Intervention de Hervé Marseille

Séance en hémicycle du lundi 9 juillet 2018 à 15h00
Débat sur la déclaration du président de la république

Hervé Marseille :

Par-delà même le bilan législatif du chef de l'État, il y a un troisième élément que nous mettons à son crédit. Avec lui, nous avons gagné en incarnation internationale. La France retrouve une place. Elle suscite de nouveau l'écoute et le respect de nos partenaires étrangers, ainsi que l'intérêt et la confiance des investisseurs. Et l'embellie de la conjoncture économique nous permet enfin de rentrer dans les critères budgétaires européens. Le quinquennat a donc plutôt bien commencé.

Si bien et si vite, d'ailleurs, qu'il semble déjà s'essouffler. « Et maintenant ? » sommes-nous tentés de demander. Après un an d'exercice du pouvoir, l'exécutif semble avoir brûlé une bonne partie de ses vaisseaux. C'est là que nous entrons dans la terre inconnue. En réunissant aujourd'hui le Congrès, le Président a voulu nous rassurer sur le sens de son action. Il vient d'assigner au Gouvernement de nombreux objectifs.

Néanmoins, les signes d'un essoufflement prématuré du quinquennat sont nombreux, trop nombreux pour être passés par pertes et profits.

Nous partageons la volonté du Gouvernement d'améliorer les conditions des plus démunis, en luttant d'abord contre le chômage. Oui, on ne réduira la précarité et les inégalités qu'en relançant l'économie, en augmentant le taux d'emploi et en améliorant l'efficacité du système éducatif. Cette stratégie a pourtant des limites. La restriction du périmètre de l'ISF, l'instauration de la flat tax, la suppression de l'exit tax, la baisse de l'impôt sur les sociétés, l'augmentation de la CSG sur les retraites, voire la baisse des aides au logement sont autant de mesures qui ont pu nourrir l'inquiétude sociale.

Mais la critique n'est pas que sociale, elle est aussi territoriale, plusieurs orateurs l'ont dit avant moi. Après la baisse des dotations, la suppression de la taxe d'habitation et de 120 000 contrats aidés, la fermeture de classes de primaire dans les campagnes, sans parler des craintes qui subsistent sur le maintien des petites lignes ferroviaires, c'est peu de dire que les territoires ruraux se sentent les victimes de ce début de quinquennat. Cela a été souligné à différentes reprises.

Au terme de la révision constitutionnelle, même la représentation des territoires sera minorée. Dans cet hémicycle, près de 280 sièges auront disparu : ils ne seront plus occupés.

Même d'un point de vue législatif, la dérive est perceptible. Après les textes intéressants que j'ai mentionnés, nous arrivent des propositions de loi creuses, par exemple sur la manipulation de l'information – les fake news –, le téléphone portable à l'école ou encore les annonces décevantes et retardées sur l'audiovisuel.

Faut-il s'étonner de cet essoufflement ? Non, parce que la machine est en surchauffe car le Gouvernement s'est attaqué à trop de sujets simultanément. De ce point de vue, le nombre de textes qui viennent de nous être proposés ne refroidira pas la machine gouvernementale.

Mais aussi parce que tout semble remonter au sommet de l'État. Or, quand tout remonte, il y a thrombose. C'est d'ailleurs la seule ligne de force qui se dégage de l'ensemble de l'action gouvernementale, celle du renforcement de la concentration. Quand on touche au paritarisme, quand on restreint les moyens des collectivités locales et quand on diminue la représentation parlementaire, que fait-on, si ce n'est recentraliser le pouvoir ?

Le fait que demain, après la réforme constitutionnelle, il y aura plus de membres du corps préfectoral que de parlementaires, donc plus de représentants de l'État que d'élus, devrait nous interpeller.

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