Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du mercredi 12 décembre 2018 à 15h00
Sécurisation de l'exercice des praticiens diplômés hors union européenne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Firmin Le Bodo :

Le pic de la crise de la démographie médicale est en effet attendu entre 2021 et 2025. En cause, la gestion à courte vue du numerus clausus, dont l'abaissement au cours des années 1980 et 1990 produit aujourd'hui des effets à retardement.

Présents au sein de nos hôpitaux depuis de nombreuses années, les praticiens diplômés hors de l'Union européenne ont constitué l'un des outils de la lutte contre la pénurie de médecins. L'autorisation d'exercer en France les professions de médecin, de chirurgien-dentiste, de pharmacien et de sage-femme est soumise à plusieurs conditions : être titulaire du diplôme français ou d'un diplôme européen équivalent, être ressortissant français ou d'un État membre de l'Union européenne et être inscrit à l'ordre correspondant. Confrontés à la recrudescence des déserts médicaux et à la répartition disparate sur le territoire des praticiens médicaux, de nombreux établissements de santé ont recruté, depuis les années 1970 et dans des conditions juridiques contestables, des professionnels diplômés hors de l'Union européenne afin de combler les postes restés vacants et d'assurer la continuité des soins.

Afin de sécuriser la situation de ces nombreux professionnels – principalement des médecins – qui exercent dans nos établissements sans y être véritablement autorisés, plusieurs lois ont tenté de fixer un cadre juridique adapté. Dernière en date, la loi de financement de la sécurité sociale de 2007 avait instauré un dispositif d'autorisation temporaire, accompagné d'une procédure dérogatoire d'autorisation de plein exercice. Cet examen dérogatoire a permis à environ 13 000 à 14 000 PADHUE d'intégrer de manière pérenne notre système de santé et de bénéficier de la plénitude d'exercice. Toutefois, faute d'avoir obtenu une autorisation de plein exercice, quelques centaines de PADHUE continuent aujourd'hui d'exercer sous le régime d'autorisation temporaire prévu par la loi de financement de la sécurité sociale de 2007. En l'absence d'adaptation du cadre législatif avant le 31 décembre 2018, ils ne rempliraient plus les conditions légales pour exercer dans les établissements de santé français et se verraient, en conséquence, dans l'obligation de cesser immédiatement leurs fonctions à compter du 1er janvier 2019, avec de graves conséquences pour la continuité des soins dans nos hôpitaux. L'objet de l'article unique de la présente proposition de loi est d'y remédier.

Au-delà, il convient de trouver une solution définitive pour les PADHUE n'ayant pas régularisé leur situation et obtenu une autorisation d'exercice. On estime aujourd'hui à 4 000 ou 4 500 le nombre de professionnels de santé étrangers ayant échoué trois fois ou refusant d'épuiser leurs chances à l'examen de la liste A et qui sont aujourd'hui dans une zone grise. Bien qu'exerçant au sein de nos hôpitaux depuis parfois de nombreuses années, ces praticiens ne bénéficient pas du même statut que les autres et ne jouissent pas d'une complète autonomie dans leur travail. Ils sont aujourd'hui dans des situations très précaires. Recrutés le plus souvent dans le cadre de contrats de courte durée, ils ne bénéficient pas de perspectives d'évolution de carrière, ni de stabilité professionnelle.

En outre, alors qu'ils effectuent un travail équivalent, leur rémunération est souvent très inférieure à celle de leurs collègues disposant d'un diplôme français ou de l'Union européenne.

Il importe donc d'aller plus loin et d'offrir une solution pérenne aux praticiens étrangers, qui sont aujourd'hui recrutés selon des modalités diverses – en tant que praticiens attachés associés, assistants associés ou faisant fonction d'interne. Nous nous réjouissons de la tenue d'une concertation et de la refonte du dispositif existant. Nous veillerons à ce que, dans le cadre de la prochaine loi relative à la santé annoncée par le Gouvernement, on sorte par le haut de cette situation et l'on trouve une solution satisfaisante.

L'augmentation du nombre de places ouvertes au concours de la liste A irait dans la bonne direction, de même que l'établissement d'un parcours adapté pour les 4 500 praticiens « hors cadre » afin de régulariser leur situation par une procédure de validation des acquis et, éventuellement, une mise à niveau. Une telle solution devrait maintenir les impératifs de compétence et préserver la nécessité d'une maîtrise de la langue française, en vue de garantir la qualité et la sécurité des soins prodigués. Elle devrait aussi permettre de mieux reconnaître les praticiens diplômés et qualifiés, selon des procédures adéquates.

De manière plus générale, il convient de réfléchir à l'inscription au tableau de l'Ordre de tous les médecins titulaires d'un diplôme étranger, afin qu'ils puissent exercer en France. Alors qu'environ 31 % des praticiens hospitaliers partiront à la retraite d'ici à 2020, la proportion de médecins diplômés à l'étranger parmi les médecins exerçant en France est, de toute façon, amenée à augmenter.

Le groupe UDI, Agir et indépendants votera évidemment en faveur de la proposition de loi, afin de ne pas mettre en difficulté le fonctionnement des services hospitaliers.

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