moins payé, ou payé autrement, ou dédommagé d'une façon ou d'une autre. Avant la directive, rien de tout cela n'existait – si bien que nous avons passé notre temps à rectifier les conséquences d'un texte qui est, nous le disons depuis le début, malfaisant.

J'en arrive au chapitre sur le handicap au travail. Sur ce sujet, la situation est devenue extrêmement tendue. Toutes les associations du secteur sont vent debout contre la révision à la baisse de l'objectif en matière d'accessibilité du logement, qui est passé de 100 % à 10 %. Personne n'a rien compris à cette décision. Pour ma part, j'ai compris non seulement que cela pouvait être traumatisant pour ceux qui l'avaient apprise, mais surtout que c'était une erreur terrible pour ce qui est de la relance de l'activité économique. L'objectif d'un taux d'accessibilité de 100 % représentait un budget de presque 10 milliards d'euros. Ces 10 milliards n'auraient pas pu être délocalisés, parce que les plans inclinés, les rampes, les ascenseurs et autres moyens d'accès ne peuvent pas être fabriqués à Hong Kong ou à Shanghai – à supposer que l'on continue à produire à l'extérieur, j'y reviendrai.

Ceux qui se sont rendus coupables d'une telle décision peuvent difficilement être crus lorsqu'ils prétendent qu'ils vont améliorer la situation. Vous aurez essayé – je ne vais pas vous prêter de mauvaises intentions, ce n'est pas mon sujet – , mais cela ne répond pas aux besoins. La loi est la loi et elle doit être appliquée, un point c'est tout. Or elle n'est pas respectée. Il faut donc punir ceux qui ne la respectent pas. Plus ils sont endurcis dans leurs errements, plus il faut les punir sévèrement. Il faut aggraver les sanctions, pour qu'il leur en cuise de ne pas respecter la loi et qu'ils le sachent à l'avance. La meilleure des incitations à la vertu, c'est de punir le vice.

L'assurance chômage est un sujet autrement plus structurant pour le représentant de cette suite du mouvement ouvrier que je suis, par ma tradition, mon âge et les responsabilités que j'ai exercées. L'assurance chômage, c'est quelque chose qui est venu du mouvement ouvrier. À toutes les époques, le patronat a versé de grosses larmes sur cette initiative qui allait le ruiner, qui allait détruire l'économie et le reste, avant que cela ne soit intégré à la Sécurité sociale.

L'assurance chômage est d'abord une assurance. Or vous avez décidé, dans la dernière de loi de finances, de la transférer vers la contribution sociale généralisée, la CSG. Vous revenez sur le sujet une deuxième fois. Pourquoi pas ? Vous pouvez le faire une troisième, et même autant que vous voudrez, cela n'enlèvera rien à votre point de départ, qui est aberrant, et même condamnable. Toutes ces inventions du mouvement ouvrier étaient gérées par les travailleurs eux-mêmes avant qu'on ne décide, pour des raisons aisément compréhensibles, de donner leur gestion en partage avec les employeurs et avec l'État et, dorénavant, de la confier tout entière à l'État, et cela au prix d'une aberration, puisque la CSG est payée par tout le monde, y compris les retraités. Autrefois, ce qui relevait de l'assurance était payé par ceux qui s'assuraient. C'était logique : je m'assure contre le chômage quand je suis au travail.

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