Intervention de Philippe Vigier

Séance en hémicycle du lundi 12 novembre 2018 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2018 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vigier :

Il faut de temps en temps essayer de tenir un propos équilibré. Pour autant, je vous ai écouté à plusieurs reprises sur les délais, mais vous ne m'avez pas convaincu. Pardonnez-moi de courir entre la commission des finances et l'hémicycle, où il y a simultanément du travail, surtout la semaine dernière où nous avons examiné les crédits de la mission « Travail et emploi », et de m'interroger sur la possibilité d'étudier ce texte sérieusement. En prévoyant l'examen de ce texte ce lundi, et en anticipant donc que nous n'en discuterions pas au-delà de ce soir, vous nous imposez de légiférer dans des conditions qui ne nous permettent pas de jouer le rôle de vigie lucide et exigeante que notre groupe souhaite jouer.

Ce texte pose pourtant de vraies questions, comme le disait Éric Woerth. Ce matin, une réunion s'est tenue à Matignon sur la fiscalité écologique. Savoir comment nous répondrons demain aux attentes des Français est important, le Président de la République ayant été lui-même interpellé sur ce sujet à de nombreuses reprises la semaine dernière. Il est normal que l'on puisse profiter d'un tel véhicule législatif pour avoir un débat entre nous.

Au moment où l'on songe à réformer la Constitution, il est pratique de galvauder le travail parlementaire. Cela affaiblit, je dis bien « affaiblit », mes chers collègues, l'Assemblée nationale, ce qui n'est pas vu sous le même angle, selon que l'on siège dans la majorité ou dans l'opposition.

Ce serait sans importance s'il ne s'agissait du budget de l'État et si ce genre de pratique n'alimentait pas – je le disais tout à l'heure, et cet argument semblait tomber à plat, mais il n'en est rien – les interrogations de nos compatriotes sur la réalité du travail parlementaire : que penseraient-ils si une caméra de télévision faisait un plan large de notre hémicycle ? Où sont les députés, que font-ils, oui ou non, s'occupent-ils de la France ? , se demanderaient-ils sans doute.

À travers ce mépris du travail parlementaire, ce sont des territoires, où nous sommes élus, et de leurs habitants dont vous vous éloignez. Chacun pourra reconnaître que l'action gouvernementale suscite des doutes, les enquêtes d'opinion montrant combien il est difficile de gouverner.

C'est en faisant partager une vision et un cap, et en associant toutes les forces vives du pays dans une démarche commune, que vous parviendrez à inscrire votre action dans la durée.

Le contenu de ce projet de loi souffre de quelques insuffisances, qui font écho aux critiques de forme, comme bien souvent. Vous procédez à l'ouverture de 402 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement pour le financement des opérations extérieures et des missions intérieures. Il s'agit de l'ouverture de crédits la plus importante de ce projet de loi. Joël Giraud se souvient que j'étais intervenu en commission des finances pour demander pourquoi on ne consentait pas l'effort nécessaire dès la loi de finances initiale, puisque celle-ci sous-finance les OPEX depuis plusieurs années, nous le savons très bien. Il n'y a pas de redéploiement des crédits interministériels du budget de la défense. J'ai entendu les propos de Jean-Louis Bourlanges : très bien, cher Jean-Louis Bourlanges, mais nous avons voté une loi de programmation qui ne prévoyait cette évolution qu'en 2020.

À mes yeux, ce redéploiement pose deux difficultés : la première est qu'en procédant ainsi, on diminue la capacité de notre armée à s'équiper et on ampute l'effort – que j'ai salué à cette même tribune – visant à parvenir à consacrer 2 % du PIB à la défense ; la seconde tient au développement de la politique européenne de défense, qui a fait l'objet d'une parole forte du Président de la République hier, 11 novembre, que je ne cesse de promouvoir ici et dont vous partagez le bien-fondé, me semble-t-il, monsieur le ministre.

J'en viens à une mesure inacceptable à mes yeux, que, j'espère, monsieur le ministre, vous pourrez nous expliquer. Le délai de seulement trois jours laissé pour étudier ce texte a contribué à l'incompréhension de cette mesure. Je veux parler de la fameuse réaffectation de 600 millions d'euros du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » au budget général de l'État. Comment nos compatriotes peuvent-ils comprendre, dans le contexte d'augmentation constante des prix des carburants, qu'il y ait une taxation, sous couvert de fiscalité écologique – que l'on peut comprendre, et je ne conteste pas qu'il faille opérer la transition énergétique – , qui serve à alimenter le budget général ? Cela est d'autant plus dommage qu'un excellent rapport, rédigé par notre collègue sénateur Jean-Claude Luche et dont j'imagine que le rapporteur général a fait son miel,...

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