Intervention de Isabelle Rauch

Séance en hémicycle du jeudi 5 juillet 2018 à 15h00
Protocole contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Rauch :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, chers collègues, il nous est proposé aujourd'hui d'approuver l'adhésion au protocole contre la fabrication et le trafic illicites d'armes à feu, de leurs pièces, éléments et munitions, additionnel à la convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, adopté le 31 mai 2001 par les Nations Unies. Son objectif est de prévenir et de combattre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu.

On est en droit de s'interroger sur les obstacles techniques ayant empêché qu'il soit ratifié plus tôt, notamment les moyens budgétaires et humains nécessaires à la mise en oeuvre des procédures de contrôle prévues par le texte. Ces obstacles techniques, le Gouvernement les a levés !

Aussi, j'insisterai dans un premier temps sur le contexte dans lequel le processus d'adhésion a été débloqué par l'État français, avant de replacer le protocole dans la démarche globale et volontariste de notre pays visant à lutter contre la dissémination des armes légères et de leurs munitions. « 2015 [… ] année des plus grands drames et de la première réponse de l'État, de la dure concrétisation des menaces jusqu'alors latentes » : c'est par cette phrase de Claire Landais, extraite de la présentation du rapport d'activité du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, que j'ouvrirai mon propos. En effet, c'est à la suite des attentats terroristes des mois de janvier et novembre 2015 que l'adhésion de la France au présent protocole a été relancée.

Les trafics d'armes classiques constituent une menace pour la paix et la stabilité internationales ainsi que pour la sécurité des États. Ces flux illicites, dont souffrent toutes les régions du globe – Moyen-Orient, Balkans, Europe de l'Est, Afrique subsaharienne, Amérique Latine, Caraïbes – alimentent les conflits mais également la criminalité organisée et le terrorisme international.

Les armes légères et de petit calibre – ALPC, pour les connaisseurs – qui nous intéressent aujourd'hui sont au coeur de ce trafic, car elles sont faciles à utiliser, à transporter et à dissimuler, et leurs munitions également. Comme l'a rappelé notre rapporteur au mois de mai dernier lors de l'examen du projet de loi en commission des affaires étrangères, il est avéré que « les attentats de novembre 2015 ont été commis avec des armes issues de trafics en provenance des pays de l'Est ». D'ailleurs, les chiffres sont là. D'après les Nations Unies, entre 40 % et 60 % du commerce des armes légères est illicite à un moment ou à un autre. Pour mémoire, ces armes feraient 500 000 victimes par an.

Aussi, même si la France a pris du retard dans l'adoption du protocole, on doit à présent se féliciter de toutes les initiatives soutenues par notre pays, notamment l'adoption de l'Instrument international de traçage, l'élaboration d'un guide des meilleures pratiques pour prévenir les transferts déstabilisants d'armes légères et de petit calibre par la voie du transport aérien et, en 2018, l'élaboration d'un guide des bonnes pratiques sur la neutralisation des armes légères et de petite calibre par l'OSCE, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

Surtout – et je conclurai sur ce point – , la France vient de présider la troisième conférence d'examen du Programme d'action des Nations Unies sur les armes légères et de petit calibre, qui s'est déroulée à New York du 19 au 28 juin. Y ont été adoptés une déclaration politique et surtout un plan d'action opérationnel ainsi qu'un calendrier de réunions pour les six années à venir. Ces nouveaux engagements doivent permettre de lutter plus efficacement encore contre le commerce illicite d'armes à feu aux niveaux national, régional et global.

S'il existe de nombreux instruments internationaux visant à prévenir et à lutter contre la dissémination, l'accumulation excessive et les flux illicites d'armes légères et de petit calibre, le présent protocole constitue l'unique accord international juridiquement contraignant visant spécifiquement à contrôler les armes à feu et à lutter contre les trafics illicites. C'est pourquoi, dans le contexte actuel de mondialisation et de persistance d'un risque terroriste élevé, je vous invite, mes chers collègues, à approuver l'adhésion de la France à ce protocole fondamental pour la sécurité de notre pays et du monde.

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