Intervention de Jean-Michel Blanquer

Séance en hémicycle du jeudi 14 juin 2018 à 21h30
Liberté de choisir son avenir professionnel — Article 10

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale :

Notre approche de l'orientation est pragmatique parce qu'elle est bienveillante pour les élèves et que nous ne nous payons pas de mots. Il n'est pas normal qu'aujourd'hui les CIO soient dans des situations aussi hétérogènes. Nous devons examiner ce qui se passe au cas par cas.

Qu'y a-t-il de si étrange dans l'idée de ramener les conseillers d'orientation au plus près des élèves ? A ceux qui m'opposent que les CIO reçoivent toutes sortes de publics, je réponds qu'il existe déjà suffisamment d'institutions, sous la responsabilité notamment du ministère du travail, en charge de l'orientation et de l'accompagnement des chômeurs et de toutes sortes de publics, pour ne pas avoir en plus à demander à des personnels scolaires, qui ont déjà du mal à suivre l'ensemble des élèves, d'assurer des missions autres que scolaires.

Il est urgent aujourd'hui de remettre les professionnels de l'orientation devant les élèves, mais on doit bien entendu agir avec pragmatisme étant donné la très grande hétérogénéité des situations. Vous avez cité l'Hérault, madame la députée, qui compte, il me semble, huit CIO et non pas sept. Ces huit CIO sont autant de cas particuliers, certains dépendant des départements, d'autres de l'État, le tout dans une certaine confusion et au prix d'une certaine inefficacité. Je défie quiconque de me dire que le système actuel est efficace et je pense que nous devrions unanimement reconnaître qu'il faut changer les choses.

C'est ce que cet article commence à faire, même s'il ne concerne pas les CIO, qui ne sont pas notre sujet ce soir. Je profite cependant de cette tribune pour rassurer chacun. J'ai en effet parfois l'impression que les critiques qui nous sont adressées sur cette question ont surtout pour objectif d'inquiéter. Cela me semble porter préjudice à ceux qu'on prétend défendre plutôt que de les conforter.

Face à cela je voudrais affirmer la vision qui est celle du Gouvernement sur cette question de l'orientation. L'orientation n'est jamais, ou très rarement, un miracle instantané – à l'instant t, devant une personne y. C'est un continuum dans le temps et un travail d'équipe dans l'espace.

C'est un continuum dans le temps parce que c'est un travail qui commence dès la sixième pour se poursuivre jusqu'à la terminale et au-delà – d'où les liens à établir avec l'enseignement supérieur – sur les processus de choix de l'élève. Bien entendu, vous l'avez dit et on ne peut qu'être d'accord, les choix évoluent, en fonction des expériences et des erreurs des élèves, et il faut évidemment en tenir compte. C'est sur ce continuum que nous allons travailler, à partir de l'existant.

Et puis il y a un travail d'équipe. De ce point de vue, ce qui va être très important dans les temps à venir ce sera la façon dont nous formerons les professeurs et les professionnels de l'orientation sur ces sujets. Car cela concerne aussi les professeurs, voire l'ensemble des adultes qui encadrent les élèves.

Il faut souligner que les textes reconnaissent déjà une responsabilité des professeurs principaux en matière d'orientation des élèves. C'est tellement vrai que cette année, nous avons voulu un second professeur principal en terminale, afin de mener à bien la réforme Parcoursup. Cela a été unanimement considéré par les élèves et leur famille comme un progrès considérable, parce que cela a permis un accompagnement au plus près des élèves – non pas que ces professeurs aient été détenteurs de toute la science de l'orientation : juste parce que l'accompagnement humain est nécessaire.

Vous avez évoqué les coaches privés madame la députée : permettez-moi de vous dire qu'ils n'ont pas attendu Parcoursup et que notre stratégie a précisément pour but de mettre fin à ce phénomène qui en effet favorise les inégalités. Il ne s'agit pas d'interdire le recours aux coaches privés – nous sommes en démocratie – mais il faut que le service public d'orientation soit à la hauteur. C'est précisément faute d'une orientation satisfaisante que le phénomène que vous décrivez se développe depuis des années.

Nous avons besoin de rechercher « avec pragmatisme », pardon d'insister, les moyens d'associer beaucoup plus fortement l'État et les régions pour améliorer l'information. C'est l'objet de cet article 10.

Il s'agit surtout d'amorcer un processus, car nous pourrons tous en reparler au cours des prochains mois, de façon très constructive. C'est d'ailleurs un message que j'adresse à l'ensemble des personnels concernés : nous pouvons construire quelque chose d'intéressant dans ce domaine. Je suis d'ailleurs frappé au cours de mes visites de terrain, par exemple en Haute-Savoie récemment ou dans l'Aisne demain, de voir que dès qu'on parle de ces questions de façon posée on trouve des solutions.

Il ne sert à rien d'exaspérer les esprits. Il faut simplement être clair sur le diagnostic – ça ne va pas – et sur le chemin à emprunter. C'est ce que cet article commence à faire.

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