Intervention de Nicolas Turquois

Séance en hémicycle du mercredi 12 septembre 2018 à 21h30
Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l'agriculture, nous le savons bien, est un sujet majeur pour notre pays, qui est une puissance agricole importante de l'Union européenne, avec 27 millions d'hectares de surface agricole, soit près de la moitié de la superficie du territoire. L'agriculture est au coeur de l'identité française. Ce projet de loi, dont nous débattons de nouveau cette semaine, est donc un texte important pour notre pays et notre économie, d'autant qu'il traduit une véritable volonté de transition : inverser la logique de construction des prix afin de mieux rémunérer les agriculteurs.

Mers chers collègues, la position du groupe MODEM et apparentés n'a pas varié : nous souhaitons qu'aux termes de nos débats soit adoptée une loi incitative et réellement efficiente, et non une loi punitive et inapplicable. Il importe d'emmener, avec nous, les agriculteurs, sans jeter l'opprobre sur leurs pratiques, qui ont leur histoire et leurs raisons. Nous défendons, depuis le début des discussions sur ce projet de loi, des temps d'adaptation et le renforcement du rôle des interprofessions. La recherche de la performance économique et environnementale doit s'inscrire dans une démarche de filières.

Nous voulons à tout prix éviter l'écueil, facile, de la surtransposition. Nous préférons à celle-ci la simplification des normes, afin d'alléger les contraintes qui pèsent sur nos producteurs. Nos demandes s'accordent avec des exigences importantes en matière de protection animale et environnementale. Nous avons le devoir, en tant que parlementaires, de renouer le lien fortement fragilisé entre une agriculture modernisée et compétitive et une agriculture respectueuse de l'environnement. C'est un des objectifs du texte.

Je salue donc toutes les avancées réalisées sous l'impulsion du rapporteur, Jean-Baptiste Moreau, et du ministre. Je pense notamment à la prise en compte des indicateurs de coûts de production et non plus seulement des indicateurs d'évolution des coûts, à la sécurisation de la contractualisation en cascade conformément aux états généraux de l'alimentation, ou au renforcement du rôle du médiateur et de l'Observatoire de la formation des prix et des marges. Toutefois cette loi, mes chers collègues, ne sera une réussite que si tous les acteurs concernés s'y retrouvent. Il importe, pour le bien-être de nos agriculteurs et la vitalité de notre agriculture, de confirmer les avancées votées en mai et de respecter les équilibres établis durant les ÉGA.

Je pense notamment à deux dispositions dont le groupe MODEM, par la voix de Richard Ramos, a été à l'origine et qui ont été adoptées en première lecture. La première a pour objectif d'empêcher les acheteurs de pénaliser, de façon disproportionnée, les retards de livraison, artifice dont l'objectif pourrait être de contourner l'article 1er et de compenser les prix fixés contractuellement. La seconde est relative à l'injonction du président du tribunal de commerce adressée à l'encontre des sociétés récalcitrantes à déposer leurs comptes.

Si le travail parlementaire a permis un véritable enrichissement et approfondissement du texte, il est nécessaire de maintenir ces avancées, d'autant que ce projet de loi doit également s'inscrire dans un soutien d'ensemble à notre agriculture, afin de renforcer la profession et la faire gagner en compétitivité. Sans agriculture viable économiquement, il n'y aura ni circuits courts, ni productions diversifiées, ni cette qualité de paysage que nos concitoyens plébiscitent. C'est pourquoi je profite de cette tribune, monsieur le ministre, pour appeler votre attention sur la disparition annoncée du TO-DE – travailleurs occasionnels demandeurs d'emplois – , dispositif qui prévoit des exonérations de cotisations sociales patronales pour les employeurs de saisonniers, main-d'oeuvre irremplaçable durant les périodes de récoltes.

Le travail saisonnier est d'abord un lien formidable entre l'agriculture et la société. Combien d'entre nous ici, alors étudiants, ont ramassé des pommes, des melons ou des fraises, castré du maïs, cueilli des cocos de Paimpol, fait les vendanges ou participé à je ne sais quels travaux agricoles ? C'est, en matière de travail, un premier pied à l'étrier, dont on se souvient toute sa vie. C'est aussi un complément de revenu essentiel pour les étudiants et, souvent, pour nombre de foyers, notamment pour les femmes dans des zones où trouver du travail n'est pas toujours chose aisée.

La suppression de cette exonération menace la vitalité de nombreuses exploitations, car le coût de la main-d'oeuvre est déterminant dans ces productions. Vous avez évoqué aujourd'hui, monsieur le ministre, lors des questions au Gouvernement, une perte de 60 millions d'euros pour la ferme France entre la suppression du dispositif TO-DE et la transformation du CICE en réduction de charges pérennes. Cette perte, je tiens à le souligner, est non pas pour la ferme France mais pour les quelques milliers d'exploitations qui embauchent des saisonniers.

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