Intervention de Bruno le Maire

Séance en hémicycle du vendredi 19 octobre 2018 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Article 12

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

Je me réjouis par ailleurs que nous ayons un accord, sur quasiment tous les bancs, quant à la nécessité d'aller vers ce régime d'intégration fiscale et de le toiletter.

Monsieur Carrez, mon objectif n'est aucunement de rouvrir le passé, mais il m'est arrivé à deux reprises, en tant que membre du Gouvernement, d'avoir à payer les pots cassés. Sans mettre quiconque en cause – car je sais parfaitement que vous êtes probablement, avec Charles de Courson, celui qui, dans cet hémicycle, a le plus souvent donné l'alerte sur les risques de non-respect de nos engagements européens – , je rappellerai que je me suis trouvé dans cette situation à propos de la taxe de 3 % sur les dividendes et, dans une vie encore plus lointaine, lorsque j'étais ministre de l'agriculture, lorsqu'il m'a fallu récupérer les plans de campagne des subventions accordées illégalement aux producteurs de fruits et légumes, en particulier en Bretagne.

C'est toujours très douloureux, et cela abîme beaucoup les responsables politiques, de devoir expliquer à nos concitoyens qu'on leur avait fait des centaines de millions d'euros de cadeaux fiscaux sans leur dire que c'était complètement illégal, et qu'il faut maintenant récupérer l'argent – et que ce sont eux qui vont payer. C'est désastreux pour nous tous ici. Mieux vaut avoir le courage de dire les choses avant, clairement et franchement, comme M. Coquerel a l'amabilité de reconnaître que je le fais à propos de mes propres positions politiques.

Pour ce qui est ensuite du taux de quote-part pour frais et charges, je pense que nous avons trouvé, grâce au rapporteur général et aux travaux d'Émilie Cariou, un point d'équilibre avec un taux de 5 % pour les groupes qui sont intégralement intégrés fiscalement et de 12 % pour ceux qui ne le sont pas.

Si j'ai réagi avec vivacité – et je reconnais que je suis sur la même ligne que le président de la commission des finances – , c'est parce que nous sommes dans un marché unique européen où nous avons des compétiteurs, qui sont en particulier les grandes entreprises allemandes, mais aussi les entreprises italiennes, espagnoles et belges. Je me contenterai de citer des chiffres : en Belgique, aux Pays-Bas, en Espagne et dans cinq autres pays d'Europe, la quote-part pour frais et charges est de 0 %. En Allemagne, pour tous les groupes, qu'ils soient fiscalement intégrés ou non, elle est de 5 %. Les parlementaires qui prennent aujourd'hui la décision doivent savoir qu'ils vont voter un système fiscal dans lequel les groupes français fiscalement non intégrés seront dans une situation fiscalement moins avantageuse que les autres entreprises en Europe.

Je veux également rappeler – car mon seul objectif est, comme vous savez, de créer de l'emploi pour les Français – que ce sont les entreprises qui créeront des emplois et que, si on leur met des boulets aux pieds, elles ne les créeront pas. Je tiens à rappeler aussi l'affaiblissement que connaît, sur le long terme, la compétitivité française. J'apprécie beaucoup le débat avec La France insoumise mais, monsieur Coquerel, nos propositions en la matière sont assurément différentes. Dans le débat politique, mieux vaut être franc et sincère. Je fais, pour ma part, le pari des entreprises, de leur compétitivité et du succès économique français. Or, il n'y aura pas de succès économique français sans le succès de nos entreprises et de nos PME.

En 1995, la France était encore une grande puissance commerciale exportatrice, avec 5 à 10 milliards d'euros d'excédent de sa balance commerciale.

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