Intervention de Jean-Christophe Niel

Réunion du jeudi 11 octobre 2018 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Christophe Niel, directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) :

– Le baromètre IRSN sur la perception des risques et de la sécurité par les Français s'inscrit dans le cadre de notre dispositif d'ouverture à la société et de partage de notre expertise avec les parties prenantes. C'est un moteur de la confiance dans le système. Nous disposons d'autres instruments au service de cette démarche, notamment un contrat d'objectifs et de moyens et une charte, co-signée par d'autres organismes, dont l'ANSES, prévoyant un partage de nos connaissances avec les acteurs. Nous avons également des interactions avec les experts de la société civile, notamment l'Association nationale des commissions locales d'information (ANCLI). L'ouverture à la société est un facteur à part entière de qualité de l'expertise. L'objectif de l'IRSN n'est pas de dire aux Français ce qu'ils doivent penser, mais de leur permettre de se faire une opinion.

Publié depuis près de trente ans, le baromètre de l'IRSN retrace les évolutions de l'opinion des Français sur les risques sociaux, environnementaux et technologiques et mesure les attentes des Français à l'égard de la gouvernance des risques, la transparence et la diffusion de l'information. Au total, nous avons couvert deux mille questions. Ce travail nous permet en particulier, bien sûr, de mettre en perspective la perception du risque nucléaire, premier objectif de l'IRSN.

Ce baromètre se divise en quatre parties, respectivement consacrées aux préoccupations actuelles des Français, à leur regard sur l'expertise, aux situations à risque qui les préoccupent, et à la perception du risque nucléaire. La plupart des questions sont reconduites d'année en année, mais nous en introduisons aussi de plus spécifiques, liées à l'actualité, comme l'accident de radiothérapie d'Épinal, l'accident de Fukushima, l'épidémie du virus Ebola ou encore la COP21.

L'enquête est basée sur un échantillon représentatif d'un millier de personnes et conduite par des instituts spécialisés, sous la forme d'un entretien au domicile d'une durée de quarante minutes. Il s'agit de repérer les grandes tendances, de resituer les résultats dans leur contexte, de les mettre en perspective avec d'autres enquêtes et de formuler des hypothèses. Depuis deux ans, les données brutes des enquêtes sont mises en ligne et accessibles à tous ceux qui voudraient réaliser des calculs, croisements, etc. La présente enquête a été conduite en novembre 2017. Les sujets majeurs de préoccupation étaient le terrorisme, le chômage, la misère et l'exclusion. L'environnement arrive légèrement derrière.

Les Français conservent une bonne opinion des experts et sont avant tout attachés à leur indépendance et à la transparence de leurs travaux. La qualité première attendue d'un expert est la compétence.

La perception du risque et la confiance se dégradent dans les domaines des perturbateurs endocriniens, des produits alimentaires et des centrales nucléaires – peut-être à cause de l'épisode de rejet de ruthénium survenu il y a environ un an, probablement en provenance du Sud de l'Oural ou de la Volga. La perception de la compétence et de la crédibilité des acteurs de la gestion du risque nucléaire est en baisse tendancielle depuis 2008.

Prenons quelques exemples tirés du baromètre de l'expertise. Plus de 75 % des personnes interrogées sont d'accord ou peut-être d'accord avec l'affirmation : « Le développement de la science et des technologies génère plus de bénéfices que d'effets néfastes ». Dans les réponses à la question « Quelles sont pour vous les deux principales qualités d'un expert scientifique ? », la compétence arrive en tête, suivie de l'indépendance de jugement, qui prend de l'importance. La déclaration de liens d'intérêt avec les industriels ne recueille que 15 % des réponses. Plus de la moitié des sondés ont une bonne ou très bonne opinion de la science et des experts.

Les Français attendent des experts de la transparence, par la mise à disposition du public d'une information compréhensible ou une présentation des points de désaccord. Ils veulent une information non « édulcorée » qui leur permette de construire leur propre opinion en amont des décisions. Pour 62 % d'entre eux, il est prioritaire qu'un organisme d'expertise rende publics ses rapports de recherche ; 57 % jugent prioritaire qu'un organisme d'expertise s'engage à répondre à toutes les questions posées par les associations de citoyens ; 70 % préfèrent avoir accès aux dossiers pour construire eux-mêmes leur expertise. Enfin, plus de 90 % jugeraient utile une structure réunissant experts scientifiques, décideurs politiques, industriels, associations et citoyens pour la gestion de risques afin de mieux identifier les risques et de contribuer à les réduire.

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