Intervention de Claude de Ganay

Séance en hémicycle du vendredi 2 novembre 2018 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude de Ganay, rapporteur pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées :

… avec une augmentation de 7 % des crédits de paiement hors titre II par rapport à l'an dernier. Peu de rapporteurs pourront en dire autant à propos de leurs programmes. Il convient cependant de souligner qu'une partie substantielle de cette hausse – 200 millions d'euros – est affectée au financement des surcoûts des opérations extérieures et intérieures. Si cet effort de « sincérisation » est nécessaire, il faut bien constater qu'il ne bénéficiera pas à nos soldats. Or, vous le savez, madame la ministre, votre action sera jugée non pas sur les chiffres annoncés mais sur la concrétisation de votre promesse d'améliorer le quotidien du soldat.

À ce titre, on peut sentir une certaine impatience chez les personnels civils et militaires des armées, car la mise en oeuvre concrète de la rénovation de logements comme du plan famille se fait attendre. Chemin faisant, les promesses du Gouvernement risquent fort d'être déçues, et les défis de l'attractivité et de la fidélisation de nos armées pourraient ne pas être relevés. Nous ne pouvons pas nous permettre une telle issue.

Je souhaiterais évoquer un sujet spécifique : l'externalisation des soutiens. Celle-ci connaît depuis plusieurs années un fort développement et pourrait s'accroître encore dans les domaines de la restauration et de l'habillement. Or la procédure actuelle souffre de plusieurs dysfonctionnements, auxquels il faudrait remédier : la fragilité du cadre juridique, les défaillances du contrôle interne et externe, et la persistance de certaines pratiques d'entente entre des pouvoirs prescripteurs et des candidats, notamment dans le domaine du MCO des parachutistes. À ce stade, mes constats restent partiels. Ils mériteraient d'être approfondis dans le cadre d'une mission d'information, dont je souhaite la création. Sans se limiter à l'externalisation, cette mission pourrait même être étendue à d'autres secteurs du soutien au sujet desquels nos militaires ont de fortes attentes, comme l'habillement, le logement, les infrastructures ou l'alimentation. Plus largement, « repatrimonialiser » – pardonnez-moi le terme – certaines capacités permettrait à nos armées de retrouver des capacités propres. Sur le plan du contrôle parlementaire, il serait pertinent d'identifier un responsable budgétaire chargé de rendre compte de manière globale de ce pan des soutiens.

Au demeurant, je regrette que les conditions dans lesquelles s'effectue ce contrôle ne soient pas toujours optimales. Les délais de livraison effective de la documentation demandée aux services du ministère, les nombreuses relances effectuées par les services de l'Assemblée, l'inadéquation entre les documents livrés et l'expression des besoins sont autant de problèmes qui semblent participer d'un ancien monde dont on me dit pourtant qu'il est enterré…

Je souhaite finir sur une note positive, madame la ministre, en saluant l'action d'un service qui reste relativement méconnu : celui des essences des armées. De par son activité de soutien pétrolier, il est l'un des garants de l'autonomie des forces armées. Le SEA est un service à l'égard duquel la France peut légitimement éprouver un sentiment de fierté.

Je l'illustrerai par deux exemples. En 2013, l'opération Serval n'aurait pu être possible sans la réactivité du soutien pétrolier, qui permet cette capacité d'entrée en premier sur un théâtre. Actuellement, dans un tout autre cadre, le SEA assure une partie de l'approvisionnement pour l'exercice de l'OTAN – l'Organisation du traité de l'Atlantique nord – qui se déroule en Norvège. C'est dire combien il est respecté par nos alliés, aux yeux desquels il fait figure de modèle.

Je souhaite donc saisir l'occasion qui m'est ici donnée de rendre hommage aux personnels du SEA, qui prennent des risques considérables pour approvisionner nos armées au plus près du champ de bataille. Je vous ferai néanmoins part d'une inquiétude quant à l'état de sur-engagement de ce service. En sept ans, concomitamment à l'augmentation du niveau d'engagement de nos armées, le SEA a perdu plus de 12 % de ses effectifs. La LPM, qui prévoit la création de seulement quinze personnels d'ici à la fin du quinquennat, semble donc commettre une erreur de diagnostic sur ce point. J'espère qu'il ne faudra pas une rupture d'approvisionnement grave pour se rendre compte que les efforts demandés à ce service ont été beaucoup trop élevés. Aussi, je vous le demande, n'oubliez pas le SEA ; donnons-lui les moyens de poursuivre son action déterminante auprès de nos armées.

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