Intervention de Raphaël Gauvain

Séance en hémicycle du mercredi 11 octobre 2017 à 15h00
Sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRaphaël Gauvain, rapporteur de la commission mixte paritaire :

Pour parvenir à cet accord, j'ai eu de multiples échanges, la semaine dernière, avec le rapporteur du texte au Sénat, M. Philippe Bas, et je veux ici l'en remercier. Au-delà de nos désaccords politiques, il nous semblait essentiel, sur un texte de cette importance, et alors que notre pays est en guerre contre le terrorisme, de pouvoir parvenir à un accord entre les deux assemblées. Un nouvel équilibre a donc été trouvé. Pour ma part, dans le dialogue avec le Sénat, j'ai tenu à ce que le caractère opérationnel du texte issu de nos débats soit conservé, avec le souci de renforcer notre arsenal juridique pour ne pas dégrader l'efficacité des moyens mis à la disposition de nos services dans la lutte contre le terrorisme.

L'accord comporte plusieurs innovations essentielles.

À l'article 1er, nous conservons la précision sur les abords de la menace pour définir le périmètre de sécurité. Il résultait en effet de nos auditions de cet été que cette rédaction était essentielle pour les services de sécurité afin d'assurer l'efficacité opérationnelle de la mesure.

À l'article 2, nous conservons la rédaction issue de nos débats à l'Assemblée pour permettre la fermeture des lieux de cultes, notamment l'emploi des termes « idées ou théorie » et « haine ou [… ] discrimination ». À la demande du Sénat, l'accord propose toutefois un retour au texte initial pour l'incrimination prévue en cas de violation de la mesure de fermeture d'un lieu de culte : six mois de peine encourue au lieu des trois ans proposés par les groupes MODEM et LR de cette assemblée.

À l'article 3, a été actée la suppression de l'obligation, pour une personne soumise à une mesure individuelle de contrôle administratif, de « déclarer les numéros d'abonnement et identifiants techniques de tout moyen de communication électronique ». Cette suppression constituait un point de blocage pour le Sénat, susceptible de faire échouer la CMP. Nous l'avons acceptée, dans la mesure où elle ne porte pas atteinte à l'efficacité des services, ces derniers disposant d'autres moyens pour enquêter en matière de cybercriminalité. Nous conservons toutefois les apports de l'Assemblée à l'article 3 : le pointage une fois par jour au lieu de trois fois par semaine comme demandé par le Sénat ; la limitation dans le temps de la mesure à un an ; l'interdiction de paraître, qui avait été introduite dans le texte par le groupe majoritaire.

À l'article 4, le Sénat souhaitait rétablir l'autorisation du JLD – le juge des libertés et de la détention – en cas de retenue pendant quatre heures de la personne présente sur les lieux. Nous sommes parvenus à un compromis précisant que le JLD doit être informé « sans délai ». Les ajouts de notre assemblée pour renforcer les droits de la personne retenue ont en outre été maintenus.

Autre innovation majeure, nous avons élargi la clause d'expérimentation du texte et les dispositions sur le contrôle parlementaire renforcé. Vous le savez, seules les mesures individuelles et les visites domiciliaires prévues par les articles 3 et 4 étaient concernées. Le dispositif est désormais étendu aux périmètres de sécurité et à la fermeture de lieux de culte prévus par les articles 1er et 2. C'est une garantie supplémentaire très importante, à laquelle nous tenions tous, je crois.

Enfin, à l'article 10, nous avons restreint de vingt à dix kilomètres le rayon du périmètre des contrôles d'identité susceptibles d'être conduits autour des ports et aéroports constituant des points de passages frontaliers. L'arrêté du ministre désignant les ports et aéroport pourra même définir une distance inférieure. En accord avec le Sénat, cette nouvelle rédaction nous permet de nous mettre en conformité avec l'exigence constitutionnelle de proportionnalité, dès lors qu'un grand nombre d'agglomérations françaises, situées à proximité des grands aéroports, auraient pu être concernées.

Mes chers collègues, nous sommes en guerre. La France est une cible privilégiée du terrorisme. La menace est forte et durable. Ce n'est pas l'affaire de six mois, d'un an ou de quelques années ; c'est l'affaire d'une ou de plusieurs générations, nous le savons tous. Dès lors, la question qui se pose n'est pas de savoir s'il fallait ou non sortir de l'état d'urgence. Nous ne pouvons pas rester perpétuellement en état d'urgence car il est par nature temporaire et par essence exceptionnel, nous l'avons suffisamment expliqué. Les menaces durables doivent donc être traitées par des instruments permanents de lutte contre le terrorisme.

Le Conseil constitutionnel nous l'a dit ; le Conseil d'État nous l'a dit. Surtout, sous la précédente législature, tous les parlementaires, de tous les partis de gouvernement, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, dans le cadre du contrôle parlementaire renforcé de l'état d'urgence, le soutenaient : il faut sortir de l'état d'urgence.

Aussi, la seule question qui se pose à nous est la suivante : notre texte permettra-t-il de conserver le même niveau de sécurité pour les Français face au terrorisme ?

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