Intervention de Caroline Fiat

Séance en hémicycle du jeudi 8 novembre 2018 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Fiat :

Madame la ministre, mesdames et monsieur le rapporteur, après le financement de la sécurité sociale, nous nous penchons aujourd'hui sur celui des missions « Santé » et « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Concernant la mission « Santé », vous nous assurez, madame la ministre, que votre politique est centrée sur la prévention. Pourtant, les crédits dédiés à celle-ci baissent en moyenne de 1,1 % par rapport à 2018, que ce soit en matière d'environnement, d'alimentation ou encore de maladies chroniques.

Pour justifier ces baisses, vous nous promettez un changement de paradigme, mais nous l'attendons toujours. La tarification au forfait, qui n'est pas encore en place, ne concerne que deux pathologies. Vous fragilisez donc l'édifice de notre politique de prévention avant même d'en avoir construit un nouveau.

Autre sujet de préoccupation majeure, en matière de médicament, vous faites une fois de plus le choix de l'opacité et du laisser-faire. Le contexte est particulièrement grave. En 2017, on a signalé 530 pénuries de médicaments, alors qu'il n'y en avait eu que 44 en 2008. Cette hausse spectaculaire est très inquiétante. Comme l'explique le rapport d'information sur la pénurie de médicaments et de vaccins présenté au Sénat au mois de septembre dernier, ces pénuries sont créées artificiellement par les laboratoires pharmaceutiques pour augmenter les prix. Pourtant, vous continuez d'affaiblir notre « gendarme du médicament », l'Agence nationale du médicament, en diminuant son budget de 5 % ! Avec une telle saignée, comment peut-on espérer faire le poids face aux grands groupes pharmaceutiques lorsqu'un médicament comme le Sofosbuvir, contre l'hépatite C, est vendu 43 000 euros pour douze semaines de traitement alors que son coût de production se situe aux alentours de 100 euros ?

Madame la ministre, mes chers collègues, le mois dernier, le président de l'Ordre des pharmaciens d'Île-de-France s'inquiétait de la pénurie de vaccin BCG. « On risque donc de voir un retour de la tuberculose dans les milieux défavorisés » constatait-il dans Le Parisien.

Dans son programme politique, La France insoumise demande la création d'un pôle public du médicament. Qu'attendez-vous pour faire vôtre cette proposition de bon sens ? Actuellement, 45 000 malades de Parkinson sont sans solution du fait de ces ruptures de stocks. Combien de drames faudra-t-il pour que l'État prenne ses responsabilités et cesse de s'en remettre au chantage des industries pharmaceutiques ?

Revenons sur le cas des victimes de la Dépakine. Quand Sanofi va-t-il enfin payer ? L'an dernier déjà, l'État s'était engagé à hauteur de 78 millions d'euros ; cette année, il renouvelle cet engagement financier. Pourtant, le 25 octobre dernier, vous nous disiez que L'État assumerait lui-même les actions contre les responsables en vue d'un remboursement total ou partiel. Comment se fait-il que les géants de l'industrie pharmaceutique restent impunis lorsqu'ils commettent des fautes d'une telle gravité ?

Pour conclure sur ce volet « santé » du PLF, la purge continue avec une baisse de 5,5 millions d'euros pour le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Pour les outre-mer, les conséquences seront particulièrement douloureuses, car la situation l'est déjà, comme le constate le rapport pour avis, dont je salue la qualité, de Mme Hélène Vainqueur-Christophe. Ces territoires perdront 1,6 million d'euros en 2019, alors qu'ils ont déjà perdu 3,5 millions l'an dernier.

Venons-en à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ! Vous annoncez que l'AAH augmentera de 80 euros d'ici à 2020. Nous serions ravis de voter avec vous cette augmentation, si celle-ci n'était pas de la poudre aux yeux. De nombreuses associations ont pointé du doigt les tours de passe-passe qui rendent votre déclaration mensongère. Ainsi, le gel du plafond de ressources pour les couples exclut environ 100 000 personnes du dispositif, et, en fusionnant deux aides complémentaires à l'AAH, vous faites perdre à des milliers de personnes handicapées environ 50 euros par mois. Cette mesure sera également neutralisée par une absence de revalorisation par rapport à l'inflation en 2019, et par une désindexation en 2020. À terme, toutes les personnes handicapées seront donc perdantes.

Fort malheureusement, ces tours de passe-passe ne s'arrêtent pas là. Ainsi, en même temps que vous prétendez revaloriser la prime d'activité, vous la gelez, ce qui signifie, avec l'effet de l'inflation, que les actifs qui en bénéficient seront perdants. Vous revoyez également le mode de calcul permettant de percevoir cette prime d'activité, révision qui exclut de nombreuses personnes du dispositif. Enfin, cette revalorisation ne concernera pas les travailleurs très pauvres qui touchent moins de la moitié du SMIC.

Pour finir, nous constatons que de nombreux crédits de cette mission sont revus à la baisse. Alors même que l'égalité entre les hommes et les femmes a été déclarée « grande cause du quinquennat », le budget du programme « Égalité entre les femmes et les hommes » perd 500 000 euros si l'on tient compte de l'inflation !

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