Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du mardi 25 septembre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Cette idée a été mise en oeuvre dans toute sorte de pays. Encore récemment, un gouvernement de droite, au Brésil, a créé un dépôt de garantie : si vous arriviez dans le pays et que vous investissiez mille, il fallait laisser cinquante en dépôt – que vous ne reverriez plus si vous fichiez le camp avant trois ans. C'était une manière d'obliger le capital à s'investir durablement.

Cette idée de limiter les droits de vote en fonction de la durée d'un investissement n'est pas née dans un colloque gauchiste : c'est l'ancien grand patron de Saint-Gobain qui le proposait. Car les grands capitaines d'industrie de cette période ont vu les appareils de production détruits sous leurs yeux par la financiarisation ! Des gens arrivent, qui n'ont aucun intérêt dans une boîte, qui ne savent même pas ce qu'elle produit, des fonds de pension, des mutuelles, ou je ne sais quoi… Mais oui, c'est comme cela que ça se passe, vous connaissez bien ces métiers, chers collègues ! Et ces gens décident, en fonction de la rentabilité, s'ils laissent l'argent, s'ils le retirent, s'ils posent des conditions absolument drastiques au personnel qui gère l'entreprise pour obtenir des taux de profit de plus en plus élevés, s'ils récupèrent sur la trésorerie l'argent qu'ils ont emprunté pour faire un LBO, et tant d'autres merveilles de ce que l'on ose appeler l'industrie financière et qui, à nos yeux, est un pur et simple pillage...

Corréler les droits de vote dans les entreprises privées à la durée de l'investissement est une mesure de définanciarisation. Interdire qu'une entreprise distribue plus en dividendes que ce qu'elle a amassé dans l'année est une mesure de définanciariation. Cela leur interdirait d'emprunter pour verser des dividendes lorsqu'elles ne peuvent pas les prendre sur leurs excédents, ce que certaines entreprises ont dû faire dans notre pays uniquement parce qu'elles avaient la trouille du fonds de pension qui les tenait à la gorge.

Voilà encore une proposition concrète : vous voyez que je ne suis pas en train de vous parler de collectiviser ou de nationaliser tout le capital ! Je vous parle de faire avec le capital ce que l'on fait avec toutes les libertés. Il n'y a pas une liberté qui soit absolue : toutes les libertés sont encadrées. Et c'est parce qu'elles sont encadrées qu'elles sont des libertés, sans quoi c'est la loi du plus fort. Il faut encadrer la liberté du capital, en particulier du capital financier.

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